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Published : January 18th, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

Les dirigeants européens font de la politique, et quelle politique ! Les voilà embarqués dans la négociation entre quatre yeux d’un paquet de mesures destinées à gérer la crise, où chacun glisse son grain de sel et cherche à protéger ses intérêts. Un exercice délicat qui pourrait fort bien ne pas être terminé à temps pour leur prochain sommet du 4 février, continuant d’alimenter toutes les incertitudes. Prochain arrêt : les 24 et 25 mars prochains.


Concentrée sur ses échéances de l’année à venir, la coalition gouvernementale allemande CDU-FPD voudrait trouver les meilleurs arguments électoraux pour justifier de prochains sauvetages européens – c’est en tout cas ainsi qu’elle voit les choses. Avec comme stratégie d’échanger sa participation financière à un dispositif d’aide renforcé contre de nouvelles assurance de réduction des déficits publics.


Dans l’obligation de ne pas décrocher des Allemands, les Français tentent de tempérer leurs ardeurs renforcées, avec en vue leur propre élection présidentielle et la crainte de devoir trop vite obtempérer à leurs injonctions. Tout en s’efforçant d’avancer leur projet d’harmonisation progressive (de convergence), fiscale puis sociale. Afin d’entraîner les Allemands vers la définition d’une politique économique commune et de les écarter de leur intransigeante rigueur budgétaire. Ministre des affaires européennes, Laurent Wauquiez vient de suggèrer ainsi le lancement de « project bonds » (des obligations européennes destinés à financer des grands projets d’infrastructure).


A la recherche de relais financiers, les Portugais multiplient les démarches hors d’Europe – la dernière en date au Quatar et aux Emirats – dont ils voudraient éviter le baiser qui tue, le FMI de sinistre mémoire leur servant d’épouvantail. Devant se rendre à l’évidence, le gouvernement espagnol tente de sauver ses Cajas, son réseau de caisses d’épargne, en attirant des capitaux privés pour le recapitaliser, car n’en ayant plus les moyens. Les estimations varient, mais les plus mesurées considèrent qu’entre 32 et 78 milliards d’euros seraient nécessaires, c’est tout du moins l’analyse de la Barclays. La largueur de la fourchette exprimant à elle seule l’opacité de leur situation.


La BCE, par l’intermédiaire de son président, rappelle une fois de plus à l’ordre tout le monde, en utilisant les colonnes du journal à sensation allemand Bild pour exhorter les gouvernements européens à accomplir « d’énormes efforts pour réduire leur dette ». Avec en vue de favoriser le bouclage d’un montage qui la libérerait de la poursuite de ses interventions sur le marché obligataire, le fonds de stabilité européen prenant le relais dans le cadre du paquet que veut négocier Angela Merkel. Donnant-donnant, annonce-t-elle sans ambages.


Dans ce cadre, elle réaffirme son soutien à la candidature d’Alex Weber à la succession de Jean-Claude Trichet à la présidence de la BCE, qui s’est précisément publiquement opposé à ces interventions de la BCE et pourrait ainsi s’y installer en territoire pacifié. Un gage non négligeable serait ainsi accordé aux Allemands.


José Manuel Barroso, président de la commission européenne, en vient à critiquer avec une audace que l’on ne lui connaissait pas les Allemands, persévérant dans sa proposition d’augmenter sans attendre les moyens du fonds de stabilité, au nom de la défense du « bien de l’Europe » et d’un « rôle de la commission » qu’il semble être seul à vouloir tardivement défendre.


Ces jeux politiques à courte vue tiennent lieu de stratégie, expressions de contradictions d’intérêt donnant lieu à de difficiles arbitrages. Ceux-ci se sont jusqu’à maintenant révélés dépassés chaque fois qu’ils ont été rendus, le risque étant que cela se renouvelle.


A moins que, bon gré mal gré, la ligne allemande finisse par balayer les résistances et que, graduellement, toute l’Europe sombre dans la rigueur budgétaire, accompagnée d’une récession virant à la stagflation, sous les effets de la spéculation financière mondiale sur les matières premières et les augmentations de la TVA ou des tarifs réglementés. Avec comme inévitable conséquence la chute de la croissance allemande, dont les relais à l’exportation dans les pays émergents ne compenseront pas la chute de leur commerce au sein de la zone euro.


Ce scénario est écrit, reste à voir s’il va être réalisé. Un peu de patience va être nécessaire, avant de savoir où le curseur va être cette fois-ci placé.


Une telle perspective pourrait bien trouver à terme son répondant outre-Atlantique, car si la politique de la Fed contribue à contenir la hausse des taux obligataires US et à favoriser les résultats du secteur financier, elle ne parvient pas à résoudre l’équation de la croissance et du chômage, et donc de la dette. Là aussi, les jeux politiques ont leur mot à dire, avec la perspective des prochaines présidentielles dans moins de deux ans ; mais la corde du déficit américain continue de se tendre et avec elle celle du système monétaire international, rapprochant inexorablement les échéances. Une question de temps, sans plus.


Soumis au suffrage universel, aussi corrompu que puisse être l’exercice, les gouvernements en place tentent de temporiser et de biaiser afin de ne pas avoir à tailler dans le vif. Mais ils sont rattrapés par une crise financière qui les dépasse et leur impose de réagir à contre-temps de leurs échéances.


De son côté, le système financier tente de s’adapter à la donne. Aux Etats-Unis, les résultats annuels des mégabanques vont tomber durant la semaine à venir, JP Morgan a tiré la première en annonçant des profits en hausse de 47% par rapport à l’année dernière. On verra la suite. En passe d’application afin de renforcer le système bancaire, un plan repose sur trois piliers : d’excellents résultats des mégabanques aux bons soins de la Fed, une hausse boursière des valeurs bancaires et la distribution de dividendes à leurs actionnaires. De quoi inciter les investisseurs à remettre une couche de peinture, sans avoir décapé la précédente.


En Europe, la situation est plus tendue. Parce que le ménage dans les bilans a été encore moins effectué qu’aux Etats-Unis et que les besoins de financement sont relativement plus importants. En présentant ses voeux aux édiles financiers, Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, a clairement exprimé l’enjeu : « Je vous demande de travailler sans délai au renforcement le plus rapide possible du niveau et de la qualité de vos fonds propres, de façon à anticiper autant que possible les échéances prévues par Bâle III ». On ne saurait mieux exprimer qu’il faut se dépêcher de se servir sur le marché, car les taux vont y augmenter.


Sur le front du renforcement des fonds propres des banques, la situation vient en effet de se compliquer un peu. Au fur et à mesure qu’il précise les caractéristiques des CoCos (les obligations hybrides contingentes), afin qu’ils soient éligibles au Tier one de ceux-ci, le Comité de Bâle durcit la peine. En cas de mauvaise fortune d’une banque, la décision de convertir ses CoCos en actions serait entre les mains des autorités, législatives ou réglementaires. Une perspective qui, comme on s’en doute, diminue encore leur attrait aux yeux des investisseurs et va les inciter à accroître leurs prétentions en termes de rendement.


Tenter de comprendre les ressorts du marché obligataire impose d’en voir toutes les facettes. Afin de renflouer la dette, qu’elle soit privée ou publique, il est en effet fait appel par les Etats et les établissements financiers à ce même marché, cette entité abstraite qui fait la loi sans que ses séances soient publiques et ses membres identifiés. Une telle histoire destinée aux enfants est-elle tenable longtemps ?


Billet rédigé par François Leclerc

Paul Jorion

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

   

 

 

 

 

 

 

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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