Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
Au moment où je m’apprête à écrire ces lignes, le parti Syriza est donné largement vainqueur en Grèce avec, selon les dernières rumeurs, une majorité absolue. Nous découvrirons l’ampleur de la victoire de ce parti demain, lundi, et nous pourrons observer comment les marchés prennent la chose, mais grâce à l’intervention résolue de Mario Draghi qui a autorisé tous les gouvernements de la zone euro à battre monnaie comme ils le souhaitent ou presque, les choses devraient relativement bien se passer en tout cas dans un premier temps. À plus long terme, vous savez ce que je pense de la situation et ce plan de la BCE est en réalité un détricotage de la zone euro, un détricotage en règle qui pose les bases de la future séparation amiable.
D’ailleurs le petit père des pauvres européens, Mario Draghi, sait très bien qu’il a juste offert encore une fois un peu plus de temps aux politiciens de la zone euro mais de là à ce qu’ils utilisent ce temps avec intelligence et clairvoyance, il n’y a qu’un pas qu’évidemment personne ne veut sauter, car dans un an, nous aurons dépensé 1 100 milliards d’euros sans doute pour pas grand-chose. La croissance sera faible, les dettes encore plus élevées, le chômage toujours en hausse, les impôts devront remonter, bref, ce sera la même situation ou presque avec 1 100 milliards d’euros de dettes en plus… Et là se posera toujours la même question de savoir s’il faut refaire ou pas un autre QE…
Et le petit père des pauvres européens n’est pas le seul à le savoir car le patron de la banque centrale allemande lui aussi le sait et le fait savoir sans beaucoup de discrétion d’ailleurs et, soit dit en passant, ses arguments sont parfaitement justes. Jugez-en donc par vous-même.
Le président de la Bundesbank critique le programme de la BCE
Selon une dépêche Reuters, « le président de la Bundesbank Jens Weidmann a exprimé des doutes sur l’efficacité du programme de rachat d’actifs annoncé jeudi par la Banque centrale européenne (BCE) destiné à relancer l’activité économique en Europe ».
1/ « Il estime que la faiblesse de la croissance au sein de l’Union européenne est d’abord liée au degré élevé d’endettement et au manque de compétitivité de certains pays membres. « Il appartient aux gouvernements concernés de corriger cela ».
2/ « Il est difficile d’estimer les effets que cela pourra avoir mais il est probable qu’ils seront moindres que ceux connus aux États-Unis après la crise financière de 2008. » Car « le niveau des taux d’intérêt était bien plus élevé aux États-Unis lorsque cela a commencé. De plus, les entreprises américaines ont plus fréquemment recours aux marchés pour se financer et les achats de la banque centrale ont de fait un impact plus direct chez eux que dans une économie (plus largement) financée par les banques ».
3/ « La décision de la Banque centrale européenne comporte, à ses yeux, des désavantages et des risques pour la monnaie unique. »
4/ « Les taux d’inflation sont, bien sûr, très bas en ce moment mais cette tendance à la baisse est liée à la faiblesse des prix pétroliers ».
Ce qui est sûr c’est qu’avec l’effondrement des prix du pétrole l’inflation ne peut pas repartir à la hausse alors que la croissance est faible et faire un QE à ce moment-là ne changera rien à l’effondrement du prix du pétrole et donc à une inflation basse…
Ce qui est sûr c’est qu’actuellement les taux d’emprunt des États européens étaient déjà particulièrement bas et que le QE va certes les faire baisser encore un peu plus mais hélas, l’essentiel du chemin vers zéro avait déjà été fait avant… Cela aura donc peu d’impact macroéconomique. Cela a, en revanche, un impact fort en terme de confiance. À partir du moment où les banques centrales achètent les dettes, la liquidité des dettes est assurée et, par définition, il ne peut pas y avoir de faillite lorsque la banque centrale s’engage à vous reprendre vos titres en cas de problème et ça, ce n’est effectivement pas rien, mais cela ne règle aucun problème. Aucun.
Cette politique monétaire n’est pas une réponse crédible au manque de croissance, n’est pas une réponse au chômage élevé, n’est pas non plus une réponse à l’austérité que l’Europe continue à pousser comme étant la seule issue possible à la crise alors que cela nous emmène tous à une situation grecque.
Encore une fois, il n’y a aucune bonne solution, la mort par la rigueur ou la mort par l’hyperinflation, dans tous les cas, il n’y a pas d’issue positive possible. Juste du temps que l’on peut encore gagner.
Il est déjà trop tard, préparez-vous.
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)