Une dette des
consommateurs porteuse de taux négatifs serait une « perversion ».
Je ne suis pas certain qu’Ewald
Nowotny, membre du Conseil de direction de la BCE et gouverneur de la Banque
nationale autrichienne, et moi-même ayons une quelconque opinion commune en
matière de politique monétaire. Mais aujourd’hui, il a dit quelque chose que
je pense être empli de vérité – et porteur d’une expression parfaite de l’hypocrisie
des banques centrales et de ceux qui les dirigent.
Son discours, prononcé aujourd’hui
à l’occasion du Forum Alpbach, en Suisse, était intitulé Politiques de
faibles taux d’intérêt : de l’argent gratuit pour tous, et un Salut en
situation d’urgence.
Une question rhétorique, à
laquelle il a ensuite répondu avec la plus grande clarté : l’argent
gratuit, ou pire encore, la monnaie porteuse de taux d’intérêt négatifs, n’est
pas accessible à tous. Seuls les gouvernements et les corporations en
bénéficient. Pas les consommateurs.
A dire vrai, a-t-il expliqué à
ceux qui attendent impatiemment des prêts immobiliers à taux négatifs afin d’être
rémunérés chaque mois pour avoir emprunté trop d’argent pour acheter une
propriété grossièrement surévaluée, une dette des consommateurs porteuse de
taux d’intérêt négatifs serait une « perversion ». Même la Suisse,
qui a les taux d’intérêt les plus négatifs du monde, n’irait pas aussi loin.
« Il serait une perversion
économique pour les taux applicables au crédit de devenir négatifs. Ils
iraient à l’encontre de la nature économique du prêt, » a-t-il expliqué.
Et je suis d’accord. Les taux d’intérêt
négatifs, ou les rendements négatifs, vont à l’encontre de la nature
économique de la dette. Les rendements négatifs de la dette sont une
absurdité qui n’existe que parce que les banques centrales les ont imposés à
leurs baillages.
« En Suisse, c’est une
possibilité qui a déjà été rejetée depuis longtemps. Aujourd’hui, elle se
trouve rejetée par l’Autriche. » C’est donc formel. Les consommateurs
resteront à l’écart du bénéfice des emprunts à taux négatifs, et ne seront
donc pas rémunérés pour emprunter. Oubliez les prêts immobiliers porteurs de
taux négatifs.
Mais voici où se trouve l’hypocrisie :
grâce aux politiques de terre brûlée des banques centrales, les gouvernements
d’Europe et du Japon ont pu emprunter à taux négatif pendant un certain temps
déjà, et une quantité toujours plus importante de dette gouvernementale est
porteuse de rendements négatifs.
Benoît Cœuré, lui aussi membre
du Conseil de direction de la BCE, nous a présenté ce graphique qui démontre
de l’absurdité des taux négatifs. La Suisse se trouve tout en haut avec ses
obligations à trente ans, et le Japon et l’Allemagne arrivent ensuite avec
leurs obligations à dix ans. Au total, près de 12 trillions de dollars de
dette gouvernementale sont porteurs de rendements négatifs :
Au
mois de juillet, l’Allemagne a vendu 4 milliards d’euros d’obligations à dix
ans à un prix supérieur à leur valeur nominale et à taux zéro.
Ce qui garantit que les investisseurs, tels que les fonds de pension qui
achètent ces obligations, ne recevront jamais de versements d’intérêts. Et s’ils
conservent ces obligations jusqu’à leur maturité, ils enregistreront une
perte de capital – sans compter les pertes générées par l’inflation sur la
période.
Les corporations, à l’inclusion
des corporations américaines qui ont des succursales en zone euro, empruntent
à taux négatif en vendant des obligations d’entreprise, parfois directement
à la BCE au travers de placements privés. Nul besoin de marché. Selon Bloomberg,
il existait en juillet 500 milliards de dollars d’obligations d’entreprise
porteuses d’intérêts négatifs. Et ce chiffre continue de gonfler.
Les banques centrales ont forcé
ce genre de répression financière sur les investisseurs afin qu’ils perdent
de l’argent non seulement à cause de l’inflation mais aussi en termes
nominaux lorsqu’ils investissent sur ce qu’ils considèrent être de la dette
de haute qualité. Pour enregistrer des rendements, il leur faut prendre de
très gros risques.
Les banques centrales ont fait
de la répression leur politique. Le capital des épargnants a été détruit il y
a bien longtemps. Les fonds de pension seront les prochains à souffrir. La
répression financière est discriminatoire pour ceux qui se trouvent de l’ « autre
côté ». Aujourd’hui, les consommateurs qui souffrent des politiques des
banques centrales cherchent à profiter des mêmes absurdités et perversions
que les corporations et gouvernements. Et comme l’a dit Nowotny, les banques
centrales feront tout leur possible pour que cela ne se produise pas. L’accès
aux bénéfices de ces absurdités est limité à un groupe très restreint.
Au Japon, ces politiques se font
de plus en plus perverses. Les deux plus gros acheteurs de Japan Inc volent
désormais sans plus aucune visibilité. Lisez ceci : QE,
End of the Private Sector? Japanese Government Now Largest Shareholder of 474
Big Companies