Ces deux dernières semaines, en écho aux récents sursauts des marchés
ainsi qu’aux différents évènements politiques mondiaux dont l’élection de
Donald Trump à la présidence américaine ne fut pas des moindres, les
cours de l’or ont été particulièrement chahutés. Face à ces
importantes fluctuations, certains investisseurs se sont alors émus de l’apparente
instabilité de leur patrimoine converti en métaux précieux. Or, si
elle paraît légitime au premier abord, leur inquiétude se révèle en réalité
totalement vide de sens, en raison justement de la nature très
spécifique de ce genre de placement.
L’or n’est pas un placement spéculatif
La première chose que doit savoir toute personne qui investit dans l’or
c’est qu’il n’effectue pas un placement comme les autres. Contrairement aux
actions ou à l’immobilier notamment, l’or n’est pas un support
d’investissement spéculatif, en ce sens qu’il ne saurait constituer
un actif susceptible d’enrichir son détenteur. Certes, cette possibilité
existe et c’est tout de même une composante essentielle de son attrait : ceux
qui ont acheté de l’or à 300 dollars l’once aux début des années 2000 s’en
félicitent encore aujourd’hui. Mais justement, tout est là : l’intérêt de
l’or en tant qu’investissement ne peut s’apprécier que sur le long
terme, car son but premier est avant tout de protéger la valeur d’un
patrimoine en temps de crise. C’est d’ailleurs pour cela qu’on le qualifie de
valeur-refuge.
Par conséquent, vouloir adopter les mêmes réflexes que l’on a à l’égard
des autres types d’investissement n’a strictement aucun sens, à commencer par
cette mauvaise habitude qu’on a tous plus ou moins prise avec Internet : suivre
l’évolution des cours à tout moment, quasiment en temps réel. Non
seulement ça n’a pas de sens mais c’est en outre particulièrement trompeur
car, du fait de sa nature particulière, l’or d’investissement ne
saurait être réduit à ses seules variations épisodiques, qu’elles
soient quotidiennes, hebdomadaire ou même mensuelles. Décider d’acheter ou
non de l’or en fonction de son seul cours est clairement le signe qu’on n’a
pas compris à quoi correspond ce type de placement.
Les variations ponctuelles de l’or doivent être ignorées
L’or est à l’investissement ce que le chat de Schrödinger est à la
physique traditionnelle : une aberration logique qui le rend à la fois mort
et vivant. Plus exactement, l’or est à la fois hors des marchés traditionnels
et étroitement lié à leur évolution ; il est « vivant » en ce sens qu’il
est susceptible de réagir aux fluctuations des valeurs classiques
(principalement par les reports de capitaux opérés par les agents économiques
en fonction des risques auxquels ils se trouvent exposés) et
« mort » selon le principe qu’il n’a pas vocation à
produire de la richesse. Car on ne s’enrichit pas avec l’or, on
protège juste son capital en l’enfermant dans une sorte de boîte dorée dont
les caractéristiques immuables et inaltérables préserveront son rapport avec
le reste de l’économie. Et comme le chat de l’expérience, c’est au moment où
on ouvre la boîte que l’or prend tout son sens.
De fait, chercher à deviner l’état futur de son patrimoine converti en or,
en se basant par exemple sur le cours actuel du métal, n’a strictement aucun
intérêt car seule comptera sa valeur au jour où on le délivrera de sa gangue
dorée. Et ce jour-là, sa valeur par rapport aux autres actifs du moment aura
été parfaitement conservée. À condition, bien entendu, d’avoir joué le jeu et
d’avoir compris l’objectif de l’or d’investissement.
La logique implacable de l’investissement en or
Si vous cherchez à spéculer, à gagner de l’argent, à faire fructifier un
capital ou encore à vous constituer un revenu d’appoint basé sur le rendement
de votre investissement, alors fuyez l’or sans vous retourner. Ce n’est pas
pour vous. Privilégiez les actions, risquées mais potentiellement rentables
tant que les marchés tiennent encore debout, ou encore l’immobilier, peu
rentable à court terme, mais particulièrement stable et intéressant à long
terme si vous savez choisir le bon moment pour investir (en plus, vous aurez
toujours un toit au-dessus de la tête). L’or n’est là que pour vous assurer
une sorte de garantie de préservation sur la valeur de votre
patrimoine, ou en tout cas d’une partie de votre patrimoine. En effet, on
recommande de ne pas consacrer plus de 5 à 10% de son capital à
l’achat d’or, car si on veut réellement profiter pleinement des
qualités de ce placement, il faut accepter de « bloquer » ce
capital pour une durée indéfinie.
Car dans les faits, la véritable force de l’or se révèle en temps de
crise, que ce soit quand on a tout perdu à titre personnel, ou d’une manière
plus générale lorsque tout le reste de l’économie ou presque est partie à
vau-l’eau. Dans ce dernier cas, il y a de grandes chances pour que la plupart
des actifs traditionnels aient perdu toute espèce de valeur, et seuls l’or et
l’argent (à ne surtout pas négliger non plus pour sa capacité à assurer les
transactions mineures du quotidien) continueront à représenter quelque chose
de négociable. En dehors de ces périodes de crise, l’or doit être
considéré comme une assurance, de celles qu’on ne déclenche qu’en
cas d’extrême nécessité, quand on n’a plus le choix. En clair, l’or
devrait être la dernière chose dont vous vous débarrasseriez en cas de besoin.
Dans toutes les autres situations, gardez simplement votre or sans vous
soucier de ce qu’il vaut aujourd’hui ou demain, à 10 heures ou à minuit.
La valeur de l’or n’a que peu d’intérêt
Derrière ce jeu de mot un peu facile (car c’est vrai que l’or
n’est pas censé produire d’intérêt), se cache la seule réalité de
l’or : sa valeur actuelle exprimée en devise n’a aucun sens
puisqu’elle est justement basée sur ce que le véritable investisseur dans
l’or cherche à fuir, à savoir les fluctuations de plus en plus
artificielles d’un système monétaire lui aussi complètement faussé que plus
personne ne maîtrise. Mieux vaut connaître la valeur d’une once d’or
en poules ou en légumes qu’en euros ou en dollars !
Celui qui cherche à convertir une partie de son capital en or ne devrait
donc pas se soucier de son cours, même si cela lui permet de savoir combien
il pourra « épargner » au total, mais plutôt de ce que cela
représente en potentiel de richesse par rapport au coût de la vie.
Nul doute qu’en y réfléchissant de cette manière, il comprendra que, quelles
que soient les variations des cours de l’or par temps relativement calmes
(hors crises majeures), variations qui n’auront alors pas vraiment d’intérêt
pour lui, seule comptera vraiment la valeur de son or au jour où il
en aura réellement besoin, c’est à dire quand les temps seront
redevenus durs. Et à ce moment-là, il pourra constater que son or lui
aura permis de conserver le même pouvoir d’achat.
Néanmoins, ne nous leurrons pas. Les cours bas permettent d’acheter de
l’or en profitant d’un effet d’aubaine, mais l’or reste intéressant à
n’importe quel moment, ne serait-ce que pour sa qualité de valeur-refuge. En
outre, l’or étant un actif de long terme, même en absence de crise (qu’elle
soit généralisée ou simplement personnelle), le fait de n’y avoir consacré
qu’une faible partie de son capital permet de choisir le moment où on
décidera de s’en défaire, généralement bien longtemps après l’avoir
acquis… et pour une valeur très souvent bien supérieure.
NB : toutes les considérations du présent article ne sont bien évidemment
valables que pour le seul et unique actif pouvant prétendre à l’appellation
d’or d’investissement, c’est à dire l’or physique.