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Il y a quarante ans, le problème
économique sur quoi les hommes de l'Etat de l'Occident aimaient
à attirer l'attention des bons peuples était celui des balances
des paiements des pays - qu'en France, les services de la Banque de France
avaient le privilège d'établir pour ce qui concernait la
balance des paiements de la France -.
En particulier, le déficit de la balance des paiements courants des
Etats-Unis et l'excédent de la balance commerciale du Japon
déclenchaient les passions.
Et, par des réunions ou des conférences internationales, ils
affirmaient qu'ils résoudraient les problèmes.
Les articles des 28, 29, 30 et 31 août 1972 de Raymond Aron
publiés dans le quotidien Le
Figaro, que je reproduis ci-dessous, ponctués de deux
textes de Jacques Rueff sur les droits de tirage spéciaux (D.T.S.),
illustrent le fait.
Aron a écrit les articles pour fêter le premier anniversaire du coup d'Etat monétaire du président des
Etats-Unis, Richard Nixon, le 15 août 1971.
Entre temps, Aron n'avait écrit dans Le Figaro que trois articles sur le sujet, les
16 et 20 décembre 1971, et 28 janvier 1972, à l'occasion ou
à l'issue de quelques réunions internationales (cf. textes des
articles en annexe ci-dessous).
De fait, les décisions prises ont tenu et tiendront dans de nouvelles
règles mais d'un esprit semblable à l'esprit antérieur
et à celui qui allait conduire à l'actualité
d'aujourd'hui : à savoir, on concocte des règles au niveau
international - c'est ce qu'on dénomme des "accords
monétaires internationaux" -, on s'engage à les appliquer
ou à les respecter et, au niveau national, on ne les respectera pas
pour différentes raisons - dont le florilège n'est pas à
faire tant il est sans intérêt et répétitif jusqu'à
aujourd'hui inclu...-.
C'est ainsi que, par exemple, Aron a insisté dans l'article du 30
août sur le fait que :
"les statuts de Bretton Woods
prévoyaient qu'un pays dont les comptes extérieurs sont
déficitaires ne doit pas exporter de capitaux" et que la
règle n'avait pas été respectée...
De la même façon, aujourd'hui, dans le cadre des accords de
l'euro, les règles sur le déficit budgétaire et
l'endettement d'un Etat dont on n'avait pourtant entendu beaucoup parler sous
l'appellation "critères de Maastricht",
n'ont pas été respectées...
Il reste que le monde occidental est passé de la situation d'hier
à celle d'aujourd'hui car tous les accords monétaires
internationaux, respectés ou non, ont eu comme conséquence
essentielle - et cachée jusqu'à ces derniers temps
- d'alimenter le faux problème des balances des paiements alors que,
simultanément, ils ouvraient une perspective aux hommes de l'Etat,
chacun chez soi : désormais, ils pourraient choisir d'avoir un
déficit budgétaire pérenne et voir augmenter ainsi, sans
frémir, leur endettement "souverain", cela malgré les
privatisations de firmes publiques à quoi certains d'entre eux se
résolvaient.
En vérité, les accords monétaires internationaux du
XXème siècle, respectés ou non, cachaient la cause des
prétendus problèmes de balance des paiements, à savoir
les politiques économiques suivies, i.e. les actions des hommes de
l'Etat.
Et ils allaient faire sauter certains verrous ou, si on préfère
le mot, certaines règles de juste conduite qui, dans le passé,
pouvaient entraver leurs actions, voire les conduire à
déclencher des guerres armées.
Mais il en subsiste et en subsistera toujours et tout semble fait pour ne pas
les évoquer. J'aurais l'occasion d'en parler dans des billets
prochains (j'en ai déjà parlé dans, entre autres, ce billet).
1. "Le règne
du dollar découronné".
Article du 28 août 1972
"Un an s'est écoulé depuis que Richard Nixon a
formellement rompu le lien entre le dollar et l'or — et le ciel ne
s'est pas écroulé sur nos têtes.
La vague angoisse qu'une catastrophe économique suivrait
nécessairement une crise monétaire s'est dissipée.
La reprise de l'économie américaine s'affirme.
L'économie française poursuit une expansion normale,
l'économie allemande est sortie de la phase descendante du cycle.
Les décisions américaines du 15 août 1971 avaient
provoqué un effondrement des cours, à la Bourse de Tokyo et
à celle de Paris en particulier — effondrement que seules
l'émotion ou l'erreur de diagnostic expliquaient.
D'aucuns voyaient les signes précurseurs d'une crise comparable
à celle de 1929, dont le souvenir continue de hanter les esprits.
La flottaison de la livre, cette année, a laissé les
opérateurs, même à la Bourse de Paris,
indifférents.
a) Que s'est-il donc
passé effectivement au cours de l'année 1971 ?
Les autorités américaines se sont finalement
résignées (ou résolues),
- d'une part à rendre officielle l'inconvertibilité du dollar
en or (ou même en tout autre actif),
- d'autre part à imposer aux Européens et aux Japonais une
dévaluation du dollar, dévaluation obtenue par une combinaison
de réévaluation de l'or et de réévaluation de
certaines monnaies.
b) La dévaluation
globale de la monnaie américaine par rapport aux monnaies de tous les
pays développés marque-t-elle la fin de la souveraineté
du dollar ?
Il se peut qu'avec le recul les historiens en jugent ainsi.
Dans l'immédiat, le dollar dévalorisé règne plus
souverainement aujourd'hui qu'hier.
Hier, les autorités de Washington s'interdisaient les manipulations de
la parité du dollar, elles restreignaient la convertibilité en
or, mais elles toléraient la convertibilité en droits de tirage
spéciaux (D.T.S.) et au Fonds monétaire international.
Depuis que le dollar a été théoriquement
découronné, il constitue plus que jamais la seule monnaie
transnationale,
- celle qu'utilisent les banques centrales pour opérer sur les
marchés des changes,
- celle qui sert le plus souvent aux Européens eux-mêmes pour
passer d'une monnaie d'un pays membre de la Communauté à une
monnaie d'un autre pays membre.
c) Pourquoi une monnaie inconvertible,
dont la parité est devenue objet de spéculation, joue-t-elle ce
rôle ?
L'économie européo-américano-japonaise, le marché
mondial capitaliste ne peuvent guère .se passer d'une monnaie
transnationale : aucune autre monnaie nationale ne peut remplacer le dollar.
Le décrochage entre le dollar et l'or contribue plutôt à
la démonétisation qu'à la restauration monétaire
du métal.
Ces conséquences ne me paraissent à. aucun degré
surprenantes : j'avais écrit maintes fois que la « victoire
» remportée sur le dollar, au moins en une première
phase, embarrasserait les vainqueurs plutôt que le vaincu.
En effet, les Européens, en particulier les Français, sont
hostiles pour d'excellentes raisons au système actuel, au
déficit de la balance des comptes des Etats-Unis ou, du moins,
à ce que l'on appelle déficit, les Etats-Unis obtenant des
banques centrales étrangères ou des particuliers
détenteurs de dollars des crédits à court terme qui leur
permettent de financer diplomatie et investissements des firmes multinationales.
Tout se passe, ainsi que l'ont souvent écrit les économistes
d'outre-Atlantique, comme si les États-Unis exerçaient une
fonction bancaire,
- recevant des capitaux du dehors, placés en valeurs ou en
obligations, et
- les transformant en actif par investissements directs ou achats
d'entreprises étrangères.
Au cours des années des « déficits américains
», la position nette des Etats-Unis à l'égard du monde
extérieur n'a cessé de s'améliorer.
L'écart entre l'ensemble des créances des Etats-Unis
(gouvernement, firmes, particuliers) à l'égard du monde
extérieur et l'ensemble des créances du monde sur les
Etats-Unis n'a cessé de s'élargir de quelques milliards de
dollars chaque année.
Les Etats-Unis ne peuvent pas rembourser les quelque 50 milliards de balances
dollars parce qu'ils ne veulent pas (d'accord avec leurs créanciers)
liquider leurs actifs au dehors.
Le « découronnement » du dollar n'a nullement
grippé le mécanisme. Celui-ci continue de fonctionner
exactement de la même manière.
La dévaluation du dollar rend un peu plus coûteux (en dollars)
les investissements dans les. pays dont la monnaie a été réévaluée.
Mais les firmes multinationales se sont rapidement adaptées aux
circonstances et elles encaissent probablement plus de profits en jouant sur
les fluctuations des taux de change qu'elles n'en perdent par la
revalorisation du mark ou du yen.
A cette première raison — le dollar reste la monnaie
transnationale parce qu'il n'y en a pas d'autre — s'en ajoute une
deuxième.
La formule banale que nous employons comme tout le monde —
inconvertibilité du dollar — évoque des idées
fausses..
L'inconvertibilité, pour un Français, c'est l'interdiction de
changer librement le franc en une autre monnaie.
Or, à cet égard, le dollar n'a pas cessé d'être la
monnaie la plus convertible du monde.
Certes, la taxe d'égalisation des taux d'intérêt
crée l'équivalent de parités de change multiples.
Les mesures de plafonnement des investissements à long terme
constituaient la première restriction à la totale
convertibilité du dollar en d'autres monnaies.
Malgré tout, dans l'ensemble, le possesseur de dollars garde la
liberté de transférer son avoir, d'acheter le produit qu'il
préfère dans le pays qu'il choisit plus que le possesseur de
n'importe quelle autre monnaie.
Le caractère paradoxal de la fonction transnationale du dollar
s'atténue dès que l'on se rappelle les deux sens de la
convertibilité.
Du même coup, s'explique l'absence de conséquences dramatiques
de « la crise du système monétaire international».
Avant août 1971, le système était aux trois quarts un
système d'étalon-dollar, il restait encore certaines
survivances de l'étalon de change-or.
Depuis l'accord de décembre dernier [cf. annexe ci-dessous], nous vivons sous un
régime qui est à cent pour cent un régime
d'étalon-dollar.
Les banques centrales ne veulent évidemment pas se dessaisir de leur
or qui vaut officiellement 38 dollars l'once et près de 70 sur le
marché libre. Par conséquent, l'or, sans être
démonétisé, ne remplit plus guère de fonction
monétaire.
Quant au dollar, les autorités de Washington laissent aux banques
centrales étrangères la responsabilité d'en maintenir la
parité à l'intérieur de la marge de fluctuation
autorisée.
Plus encore qu'avant 1971 les Européens risquent donc d'être
acculés à l'alternative suivante :
- ou bien accumuler des dollars,
- ou bien tolérer une dévaluation de la monnaie
américaine.
La France a choisi un troisième terme, le double marché, qui se
prête difficilement à la généralisation.
Dans l'ensemble, les partenaires des Etats-Unis préfèrent
garder un surplus de dollars plutôt que subir les effets commerciaux
d'une dévaluation de la monnaie américaine.
Ainsi les Etats-Unis conservent les privilèges et se libèrent
des servitudes de la monnaie-étalon."
2. "En quête
d'une stratégie".
Article du 29 août 1972
"Avant de faire choix d'une stratégie, le gouvernement
français et les gouvernements européens doivent savoir ce
qu'ils veulent, plus précisément encore, les objectifs qu'ils
se proposent d'atteindre.
Que le dollar fasse fonction de monnaie transnationale ou ne soit pas une
monnaie « comme les autres » n'implique pas encore la
condamnation du système.
Il serait déraisonnable de trancher ces problèmes techniques en
fonction de l'amour-propre national ou même en se
référant à notre idée de l'organisation en soi la
meilleure.
a) Quelles sont les
implications du système actuel que le gouvernement français
tient pour injustes et (ou) contraires à l'intérêt du
pays ?
Le fait qu'une monnaie nationale, gérée essentiellement selon
des considérations nationales, serve de monnaie transnationale
entraîne des effets fâcheux.
Je doute personnellement que l'inflation européenne résulte de
l'exportation de l'inflation américaine.
Le taux de hausse des prix a été, de 1960 à 1965,
inférieur aux Etats-Unis à ce qu'il a été,
à la même époque, dans la plupart des pays
européens; il s'est élevé fortement, outre-Atlantique,
de 1965 à 1969.
La reprise actuelle de l'économie américaine semble
s'opérer avec un taux de hausse des prix inférieur au taux
français ou britannique.
Les économies modernes contiennent en elles-mêmes, me
semble-t-il, des causes d'inflation.
Il n'en reste pas moins que les autorités américaines prennent
des mesures d'expansion ou de restriction monétaire en tenant compte
de la conjoncture américaine et non des exigences de l'économie
mondiale.
En deuxième lieu, tous les gouvernements et non pas seulement le
gouvernement français, devraient s'opposer à un système
qui permet des investissements à long terme au-dehors, en
théorie illimités, ou, tout au moins, sans autre limite que les
occasions de profits supérieurs au taux d'intérêt
à court terme ou même à long terme.
Or, la communauté internationale ne peut limiter les investissements
américains au-dehors qu'en restaurant un système qui
empêche ou interdise que n'importe quel pays améliore,
d'année en année, sa position créditrice à
l'égard de l'étranger alors même qu'il ne possède
pas des liquidités suffisantes pour payer ses dettes à court
terme.
En troisième lieu, le gouvernement français se déclare
favorable à des taux de changes fixes et, en particulier, à des
taux de change fixes entre les pays membres de la Communauté
européenne.
M. Pompidou, dès la Conférence de La Haye, a posé
l'unité économique et monétaire en tant qu'étape
prochaine de l'édification européenne.
Face aux décisions américaines du mois d'août 1971, les
membres de la Communauté
européenne ont agi en ordre dispersé, incapables
d'adopter une attitude commune.
La tentative nouvelle d'unité monétaire s'est traduite par la
réduction des marges de fluctuation entre les monnaies des Six.
La flottaison de la livre, avant même l'entrée de la
Grande-Bretagne dans le Marché commun, illustre les obstacles auxquels
se heurtera inévitablement l'entreprise.
La question qui se pose au gouvernement français pour le choix d'une
stratégie se dégage, me semble-t-il, du rapprochement de ces
trois objectifs :
- le gouvernement français a-t-il une chance d'éliminer les
deux conséquences fâcheuses de l'étalon- dollar en
prenant la tête de l'action européenne en vue de l'unification
monétaire de la Communauté, en vue de la création d'une
zone monétaire européenne ?
- Cette zone monétaire parviendrait- elle à l'autonomie face
à la zone dollar?
- Serait-elle capable d'enlever aux Etats-Unis ce qui nous paraît un
privilège exorbitant, à savoir le droit de remplir la fonction
bancaire au niveau international ?
Je souhaiterais donner une réponse positive à ces
interrogations.
Malheureusement, l'expérience de ces dernières années
m'incline au scepticisme.
Je consens que les banques centrales européennes pourraient, si elles
en avaient le ferme propos ne pas recourir, en toute occasion, au dollar et
multiplier les communications directes entre monnaies européennes.
Mais il s'agit là, malgré tout, je le crains, de
phénomènes marginaux.
b) Pourquoi le
gouvernement français souhaite-t-il des parités fixes entre les
monnaies européennes avec des marges de fluctuation réduites ?
Au-delà de la fidélité de principe à la
théorie des parités fixes, c'est le fonctionnement de la
politique agricole commune qui est en question.
De tous les gouvernements de la Communauté,
c'est le gouvernement français qui attache le plus de prix à la
politique agricole commune.
Tout gouvernement britannique, quel qu'il soit, tient et tiendra cette
politique pour détestable en elle-même.
Il s'y est résigné : l'acceptation constituait
l'équivalent de la cotisation à payer pour être admis
dans un club dont les membres fondateurs ont fixé les statuts.
Que M. Heath ou son successeur, s'il est conservateur, respecte les
engagements pris, certes, mais pas au point de compromettre les
intérêts essentiels dont il assume la charge.
Or, parmi ces intérêts figure, aujourd'hui, en première
ligne, le refus d'une politique restrictive à seule fin de
préserver la parité de change d'une monnaie.
La polémique contre les taux de change flexibles semble, plus d'une
fois, étrangère à la réalité, à la
pratique effective des gouvernements, même officiellement
attachés aux taux de change fixes.
Dans le marché mondial d'aujourd'hui, avec des économies
nationales dont le développement s'accompagne d'inflation permanente,
plus ou moins forte selon les pays, l'alternative des taux de change fixes ou
flexibles se réduit à celle
- de dévaluations ou réévaluations fréquentes et
de faible ampleur d'une part,
- de dévaluations ou réévaluations plus rares et de plus
grande ampleur, d'autre part .
Les gouvernements français n'ont hésité à
dévaluer ni en 1958 ni en 1969, ils ont accepté avec
satisfaction les réévaluations du florin et du mark. Même
eux considèrent désormais normale la manipulation des taux de
change.
La bataille du gouvernement Wilson pour sauver la livre appartient au
passé, elle ne sera pas livrée une deuxième fois d'ici
longtemps.
Les parités de change entre les pays de la Communauté
européenne, même s'ils sont décrétés fixes,
ne résisteront pas à l'inégalité des pressions
inflationnistes de pays à pays.
Les ministres allemands n'ont cessé de le dire et ils ont le bon sens
pour eux : l'unité monétaire suppose l'unité
économique.
Avec l'élargissement, les perspectives d'unité
économique deviennent plus lointaines encore.
Il y aura donc, à l'intérieur de la Communauté, des
modifications des parités de change plus ou moins fréquentes,
je vois mal, dans ces conditions, comment s'affirmerait une zone
monétaire autonome.
Les résultats que l'on peut escompter, à échéance
de quelques mois ou même de quelques années, ne me paraissent
donc pas tels qu'ils permettent d'atteindre les deux autres objectifs que
Français et Européens devraient se proposer.
Si la restauration d'un système monétaire fondé
essentiellement sur l'or se révèle impossible, j'en viens
à croire que, pour mettre fin à l'étalon-dollar sans obligations
ni sanctions, la stratégie d'unité européenne ne suffit
pas.
Il faut enlever au dollar son monopole de monnaie à fonction
transnationale, donc, si l'or ne remplit plus cette fonction,
- entrer dans le jeu des droits de tirage spéciaux,
- restreindre l'arbitraire des autorités américaines en prenant
au mot leurs vagues propositions."
3. "Or ou droits de
tirages spéciaux".
Article du 30 août 1972
" La conférence au sommet de la Communauté européenne,
prévue pour octobre prochain reste en suspens.
Les visites de M. Maurice Schumann à Bonn et à Londres n'ont
pas révélé un accord suffisant sur le sujet essentiel de
l'unité économique et financière.
Il n'y a pas là motif de surprise ou d'irritation.
A moins de tout ignorer du monde, n'importe quel observateur pouvait
prévoir que, dans les discussions entre Français et Allemands
sur la question monétaire, la Grande-Bretagne se trouverait le plus
souvent aux côtés de la République
fédérale.
Le commerce britannique, de même que le commerce allemand, conserve une
vocation atlantique ou planétaire.
Le marché américain a pour nos deux principaux partenaires de
la Communauté
une tout autre importance que pour notre pays : l'un et l'autre craignent de
heurter de front le gouvernement américain.
Une fois de plus, semble-t- il, les gouvernants
français recommandent l'élévation du prix de l'or, au
moins partiellement et indirectement.
Pour le remboursement des crédits qui lui ont été
consentis, l'Italie pourrait évaluer l'or au prix du marché
libre.
Cet expédient est souhaité par les uns, rejeté par les
autres en raison de sa signification symbolique.
a) Les banques centrales
européennes ne pourraient-elles forcer la main aux Américains
en décidant de revaloriser l'or pour leurs transactions ?
Il ne semble pas que le gouvernement français ait formellement
proposé une telle mesure, que d'ailleurs Britanniques et Allemands
refuseraient à coup sûr.
Sur ce point, « la stratégie européenne » de M.
Pompidou n'a aucune chance de succès. Personnellement, aucun des
arguments que les « experts » avancent contre la
revalorisation de l'or ne me paraît convaincant.
L'or est une matière trop rare pour être soustrait à
l'industrie et stocké dans les caves, disent les uns.
Avec le système actuel, des milliards d'or sont thésaurises.
Si la monnaie doit se confondre avec une marchandise, il faut que celle-ci
soit rare.
En tout état de cause, la production d'or ne fournirait pas les
liquidités internationales dont le commerce mondial, en expansion
rapide, a besoin, disent d'autres.
C'est probable, en effet, encore que l'élévation du prix doive
contribuer à l'accroissement de la production et décourager
certains emplois.
Le jour où les dirigeants américains se convertiraient, les
mêmes experts trouveraient de multiples raisons d'approuver une
décision que je crois probable, un jour ou l'autre.
L'écart actuel entre le prix officiel et le prix du marché
libre « gèle » les stocks d'or des banques.
- Ou bien les autorités américaines interviendront sur le
marché, quitte à perdre une partie de leur stock, comme pour
manifester leur indifférence au volume de leurs réserves
métalliques ;
- ou bien elles se résigneront à porter le prix de l'once d'or
à 70 dollars.
Ni l'argument de l'effet inflationniste
ni celui du cadeau fait à l'Afrique du Sud et à l'Union
soviétique
ne les en dissuaderont à tout jamais.
Le premier argument ne vaut rien, étant donné l'importance des
balances dollars, le second n'a qu'une médiocre portée.
Qu'importent les profits de l'Afrique du Sud et de l'Union soviétique si
la communauté internationale y trouve son compte.
Cela dit, une « résignation » américaine n'est
pas pour demain.
Les pays, tel le Japon, qui n'ont pas accumulé d'or appuient
l'attitude américaine.
La « stratégie européenne » de la France,
visant à contraindre les Etats-Unis, se heurte.au refus de plusieurs
de nos partenaires, à la crainte du chaos.
Aux deux prix du marché libre et des banques centrales s'ajouterait un
troisième, celui des transactions entre banques centrales
européennes.
La pluralité des prix créerait un obstacle
supplémentaire sur la voie d'un accord d'ensemble.
Enfin — et, à mes yeux, telle est l'objection majeure — le
relèvement du prix de l'or, par lui-même, ne modifierait pas le
système monétaire international.
Il ne suffirait pas à mettre fin au règne du dollar dans celles
de ses conséquences abusives.
Même si l'or valait 70 dollars l'once, les banques centrales
garderaient une fraction importante de leurs réserves en dollars,
utiliseraient la monnaie américaine comme monnaie transnationale.
Bien plus, une fois l'éventualité d'une dévaluation du
dollar à l'égard de l'or écartée, le dollar
inspirerait plus et non moins confiance.
Dira-t-on qu'il conviendrait de consolider les balances dollars en même
temps que le prix de l'or serait relevé?
Soit : les dettes à court terme des Etats-Unis deviendraient des
dettes à long terme.
Les Etats- Unis - banquiers payeraient des taux d'intérêt sur
leurs dettes, inférieurs au taux de profit de leurs investissements au
dehors, contrepartie des balances dollars (si l'on convient d'analyser la
balance des comptes américaine comme s'il s'agissait du bilan d'un
banquier).
Admettons que les autorités américaines acceptent et
l'élévation du prix de l'or et la consolidation des balances
dollars.
Il resterait encore à obtenir l'essentiel : un système qui
n'autoriserait aucun Etat à encourir, d'année en année,
des déficits, fût-ce le pseudo-déficit résultant
de la transformation bancaire.
Après tout, les statuts de Bretton Woods prévoyaient qu'un pays dont les comptes
extérieurs sont déficitaires ne doit pas exporter de capitaux.
En d'autres termes, même après la revalorisation de l'or et la
consolidation des balances dollars, rien ne prouve que le dollar ne
continuerait pas de remplir la fonction de monnaie transnationale, avec les
inconvénients qui en résultent pour les autres :
- influence de la gestion monétaire des Etats-Unis sur les autres
économies,
- investissements au dehors non limités par les recettes en devises.
Le retour apparent au règne de l'or aboutirait rapidement à un
nouveau règne du dollar.
La substitution des droits de tirage spéciaux au dollar pourrait
créer un véritable substitut au dollar, une autre monnaie
transnationale, dont la gestion appartiendrait à un Fonds
monétaire transformé, où les pouvoirs seraient moins
inégalement répartis.
Aussi bien les autorités américaines ont-elles marqué
leur mauvaise humeur lorsque le rapport du Fonds monétaire a
esquissé une solution de ce type.
Je ne méconnais nullement les difficultés et les risques d'une
monnaie transnationale créée par décision d'un
collège représentatif de la communauté internationale.
La monnaie, pensent les sceptiques, est affaire trop sérieuse pour
être confiée aux gouvernements.
L'or ou toute autre monnaie-marchandise a été inventé
par le génie inconscient des peuples comme protection contre
l'arbitraire des princes.
Il se peut, mais cette protection, toujours imparfaite, ne s'exerce plus du
tout à l'intérieur des Etats.
La valeur de la monnaie dépend de la politique d'ensemble du
crédit et du budget et l'inflation s'ensuit.
La disparition ou la quasi-disparition de la monnaie-marchandise, dans les
relations internationales, favorise l'inflation.
b) Lequel des deux
systèmes serait le plus inflationniste,
- celui du dollar ou
- celui des droits de tirages
spéciaux ?
La réponse ne me paraît pas évidente.
Je crains malheureusement qu'il n'y en ait pas de troisième."
4. Les droits de tirages
spéciaux (D.T.S.)
A défaut de souligner les erreurs d'analyse de Aron, donnons la parole
à Jacques Rueff et rappelons l'opinion qu'il avait sur les droits de
tirages spéciaux.
Dans « Le péché
monétaire de l'Occident », il y voit :
"Du néant habillé en monnaie.
Aux termes du communiqué de Londres, les droits de tirages
spéciaux constitueront « une nouvelle facilité
destinée à compléter, dans la mesure où le besoin
s'en manifestera, les avoirs de réserve existants».
Or le détournement de la production d'or des réserves
monétaires vers celles de la thésaurisation, ainsi que le
désembrayage de la régulation des extractions par les
variations du niveau général des prix feront à coup
sûr naître la nécessité de « compléter
les avoirs existants ».
Bien plus : les symptômes de ralentissement économique, qui sont
apparus dans le monde depuis que nombre de pays n'acceptent plus qu'avec
réticence l'augmentation de leurs balances-dollars, marquent que la
nécessité de compléter les avoirs existants se manifeste
actuellement sous nos yeux.
Les champions du maintien du prix de l'or à son niveau de 1934 auraient
mauvaise grâce à s'attendrir sur les souffrances que
provoquerait une éventuelle aggravation de la récession. Leurs
jérémiades seraient pareilles à celles d'un parricide
qui demanderait la pitié parce qu'il serait orphelin.
Si, contre tout bon sens, la situation présente se prolonge — je
veux dire l'immobilisation du prix de l'or — la création de
liquidités nouvelles deviendra sûrement nécessaire. Les
Américains auraient même souhaité, laisse-t-on entendre,
que le principe d'une création annuelle de 1 à 2 milliards de
dollars supplémentaires fût dès maintenant accepté.
« Il n'y a pas, explique une haute personnalité
américaine, d'instrument plus pratique, plus souple... qu'une
unité de change abstraite. Il ne s'agit, ajoute la même voix,
que de transposer sur le plan international le système en vigueur
partout pour les transactions intérieures ».
Souple, elle le sera certainement. Craignons seulement qu'à l'image
des monnaies inconvertibles — dont le monde a hélas ! une longue
expérience — elle le soit trop. Y a-t-il des raisons de penser
que le collège des hautes autorités du Fonds Monétaire
International s'avère plus savant, plus raisonnable, plus
indépendant et plus conscient que ne l'ont été si souvent
dans le passé les autorités monétaires nationales.
Quant à l'assimilation des « droits de tirage spéciaux
» aux monnaies nationales, elle est fallacieuse.
Sauf inflation caractérisée, les monnaies nationales ont pour
contrepartie, dans les actifs de l'institution émettrice, de l'or, des
effets de commerce, des warrants, des promesses de paiement émanant de
débiteurs solvables ou des bons du Trésor représentatifs
de recettes publiques ultérieures.
Les droits de tirage spéciaux ne seront, nonobstant une clause de
remboursement très partielle, que du néant habillé en
monnaie.
S'ils sont créés pour des montants importants, ils ne pourront
pas ne pas conduire à une inconvertibilité monétaire
totale. Ainsi prolongeant, sous une forme nouvelle, la politique maintenant
usée des balances-dollar, ils ouvriront la porte à une
inflation continue."
Et dans un article antérieur intitulé "Ce qui doit arriver
arrive" - sur quoi Aron a eu l'occasion de faire de l'humour... -, paru
dans le quotidien Le Monde
des 4, 5 et 6 juin 1969, réédité dans Le Péché...,
Rueff avait écrit sur le même sujet des D.T.S.:
"Si l'on veut parer aux graves dangers qu'implique, pour la
prospérité de l'Occident, la hausse exorbitante des taux
d'intérêt, il n'est d'autre solution que de parer à la
cause qui la provoque.
L'article précédent a montré que cette cause se trouvait
tout entière dans la désaffection des détenteurs de
capitaux à l'égard des investissements libellés en
monnaie, tels que prêts à court, moyen et long terme, tels
encore que prêts obligataires.
A ces formes d'investissements en monnaie, ils préfèrent
l'acquisition de biens réels, or, terres, maisons, actions, tableaux
ou oeuvres d'art, ayant, du fait de leur
rareté et de la demande dont ils sont l'objet, une valeur
intrinsèque.
La préférence donnée aux biens réels relativement
aux avoirs définis en monnaie, procède du sentiment que la
dépréciation des unités monétaires,
rattachées toutes, en fait ou en droit, au dollar, est rendue
probable, sinon certaine, par la dégradation progressive de la
solvabilité des deux monnaies de réserve, le dollar et la livre
sterling, ainsi que par l'inflation qui règne dans nombre de pays de
la collectivité occidentale.
Si on veut écarter les sombres nuages qui bouchent notre horizon
économique, il n'est d'autre solution que de rendre rapidement une
solvabilité internationale non discutable à ces deux monnaies
de réserve, et en outre d'éliminer les foyers d'inflation
résultant de politiques de crédit trop libérales ou de
circonstances particulières, telles celles qui ont régné
en France après les événements de mai-juin 1968.
Rétablir la solvabilité internationale du dollar et de la livre
sterling, c'est créer la certitude que les Etats-Unis et l'Angleterre
pourront faire face sans limite à toute demande de remboursement de
balances-dollar et sterling ou d'autres créances exigibles
libellées en ces monnaies.
A cette fin, deux familles de méthodes ont été
proposées :
- celles qui sont fondées sur la création ex nihilo de ressources
monétaires nouvelles, et
- celles qui impliquent une hausse du prix de l'or.
Ce sont les solutions du premier type qui seront examinées dans le
présent article.
Elles ont été formulées dans divers « plans
», dont le plan Triffin est le plus ancien,
mais dont le plan de droits de tirage spéciaux, actuellement soumis
à la ratification des pays membres de la collectivité
monétaire occidentale, est la forme la plus élaborée.
Ces projets ont un trait commun : ils prévoient la création.
par des méthodes diverses, d'une monnaie internationale nouvelle, qui
est définie en or mais qui n'est pas remboursable en or.
Cette monnaie sera émise dans des limites définies et pourra
être utilisée par les débiteurs en paiement des
déficits de leur balance des paiements.
Il y aura ainsi substitution d'un nouvel instrument monétaire,
définitivement inconvertible en or, aux créances dont les
titulaires demandaient la conversion.
a) Une monnaie qui n'est pas
« gagnée ».
Les modalités de l'émission diffèrent d'un plan à
l'autre. J'examinerai ici plus spécialement celles que prévoit
le plan de droits de tirage spéciaux.
Aux termes de ce projet, chacun des Etats participants recevra chaque
année une allocation de droits de tirage spéciaux.
A concurrence de cette allocation, il pourra demander au Fonds
Monétaire International la délivrance des monnaies dont il aura
besoin pour le règlement de ses déficits de balance des
paiements ou des monnaies propres à les procurer.
L'Etat qui aura demandé au Fonds Monétaire International des
monnaies de règlement verra réduire, à due concurrence,
le montant des droits de tirage inscrits à son crédit dans
cette institution.
Inversement, l'Etat qui aura fourni les contingents de monnaie ainsi
utilisés bénéficiera d'une augmentation, à due
concurrence, de sa provision de droits de tirage spéciaux au Fonds
Monétaire International.
Du fait de cette transaction, il y aura réduction de la réserve
de moyens de paiement internationaux du débiteur et augmentation de
celle du créancier. En apparence, tout se passera comme si le
règlement avait été accompli par transfert d'or. Les
droits de tirage spéciaux sembleront véritablement de 1'
« or-papier ».
Mais il n'y a là que pure apparence.
En réalité, les différences sont profondes entre le
paiement en or et le paiement en droits de tirage spéciaux.
— L'or est produit par extraction du sol ou obtenu par excédent
de la balance des paiements. Dans les deux cas, il est la contre-valeur d'un
effort de production de la collectivité qui en
bénéficie.
Au contraire, les droits de tirage spéciaux sont créés
de toutes pièces par une décision discrétionnaire du
Fonds Monétaire International.
— On dira que cette distribution ne sera pas inéquitable, car
elle profitera également à tous les Etats
bénéficiaires, au prorata de leur quote-part au Fonds
Monétaire International.
Mais l'égalité ici ne sera que formelle.
La faculté d'utiliser des droits de tirage spéciaux à
des achats à l'étranger sera réservée aux Etats
dont la balance des paiements sera en déficit. Pour les autres, tant
qu'ils n'auront pas atteint le bienheureux état de pays
déficitaire, les droits de tirage spéciaux seront sans objet,
même si leurs détenteurs prétendaient acheter de l'or
destiné à leurs industries ou modifier la composition de leurs
réserves.
Ainsi se révèle la principale différence entre l'or et
les droits de tirage spéciaux. Le premier est un pouvoir d'achat
inconditionnel, soumis à la seule souveraineté de son
détenteur. Le second est une faculté conditionnelle d'achat
à l'étranger, soumise à l'appréciation
discrétionnaire, donc politique, de l'organisation émettrice.
Selon le plan en cours de ratification, le montant des droits de tirage
spéciaux créés annuellement doit être fixé
en une seule fois, pour une période de cinq ans, chaque Etat recevant
une allocation proportionnelle au montant de sa quote-part au Fonds
Monétaire International.
Ainsi, l'or est « gagné », alors que les droits de tirage
spéciaux sont « alloués ».
On mesure la portée de cette différence en observant les
conséquences qu'elle entraîne pour un pays dont la
réserve d'or et de devises est tombée au niveau au-dessous
duquel il estime impossible de la laisser descendre.
En régime d'étalon-or, il est devant une alternative simple :
- cesser ses paiements à l'étranger ou
- acquérir les moyens de paiements internationaux qui lui font
défaut.
S'il choisit cette dernière solution, il lui faut ou produire de l'or
ou mettre en excédent sa balance des paiements.
Dans les deux cas, c'est contre des biens réels, c'est-à-dire
par renonciation à la consommation interne de vraies richesses, qu'il
obtient les moyens de paiement étrangers qui lui font défaut.
Le « pouvoir d'achat étranger » qu'il obtient est
strictement limité au montant du sacrifice de consommation interne
qu'il consent. Aucune habileté, aucune pression politique ne permettent
de dépasser ce montant.
Au contraire, en régime de droits de tirage spéciaux, la
restauration de la faculté d'achat à l'étranger n'est
due qu'à un cadeau gratuit résultant, sans sacrifice d'aucune
sorte de la part du pays qui le reçoit, d'une décision
discrétionnaire de la collectivité qui contrôle la
création des droits de tirage spéciaux, c'est-à-dire,
suivant le projet discuté, du Fonds Monétaire International.
Le critère qui fait dépendre l'ouverture du droit à
attribution de la constatation d'un déficit des paiements
extérieurs apparaît comme particulièrement dangereux
lorsque sont observées la difficulté et l'incertitude de la
détermination du solde d'une balance des paiements, qui varie dans de
larges proportions, ainsi que le montrent les statistiques officielles des
Etats-Unis, avec la méthode choisie pour le calculer.
— Pour le pays créditeur, la différence entre or et
droits de tirage spéciaux n'est pas moindre.
Lorsqu'il reçoit de l'or, il opère un échange entre les
biens qu'il a cédés au pays créancier et l'or remis par
celui-ci.
Lorsqu'il reçoit des droits de tirage spéciaux, il remet de la
monnaie nationale, c'est-à-dire des moyens d'acheter à
l'intérieur de ses propres frontières, en échange d'un
actif créé de toutes pièces, qui ne lui vaudra pouvoir
d'achat que lorsque sa balance des paiements sera devenue déficitaire.
Autrement dit, il donne à l'Etat débiteur faculté
d'opérer un prélèvement sur sa production nationale en
échange d'un simple espoir de pouvoir un jour, si le Fonds
Monétaire International le lui permet et s'il a su se mettre en
déficit, acheter des biens à l'étranger.
La monnaie créée en faveur du débiteur viendra majorer
de son montant la circulation monétaire du pays créancier et
pourra, un jour, lui imposer l'aventure néfaste de mesures de
restriction monétaire ou même d'un « plan de stabilisation
».
b) Le privilège des
Etats-Unis.
L'observation qui précède prend tout son sens si l'on observe
que le projet de traité prévoit qu'un Etat « pourra
utiliser des droits de tirage spéciaux pour éviter une
variation de ses réserves brutes ».
Cette phrase sibylline a un sens très précis. Elle signifie que
les Etats-Unis auront la possibilité d'utiliser leurs droits de tirage
spéciaux pour faire face à une demande de conversion de
balances- dollar, même si leur balance des paiements, au sens usuel du
mot, n'est pas en déficit.
En acceptant cette clause, les pays créditeurs ont pris à leur
charge le remboursement en leur propre monnaie des balances-dollar quand ce
remboursement sera demandé.
Lorsque l'on sait les précautions qui interviennent dans chaque pays
pour le contrôle, notamment par voie parlementaire, des engagements de
paiement, on demeure confondu de la légèreté avec
laquelle ce transfert de charge réelle du débiteur au
créancier a été consenti.
L'attribution de droits de tirage spéciaux ne se fera
évidemment, chaque année, que dans le cadre du maximum
autorisé par les autorités du Fonds Monétaire
International. Ce montant doit être fixé pour une période
de cinq ans.
En 1967, le gouvernement des Etats-Unis estimait qu'il faudrait créer
l'équivalent de 5 à 10 milliards de dollars en cinq ans.
[…] "
Soit dit en passant, l'"euro" est du "néant
habillé en monnaie"...
5. "La monnaie et le
commerce".
Retour à Raymond Aron : article du 31 août 1972
"En août 1971, le président Nixon avait imposé une
taxe de 10 % sur les importations à l'entrée des Etats-Unis,
mais il la supprima une fois obtenue la dévaluation du dollar par
rapport à l'ensemble des monnaies étrangères [cf. annexe ci-dessous].
Cette taxe pouvait donc passer pour un simple moyen de contraindre Japonais,
Allemands et Français à se résigner à la
réévaluation de leur monnaie par rapport au dollar.
Elle annonçait, cependant, l'attitude actuelle des autorités
américaines :
- la mise en relation de la monnaie et du commerce,
- l'exigence de concessions commerciales
avant un retour à la convertibilité du dollar et à la
restauration d'un système autre que celui d'aujourd'hui, à
savoir celui que j'appelle « l'étalon-dollar sans obligation ni
sanction ».
Les discussions entre Américains et Européens, on peut le
prévoir sans risque d'erreur, ne manqueront- pas d'âpreté
et elles risqueront bien souvent de conduire à une guerre commerciale.
Les autorités de Washington nourrissent à l'égard de la
communauté européenne trois griefs principaux :
- la politique agricole commune,
- les accords avec les anciens membres de la petite zone de
libre-échange avec les pays méditerranéens et les pays
africains, francophones et, demain, anglophones,
- enfin, les restrictions aux exportations japonaises, qui, de ce fait,
inondent le marché américain.
A quoi les porte-parole de la Communauté répondent que les
Etats-Unis ont, en permanence, une balance commerciale excédentaire
avec l'Europe, qu'ils y ont accru leurs ventes de produits agricoles depuis
la formation du Marché commun.
Les accords préférentiels avec les pays
méditerranéens ou africains n'ont que des effets
dérisoires sur les ventes américaines.
L'absorption des anciens membres de la zone de libre
échange dans la nouvelle zone qui entourera le Marché
commun répond à une nécessité évidente et,
là encore, les Etats-Unis n'ont guère le droit de
réclamer de compensations, tant que les « détournements
d'échanges » restent à démontrer.
Enfin, si les Européens se protègent contre les marchandises made in Japan,
les Etats-Unis le font aussi, les représentants des industries ou des
ministères japonais acceptant des limitations « volontaires
».
Je ne juge ni convenable ni utile de porter un jugement catégorique
sur les arguments des uns et des autres : il faudrait des études
détaillées dont les résultats, de toute manière,
prêteraient à des contestations indéfinies.
Que la politique agricole commune diminue les débouchés de
certains produits américains dans les pays tiers, il se peut, puisque
les excédents agricoles du Marché commun sont exportés
grâce à des subventions financées par le
prélèvement « variable » aux frontières.
Que les autorités américaines n'aiment ni la politique agricole
commune ni les accords préférentiels, chacun le comprend.
Les dirigeants américains, moins sensibles aux avantages politiques de
l'unité européenne, deviennent d'autant plus sensibles aux
inconvénients économiques.
Encore ont-ils une tendance fâcheuse à oublier que l'expansion
économique, favorisée, sinon provoquée, par la
disparition des frontières entre les Six ou les Dix, offre à
leurs marchandises et à leurs capitaux des chances nouvelles, qu'ils
ont d'ailleurs saisies.
Ce qui est vrai, c'est que deux questions sérieuses se posent, l'une
de fait, l'autre de principe.
Les exportations japonaises sont ressenties comme une menace aussi bien par
les Américains que par les Européens, d'autant plus que le
marché japonais ne s'ouvre que lentement aux capitaux étrangers
et que de multiples pratiques, souvent spontanées et non
commandées par l'Etat, élèvent des obstacles plus
difficiles à surmonter que les droits de douane ou même les
contingents aux marchandises étrangères.
S'il s'agit de réduire le déficit commercial des Etats-Unis
à l'égard du Japon (quelque 3 milliards de dollars), la mise en
accusation des Européens ne facilitera pas une discussion
déjà complexe, en dehors de toute passion.
Le problème de principe, c'est la clause de la nation la plus
favorisée.
A cette clause tant d'exceptions ont été admises par les uns et
par les autres qu'elle ne constitue peut-être plus le fondement de la
législation effective.
La négociation d'autres règlements prendrait des années,
la négociation dans le cadre des règlements officiels laisse
une large part à l'arbitraire ou, si l'on préfère,
à l'interprétation politique.
Quelle que soit la validité que l'on reconnaisse à telle ou
telle des revendications américaines, sur deux points les
Européens possèdent un bon dossier.
La création d'une entité économique européenne
suppose une différenciation entre les membres et les non-membres, donc
des droits de douane aux frontières de la Communauté.
Le niveau moyen de ces droits est faible et, la Communauté a
montré son libéralisme en négociant le Kennedy Round,
c'est-à-dire en réduisant le tarif extérieur commun.
L'élargissement de la Communauté, à moins qu'il ne
déchaîne une guerre commerciale, n'empêchera nullement,
bien au contraire, l'expansion du commerce international.
Plus important encore me paraît le deuxième point.
Les autorités américaines revendiquent le droit à une
balance commerciale excédentaire afin de financer le transfert de
capitaux au dehors et leur politique étrangère.
Or, les investissements américains au dehors rapportent, à
l'heure présente, 11 à 12 milliards de dollars.
En tenant compte des intérêts sur les dettes, le bilan net des
revenus des capitaux demeure créditeur de plusieurs milliards de
dollars (5 milliards environ).
Quand la Grande-Bretagne et la France jouaient les banquiers du monde, elles
avaient toutes deux, à la fin du siècle dernier et au
début de celui-ci, un déficit commercial.
Le déficit commercial des Etats-Unis, le premier depuis le
début du siècle, frappe l'opinion.
Les dirigeants ne pourraient-ils expliquer que ce déficit n'a rien
d'anormal ?
Pourquoi un pays créancier du monde devrait-il vendre au dehors plus
qu'il n'achète ?
De qui les Etats-Unis ont-ils reçu le droit d'investir
indéfiniment des capitaux à l'étranger ?
S'il s'agit d'aider au développement des pays pauvres, il suffira
d'accorder à ceux-ci, chaque année, une fraction des droits de
tirage spéciaux.
En bref, la confusion entre l'équilibre des comptes extérieurs
des Etats-Unis et l'excédent commercial, les négociateurs
européens doivent la dissiper, afin d'éviter un malentendu
fondamental sur le but à atteindre/.
Trois annexes de Raymond
Aron.
a) Annexe 1
: "Expédient
provisoire".
Article du 16 décembre 1971
Connally avait proposé, à Rome, une
dévaluation du dollar.
Il avait même embarrassé ses interlocuteurs européens en
suggérant un taux de 10%.
En annonçant, aux Açores, une dévaluation prochaine de
la monnaie américaine, M. Nixon a donné un caractère
officiel à une offre ou à une décision universellement
connue.
Les journalistes qui se répandent en propos lyriques sur la «
victoire de la diplomatie française et sur la chute de Sa
Majesté Dollar témoignent d'une naïveté
nationaliste et affligeante.
Les gouvernants français insistaient depuis le début de la
crise sur la nécessité de cette dévaluation : en quoi
ils avaient raison, mais ils ne se faisaient aucune illusion sur la
portée de cette mesure.
Pour l'essentiel, pour les échanges commerciaux en particulier,
dévaluation du dollar ou réévaluation du franc
entraîne exactement les mêmes conséquences.
Depuis le mois d'août dernier la monnaie française (au moins le
franc commercial) était liée au dollar de telle manière
que seule non appréciée par rapport au cours officiel de la
monnaie américaine, elle se trouvait dépréciée
par rapport aux monnaies de nos partenaires européens.
Cette politique systématique de dévaluation, que j'ai maintes
fois mentionnée, il se peut que M. Pompidou en ait reconnu les
inconvénients et qu'il ait finalement souhaité la
dévaluation du dollar afin de limiter la dévaluation du franc
par rapport au mark.
Ce dernier sera cependant réévalué par rapport au
dollar, au-delà de la dévaluation du dollar, ce qui laissera
finalement le franc commercial français quelque peu
dévalué par rapport au yen et au mark. Cet arrangement, dont
j'avais dessiné les grandes lignes dès avant la rencontre de
Rome, ne mérite pas que l'on illumine à Washington ou à
Paris.
En contrepartie d'une dévaluation qu'ils appelaient de leurs voeux (en tant qu'hommes d'affaires, les
négociateurs américains se soucient davantage des
parités de change que de la méthode, dévaluation ou
réévaluation, suivie pour les obtenir), les Américains
ont reçu la promesse d'une ouverture de négociations
commerciales avec le Marché commun.
M. Pompidou a retiré le veto maintenu par M. Schumann la semaine
dernière. De plus, rien ne semble avoir été
décidé en ce qui concerne les deux points essentiels du
débat, taxe de 10 % sur les importations aux frontières des
Etats-Unis, convertibilité du dollar.
A fortiori, rien
ne figure dans le communiqué sur le sujet dés milliards de
dollars à l'extérieur des Etats-Unis. Tout se passe comme si
l'on faisait le pari que l'élargissement des marges de fluctuation
permettra d'assurer la fixité des nouvelles parités, sans
crise, sans absorption de dollars excédentaires par les banques
centrales.
Je ne critique nullement l'accord conclu. M. Pompidou a raison de limiter la
dévaluation du franc par rapport au mark, il a raison d'accepter
l'ouverture de négociations commerciales ayant que les
Américains aient accepté les concessions essentielles.
Qu'on le veuille ou non, la menace de dépression pèse plus
lourdement sur l'Europe que sur les Etats-Unis et la majorité des
gouvernants ou des hommes d'affaires, de ce côté de
l'Atlantique, voient dans les désordres monétaires la cause
majeure du péril commun.
La conjoncture imposait à M. Pompidou qui, selon l'expression
consacrée, avait pris « les positions les plus dures »,
d'apporter lui aussi sa contribution à ce que les commentateurs
appellent un accord partiel.
II a, en effet, consenti à traiter isolément la question des
parités et à reporter à des temps meilleurs la question
de la convertibilité et de la taxe de 10 %, ce qui répond
exactement aux thèses américaines (à moins, encore une
fois, que des engagements secrets n'aient été pris).
En contrepartie, le président français a obtenu un
succès de prestige qui comble d'aise certains journalistes officiels :
c'est au président français que le président
américain a réservé la communication publique d'une dévaluation
dont personne ne doutait plus depuis des semaines.
Le président Nixon n'a pas eu tort de penser que l'opinion
française serait plus s e n s i b l e aux apparences qu'aux
réalités, en particulier sur le sujet ésotérîque
du système monétaire. Jusqu'à présent, les
négociateurs français disaient non aux négociations
commerciales " le couteau sur la gorge ".
Aux Açores, ils ont dit oui, et, à s'en tenir au
communiqué, les Américains n'ont eu d'autre prix à payer
que la révélation d'un secret de Polichinelle.
M. Nixon a toujours passé pour un bon joueur de poker.
b) Annexe 2: "Fin du premier acte".
Article du 20 décembre 1971
"La monnaie américaine n'est pas une monnaie comme les autres :
pour employer une expression célèbre de George Orwell, elle est
plus égale que les autres.
Non pas nécessairement par la volonté des hommes, mais par la
nature des choses.
Au mois d'août dernier, il y avait eu surabondance d'offre de dollars
sur les marchés au taux officiel et insuffisance de demandes.
Pour maintenir la parité, il aurait fallu que les banques centrales
étrangères fussent disposées à accumuler
indéfiniment des dollars.
Depuis le mois de mai, la Banque centrale de la République
fédérale s'y refusait, il ne restait d'autre recours que la
dévaluation du dollar.
Mais on ne dévalue pas le dollar comme on dévalue le franc ou
même la livre. Dans le système monétaire d'hier et
peut-être de demain, le dollar, en tant que monnaie de
l'économie la plus puissante du monde, tient une place hors du commun.
Toutes les parités monétaires étaient remises en
question le jour où la valeur du dollar devenait objet de
spéculation (aux deux sens de ce mot). Les dirigeants des pays
industriels se plaignaient à juste titre des déficits de la
balance des comptes des Etats-Unis ; ils envisageaient aussi avec inquiétude
les conséquences d'une modification des parités
monétaires.
Si la revalorisation d'une monnaie réduit le coût des
importations, elle accroît celui des exportations, elle risque donc de
freiner ces dernières et, en période de récession,
d'accroître le chômage.
Du jour où les Américains se résignaient à
dévaluer leur monnaie par rapport aux autres, les positions se
renversaient
Ils avaient un intérêt apparent à un taux
élevé et les Japonais ou les Européens à un taux
aussi faible que possible.
De plus, les pourcentages d'appréciation des diverses monnaies par
rapport au dollar ne pouvaient pas être les mêmes.
Les discussions portaient donc sur deux questions :
- la dévaluation du dollar serait elle
obtenue par une modification de la définition en or du dollar ou par
une revalorisation des autres monnaies ?
- Quelles parités nouvelles s'établiraient entre les diverses
monnaies ?
A Rome, puis aux Açores, les Américains avaient
accédé à la demande française et
européenne d'une dévaluation du dollar par rapport à
l'or.
Il s'agissait donc, pour les Français et les Européens, non
d'obtenir cette dévaluation mais de la limiter, puisque M. Connally avait proposé 10 %, taux que M. Giscard
d'Estaing et son collègue italien ne voulaient pas accepter.
D'un autre côté, la revalorisation du mark flottant par rapport
au franc commercial dépassait 10 %, ce qui excédait le
pourcentage tolérable.
Le compromis de Washington donne aux négociateurs américains
à peu de chose près ce qu'ils souhaitaient en fait de
parité monétaire.
Il n'en résulte pas que les Européens aient subi une
défaite, pas plus qu'aux Açores il n'y avait eu victoire
française et défaite américaine.
Si l'on admet que les parités des monnaies européennes et
japonaise avaient été mal calculées en 1949, ou qu'elles
étaient devenues irréalistes — ce qui paraît peu
contestable — les Américains n'avaient pas tort de
réclamer les modifications des parités monétaires.
La surcharge de 10 % leur donnait un moyen de pression utile sinon
indispensable.
Le réalignement de décembre 1971 semble donc bien une des
conditions nécessaires à une réorganisation du système
monétaire international."
c) Annexe 3 : "D'un extrême à
l'autre".
Article du 28 janvier 1972
"Pendant des années, les économistes d'outre-Atlantique,
les conseillers du président nous répétaient
infatigablement : « Le dollar est aussi bon que l'or ! »
Les uns arguaient que la valeur de l'or se fondait sur celle du dollar, les
autres que la puissance industrielle des Etats-Unis garantissait la valeur du
dollar mieux que la superstition séculaire — celle de la relique
barbare.
Ces propos tendaient à justifier le refus de modifier le prix de l'or
ou la parité du dollar par rapport à l'or, comme on voudra
dire.
Depuis août 1971, tout est changé et, avec l'étrange
mobilité, caractéristique de l'opinion américaine
(experts inclus), la dévaluation de la monnaie américaine,
naguère inconcevable, est devenue une mesure technique, conforme
à la décence et aux bonnes moeurs,
qui ne touche ni à la respectabilité ni au prestige de la
République américaine.
Pourquoi cette conversion
?
Avant tout à cause du déficit de la balance commerciale qui
paraît d'autant plus scandaleux que l'excédent des ventes
au-dehors sur les achats passait pour acquis une fois pour toutes, constant
depuis le début du siècle.
Dès lors que les Etats-Unis importent plus qu'ils n'exportent, il faut
bien qu'il y ait « quelque chose de pourri dans le royaume du
Danemark » :
- surévaluation de la monnaie américaine et
- pratiques illégitimes des autres pays.
Le rétablissement de l'excédent commercial étant promu
au rang d'objectif prioritaire, les taux de change perdent toute
signification autre qu'économique.
La dévaluation du dollar par rapport au mark ou au franc
français n'entraîne aucune humiliation, elle n'équivaut
pas à une défaite, elle ne témoigne plus d'un
affaiblissement relatif : elle contribue à rétablir un ordre
perturbé.
Bien plus, c'est moins le dollar qui est dévalué que les autres
monnaies qui sont réévaluées et qui abandonnent les
avantages exorbitants d'un taux de change irréaliste.
Avec répugnance, on finit par consentir à une
dévaluation du dollar par rapport à l'or.
Mais cette répugnance tient moins au refus de prononcer le mot de
dévaluation qu'à l'hostilité persistante à
l'égard du métal précieux.
L'accord de Washington est essentiellement précaire:
- il laisse en suspens le problème de la convertibilité du
dollar au Fonds monétaire ;
- il ne garantit pas que la prétendue parité de la monnaie
américaine sera en cas de besoin défendue par les autorités
de Washington.
Il consacre donc à mon sens pour la phase prochaine plutôt la
flexibilité que la fixité des taux de change.
Les marges acceptées de fluctuation indiquent déjà une
distance par rapport à la conception de Bretton-Woods.
La façon de penser des Américains et la sagesse conventionnelle
ont changé du tout au tout.
Peut-être le but lui-même n'a-t-il pas changé.
Au cours des quinze dernières années, les Etats-Unis
continuaient à exporter des capitaux à long terme, en
dépit du déficit de leur balance des paiements, les banques
centrales étrangères accumulant des créances en dollars
à court terme.
Les banques centrales ont finalement refusé une accumulation
supplémentaire.
Du coup, les dirigeants américains, consciemment ou non, ont cherché
un autre moyen : pour continuer à investir au-dehors, il faut un
excédent commercial.
D'où les calculs fantaisistes, sous leur rigueur apparente, de la
dévaluation nécessaire pour provoquer un renversement de onze
milliards de dollars dans le solde des mouvements de marchandises.
Si la dévaluation actuelle ne suffit pas, qu'on ne s'y trompe pas. il
pourrait y en avoir d'autres : il n'y a que le premier pas qui coûte !
"
Georges Lane
Principes
de science économique
Georges
Lane enseigne
l’économie à l’Université de Paris-Dauphine.
Il a collaboré avec Jacques Rueff, est un membre du séminaire
J. B. Say que dirige Pascal Salin, et figure parmi les très
rares intellectuels libéraux authentiques en France.
Publié
avec l’aimable autorisation de Georges Lane.
Tous droits réservés par l’auteur
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