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Economie et écologie : un même combat

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Chroniques en liberté
Published : June 30th, 2008
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Category : Editorials


A mon sens, écologie et économie, cela devrait être le même combat. Si l’on tend à opposer ces deux notions, c’est au nom d’une conception déformée de la science économique et d’une récupération outrageusement politique de l’écologie.
La définition stricte de la science économique est à ce propos sans équivoque: l’économie, c'est la « gestion des ressources rares ». L’économie, c’est donc une « écologie sociale » ; c’est l’écologie de la société dans le sens où les phénomènes économiques et sociaux obéissent aussi à une sorte d’écosystème complexe et fragile qu’il est dangereux de déséquilibrer au nom d'une vision mécanique de l'économie sur laquelle se fondent la plupart des modèles macroéconomiques.
L’économie, c’est donc l’art de gérer la rareté. La première des raretés, qui détermine toutes les autres et nous oblige à faire des choix, c’est le temps. Chaque être humain est doté d’un capital temps limité, et son intelligence le poussera à en faire le meilleur usage possible, étant entendu que le temps perdu se rattrape difficilement. L'homme est donc poussé par une recherche naturelle de l'efficacité (productivité du travail): comment rendre le travail plus productif (et moins pénible) afin d'économiser notre temps consacré au travail ? Toute l’évolution technologique est orientée en ce sens.

La deuxième rareté: ce sont les contraintes naturelles. J’emploie à dessein le terme de « contrainte » plutôt que de « ressource ». En effet, on s’effraie aujourd’hui à propos de l’épuisement des réserves de pétrole comme l’on craignait au XIX° siècle de manquer de charbon. A l’époque où Rockefeller entrevoit le potentiel économique du pétrole, cette matière était considérée comme un « déchet naturel ». A l’état brut, le pétrole n’avait aucune valeur. Aujourd’hui encore, ce sont tous les dérivés du pétrole qui ont une valeur économique. Pour l’instant, compte tenu de l’état de la technologie, les carburants sont issus du pétrole mais ce n’est pas une donnée immuable comme le montre le développement des biocarburants.
Autrement dit, c’est la valeur ajoutée (et le terme « ajoutée » est fondamental : ajoutée par le travail humain, l’unique ressource rare) qui confère une valeur aux matières brutes.
De déchet naturel, le pétrole est devenu « or noir » à partir du moment où un innovateur quelque part en Europe a déposé un brevet sur le moteur à explosion. Et l’on dépose chaque jour des milliers de brevets dans le monde notamment sous l’effet de la compétition économique.

C'est bien le rôle de l'innovation technologique que de chercher à économiser le facteur qui est le plus cher. L’enjeu actuel est de faire en sorte que l’activité humaine consomme de moins en moins de ressources naturelles et de facteurs environnementaux. Il faut donc encourager les innovations impulsées par les signaux du marché. Car lorsque les processus de marché fonctionnent bien (ou ne sont pas empêchés de fonctionner), la rareté se traduit par un prix élevé en vertu du principe élémentaire « tout ce qui est rare est cher ». En économisant le facteur le plus coûteux, l’entreprise économise du même coup la matière la plus rare, celle qu’il s’agit précisément de préserver. C’est pour cela qu’elle innove.
Pour que ce mécanisme économique élémentaire fonctionne, il faut donc accepter de mettre un prix aux choses, et notamment à la nature. Car les gaspillages - et les pillages - commencent précisément à partir du moment où l'on neutralise les phénomènes économiques, en faisant croire que certaines ressources sont gratuites comme si elles existaient en quantités illimitées.
On dit que l'éléphant est menacé à cause de la valeur commerciale de l’ivoire. Pourtant la vache n’est pas menacée à cause de la valeur commerciale du lait ou de sa viande pas plus que le poulet n’est en voie de disparition à cause de la valeur commerciale des œufs ou de sa viande. Le problème n’est pas la valeur commerciale en soi ; le problème n’est pas l’activité marchande en soi ; le problème réside dans la définition des droits de propriété [1]. Le rôle de l’Etat est de mettre en place les institutions qui permettent de définir, garantir et protéger les droits de propriété, non de s’échiner à rendre tout gratuit.

On affirme aussi que la biodiversité est menacée à cause de l’activité humaine. Mais ce n’est considérer qu’une partie du phénomène. L’activité agricole a aussi contribué à accroître la biodiversité. Parmi les espèces de fruits et de légumes que nous consommons chaque jour, très peu existait à l’état naturel. L’homme est à l’origine de la création de nouvelles espèces. Il est donc plus exact de dire que l’activité humaine transforme la nature ; et que cette transformation entraîne l’épuisement de certaines ressources, le renouvellement d’autres ressources mais qu’elle permet aussi de créer de nouvelles richesses. C’est absolument inévitable. C’était déjà vrai à l’ère du néolithique où survivaient tant bien que mal quelques milliers d’individus ; c’est a fortiori vrai aujourd’hui alors que vivent plus de 6 milliards d’individus sur la planète.

La biodiversité naturelle n’est pas toujours une bonne chose pour l’être humain. Le virus de la peste, de la malaria et tant d’autres cadeaux empoisonnés de la nature font partie de la biodiversité que l’homme s’est acharné à éradiquer. Et il est heureux que ces créatures soient menacées de disparition car leur développement constituait une menace pour l’homme lui-même. Dans le discours écologique primaire, il y l’idée communément admise que la protection de la nature s’impose comme une évidence et que l’homme est un animal nuisible qui constitue une menace pour la nature.
L’homme existe avec la nature mais mène aussi un combat permanent contre la nature. Dans certains cas, au nom de la protection de l’homme, c’est la nature elle-même qui constitue une menace. Dans ce combat ancestral contre les risques naturels, la science (c’est la capacité humaine unique à produire de la connaissance) constitue le meilleur allié pour l’homme.





Jean Louis Caccomo

Chroniques en Liberté


Jean Louis Caccomo est Docteur en sciences économiques de l'université d'Aix-Marseille II et maître de conférences à l'université de Perpignan. Il intervient comme expert international dans de nombreux programmes de coopération (Maroc, Algérie, Ukraine, Thaïlande, Mexique, Syrie, Comores, Chine, Canada, USA).



Les vues présentées par Jean Louis Caccomo sont les siennes et peuvent évoluer sans qu’il soit nécessaire de faire une mise à jour.   Les articles présentés ne constituent en rien une invitation à réaliser un quelconque investissement.  L’auteur, 24hGold ainsi que toutes parties qui leur seraient directement ou indirectement liées peuvent, ou non, et à tout instant, investir ou vendre dans tous les actifs présentés dans ces colonnes. Tous droits réservés par 24hGold.






 



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Docteur en sciences économiques de l'université de la Méditerranée et Maître de conférences – HDR - à l'IAE de l'université de Perpignan. Médaille du Bibliographical Institute of Cambridge (London, 2012), il est spécialiste de croissance économique ainsi que chercheur en tourisme international et consultant pour l’Organisation Mondiale du Tourisme (Nations-Unies). Il signe des chroniques économiques dans la presse nationale (Les Echos, Le Monde, le Figaro, Economie-Matin) et internationale (l’AGEFI le quotidien suisse des finances, le Boston de Providence aux USA, le Québécois Libre à Montréal). Il anime enfin, depuis plus de 15 ans, un blog à vocation pédagogique, Chroniques en liberté, à l'attention de ses étudiants et du grand public. Ouvrages [1] Les défis économiques de l'information, la numérisation, L'Harmattan, Paris 1996. [2] L’innovation dans l’industrie du tourisme - Enjeux et stratégies. En co-écriture avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris, 2001 [3] L’épopée de l’innovation – Innovation technologique et évolution économique, L’Harmattan, Paris, 2005. [4] L’innovation dans l’industrie du tourisme. Enjeux et stratégie, avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris 2006. [5] Fondements d’économie du tourisme. Acteurs, marchés, stratégies. De Boeck Université, Bruxelles 2007. [6] Le modèle français dans l’impasse, Tatamis Editions, Paris 2013. [7] Histoire thématique et contemporaine des faits économiques, Ellipses, Paris 2015. [8] Analyse de la finance internationale : le grand naufrage, en co-écriture avec Faouzzi Souissi (Trader),The Book Edition, Paris 2019.
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