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Il y a des mots et des idées
que certaines gens ne veulent pas entendre, car ils les croient empreints
d’immoralité. Prononcez le mot « profit »
et certaines personnes s’étouffent! D’autres, à
l’esprit plus ouvert, n’en ressentent pas moins un malaise
à parler de profit, de compétition ou encore à la
même association, si ce n’est qu’à un moindre degré.
Le profit
« Au gouvernement on ne
travaille pas pour le profit ». Voilà une phrase qu’on
entend presque à tous les jours. Elle n’est pas fausse, mais
elle sous-entend qu’il vaille mieux travailler pour le gouvernement que
pour le marché, car « profit » ne rime pas avec
« entraide ». C’est oublier que sans le profit,
le politicien, le fonctionnaire et le bénéficiaire
n’existeraient pas. Du moins, ils devraient trouver un autre moyen de
se faire vivre, car ce n’est qu’en imposant le profit, le revenu
et le capital qu’ils tirent leurs propres revenus.
Non seulement les
marchands et les entrepreneurs aident les gens, mais ils doivent constamment
améliorer cette aide sous peine de se faire remplacer par
d’autres qui n’y manqueront pas. L'aide prend la forme de
produits et de services de plus grande qualité ou à meilleur
prix, ou encore les deux.
L’amélioration des produits et des services n’est possible
qu’à la condition que l'homme d'affaires réinvestisse une
partie, voire la totalité, des profits tirés des
activités de son entreprise. Une entreprise qui ne ferait que donner
ses produits finirait par disparaître. Par conséquent, le profit
est une condition sine qua non à la hausse du niveau de vie.
Le profit
n’est-il pas le résultat de l’exploitation
d’autrui? Plusieurs le pensent, d’où le fait
qu’ils croient légitime qu'on l’impose. Pourtant,
lorsqu’on leur demande si tous les marchands sont des exploiteurs, ils
répondent non et précisent leur pensée en disant
qu’il y a exploitation lorsque le profit est excessif. Si on est libre
d’acheter et de vendre des produits et services, on ne peut pas parler
d’exploitation. Et si un marchand s'évertue à trop
chercher une marge élevée de profit, d’autres
entrepreneurs saisiront l’occasion d’offrir les mêmes
produits ou services à meilleur coût.
Beaucoup de gens ne
peuvent concevoir que de ce qu’ils considèrent vil,
l’appât du gain ou la quête de profit, puisse naître
quelque chose de bon: l’innovation, la baisse des prix ou la hausse du
niveau de vie. Ils sous-entendent que tout vendeur est un profiteur. Or,
acheteur et vendeur tirent un avantage de chaque transaction, soit en
monnaie, soit en bien ou service.
Le profit n’est
possible qu’à la condition qu'il y ait l'offre d'un produit ou
d'un service désirée par les consommateurs. Essayez de vendre
vos guenilles pour un million de dollars, juste pour voir combien de gens
vous pourrez exploiter! L’appât du gain est inoffensif tant qu’il
n’est pas appuyé par la force de l’État; il est
même souhaitable tant qu’il est associé à
l’idée de rendre service à autrui.
Ainsi, la quête
de profit non seulement n’est pas mauvaise en soi, mais elle sert
d’incitation à l'amélioration de sa condition de vie et
de celle d’autrui. Dans un contexte où la
propriété est respectée, on ne peut donc dissocier la
quête de profit du désir de servir.
La concurrence
La concurrence (ou la
compétition) dont il est question dans une économie de
marché n’a rien à voir avec celle du règne animal
où tuer est une question de survie. L’homme reconnaît
d’emblée que s’il tue autrui, le vole ou le fraude, il
devra en payer le prix. Il ne s’agit pas non plus d’une
compétition ludique ou sportive, car son objectif est de mieux servir
les gens.
Cette concurrence est
saine à plus d’un point de vue: 1) Elle se pratique dans un
esprit de coopération et non de confrontation comme on le laisse trop
souvent entendre. Cela ne signifie pas que la confrontation soit inexistante,
mais plutôt qu’elle ne constitue pas le moteur de
l’échange; 2) Elle encourage chacun à se dépasser;
3) Elle bénéficie à tous à moyen et à long
terme.
Malheureusement, les
étatistes donnent mauvaise presse à la concurrence pour
s’arroger plus facilement des monopoles et des quasi-monopoles dans
différents secteurs d’activités: la santé,
l’éducation, les pensions, l’énergie, etc. Cette
façon coercitive de procéder encourage les acteurs du secteur
privé à vouloir la même chose. Les entreprises demandent
des subventions et une protection contre la concurrence. En cédant
à ces revendications, le gouvernement appauvrit les consommateurs,
encourage le nationalisme et attise la confrontation qu’il a
lui-même initiée.
L’individualisme
Il n’y a pas de mal à
promouvoir sa différence, en autant qu’on ne viole pas la
propriété d’autrui. Or se servir du pouvoir
d’imposition et de taxation constituent une telle violation. Ces modes
de revenus n’ont pas le consentement de tous, ce qui est pourtant
essentiel pour maintenir, au-delà des différences, une
égalité entre les hommes.
On parle ici de
l’égalité qui donne une dignité à
l’être humain, soit celle qui rejette toute forme
d’agression envers autrui, y compris l’imposition et la taxation.
Il s’agit de traiter l’homme comme une « fin en
soi », dirait Kant. Lorsque cette égalité est
établie, la promotion des différences est inoffensive. Dans le
cas contraire, les différences s’établissent selon des
rapports de force destructeurs.
L’individualisme
conçoit l’homme au-delà de ses différences. Il
s’agit d’une philosophie qui donne de l’importance aux
individus parce qu’ils font partie d’une même
espèce. Tous les regroupements auxquels l’homme appartient par
choix ou caractérisation – genre, ethnicité, traits
culturels et sociaux, pratiques religieuses et sexuelles, etc. – lui
sont subordonnés.
Le collectivisme
prétend en vain à l’universalité. Chaque
perspective collectiviste voudrait que la langue qu'elle privilégie,
ses pratiques, ses politiques et ses croyances soient unanimement
partagées. Mais ramener la réalité humaine à ces
traits communs constitue une des principales erreurs des collectivistes, pour
qui l’individu n'a de l’importance que s'il appartient à
certains groupes. Cette philosophie est non seulement erronée, elle
est dangereuse pour la survie de l’espèce. On n’a
qu’à revoir l’histoire du communisme et du
national-socialisme pour s’en convaincre. Seul l’individualisme
est universel, car il va au-delà des croyances, des traits sociaux et
culturels de l’homme. Si le mot rebute toujours, on n’a
qu’à le remplacer par le mot
« libéralisme », qui a la même
signification.
Il ne s’agit pas
de nier ces traits et caractéristiques, mais de les reconnaître
comme ce qui différencie un homme d’un autre. Cette
faculté, de reconnaître, regrouper et distinguer, est une
caractéristique universelle qui permet d’affirmer qu’il
existe une égalité entre les hommes. Elle reconnaît
l’intérêt à coopérer avec autrui, peu
importe ses différences. Il s’agit donc d’une philosophie
pacifique qui a pour principe la non-agression.
L’individualisme
est également à différencier de
l’égoïsme. Donner de l’importance à
l’individu n’enlève rien à la collectivité,
mais signifie notamment que les choix d’un homme, quand bien même
il serait seul à les désirer, doivent être
respectés tant et aussi longtemps que celui-ci n’agresse
personne pour les réaliser.
L’individualisme
ne corrige pas nécessairement l’égoïsme, mais ne
l’encourage pas non plus. Agir égoïstement n’est pas
une raison suffisante pour imposer un homme. L’égoïsme et
les préjugés sont communs, ils peuvent être
déplaisants, mais n’agressent personne, si ce n’est que
psychologiquement. La véritable agression est commise lorsqu'on impose
les gens sous prétexte qu'on veut rendre le monde «
meilleur ». Or, ne pas démontrer de qualités morales
n’est pas synonyme d’injustice et imposer les revenus
n’améliore pas le caractère.
L’individualisme
est donc tolérant et promeut la différence dans le respect
d’autrui. On ne peut en dire autant du collectivisme. Celui-ci cherche
à ramener les choix de chacun aux valeurs prédominantes de la
société, de la communauté ou de l’association.
Pour ce faire, la démagogie et la manipulation, d’une part,
l’imposition et la coercition, d’autre part, lui sont
nécessaires.
En peignant en noir un
certain vocabulaire, tout ce qu’on fait est d’exprimer ses
sentiments. Pour comprendre l’action humaine, il faut aller
au-delà des sentiments, sans les réprimer. Décrire
l’action humaine demande autant de rigueur que de décrire
l’objet inanimé, voire davantage, sachant que les sentiments
surgissent plus facilement dans l’étude de l’homme que
dans celle de la nature en général. Des valeurs et des
croyances sont ébranlées, mais de ce bouillonnement
s’ensuit la création et l’innovation qui, à leur
tour, adoucissent la vie.
André Dorais
André
Dorais a étudié en philosophie et en finance et vit à
Montréal.
Les vues présentées par l’auteur sont
les siennes et peuvent évoluer sans qu’il soit nécessaire
de faire une mise à jour.
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