Même si tous les indicateurs économiques, sociaux et politiques de l’Hexagone pétulent de bien-être pétillant, l’actualité française oblige parfois à mettre un peu d’eau dans le GHB que nos politiciens s’emploient pourtant à nous distribuer comme des cacahuètes à l’apéritif : parfois, le vivrensemble ne marche pas tout à fait comme dans la pub.
Malgré le déversement continu et de plus en plus musclé de pognon gratuit des autres pour arrondir tous les angles de la diversité et le polissage effréné des couches les plus rugueuses de la société à coups de subsides divers pour éviter le moindre frottement, certains individus – ingrats ! – continuent à entretenir bêtement des griefs les uns contre les autres et à se filer des petits coups de couteau mortels de temps en temps.
Bien évidemment, la presse n’a pas de mal à s’emparer de la tendance observée lorsque les événements s’enchaînent rapidement et qu’ils concernent des adolescents : en Essonne, en l’espace de quelques heures, deux jeunes ont donc été tués lors d’affrontements, l’un à Boussy-Saint-Antoine et l’autre à Saint-Chéron.
Les enquêtes diligentées par ce qui passe pour une autorité en France semblent pointer sur de petits différends répétitifs entre différentes bandes de jeunes qui, pour régler leurs bisbilles, s’y mettent à trente ou quarante, les uns contre les autres, façon « Guerre des boutons » avec envies d’homicide, couteaux et autres objets tranchants ; apparemment et selon le procureur d’Evry, ce phénomène – un peu moins comique que le film d’Yves Robert – semble gangrener le département depuis un moment.
Et un petit tour dans la presse permet de dénicher quelques pépites ; sans même remonter plus loin que le mois dernier, un article du Parisien faisait état de ces affrontements réguliers en Essonne entre les bandes rivales de certains quartiers, qui sont progressivement devenus de véritables rites initiatiques pour les jeunes de ces quartiers chauds du département.
Au moins avec la situation actuelle de confinements / couvre-feux, les politiciens, policiers et autres sociologues-éducateurs-troubadours subventionnés peuvent-ils ressortir sans pouffer les sempiternelles explications depuis le désœuvrement des pugilistes en passant par l’expression d’une sorte de défoulement de cette jeunesse « en manque de perspective »…
Rassurez-vous ! Comme l’explique le préfet de l’Essonne, c’est de pire en pire puisque ces rixes ont augmenté en nombre et en intensité ; on est pour ainsi dire passé d’une petite joute hebdomadaire entre gentlemen à une véritable Battle Royale quotidienne où tous les coups sont permis ce qui explique que notre homme veuille « généraliser le dispositif anti-rixe » dont l’efficacité pourrait (à mon avis) être soumise à introspection vu le résultat jusqu’à présent.
Rassurez-vous ! Ces enquiquinants règlements de comptes à couteaux tirés sont heureusement cantonnés à la plupart des très nombreux quartiers chauds du pays. Avec une surprise moyenne et un étonnement modéré, on découvrira sans trop de mal que Trappes subit aussi ce genre de petits désagréments comme en témoigne une récente rixe entre une cinquantaine de personnes dont toute la presse aurait peut-être parlé si ce pugilat s’était achevé sur un ou deux morts et s’il n’y avait pas des menus végétariens aux cantines lyonnaises.
De même qu’on retrouve des mécanismes fort similaires à Reims, où, apparemment, deux sympathiques bandes rivales de jeunes en sont venues à s’expliquer de façon musclée en pleine rue, péniblement séparées par des forces de l’ordre un peu dépassées par les événements.
Ici, on se contentera des petites joutes récentes de nos baltringues désœuvrés mais on peut sans mal remonter, de semaines en semaines, la longue liste de tels événements en France pour comprendre que ce n’est ni nouveau ni prêt de s’arrêter.
Enfin bon, rassurez-vous : avec les efforts constants des pouvoirs publics, les décisions fines et pertinentes des politiciens, une justice affûtée et une police entraînée, le pays saura surmonter ce genre de péripéties. Et ce n’est pas la consultation de certains mots-clés jetés dans Google News qui permet de s’égarer en atermoiements contre-productifs.
Ainsi, ce genre de rixes est très peu courant, finalement. Ou presque. Les bagarres ne sont qu’un peu plus fréquentes, voilà tout. Doit-on s’appesantir sur les incivilités qui n’occupent plus que les grincheux, vraiment ? Est-il besoin de rappeler que rares sont les faits divers impliquant des couteaux (fous ou non) ? Quant aux fusillades, tout le monde sait qu’en France, le port d’armes à feu est strictement interdit et leur détention sévèrement encadrée, ce qui donne lieu à un véritable désert de faits divers les concernant.
Voilà. Pas de quoi fouetter un chat ou faire un article.
Du reste, ça tombe bien parce qu’avant de gérer ces non-événements, ces faits très divers et évidemment sans impact sur la vie des gens normaux (i.e. qui vivent dans les quartiers tranquilles de la capitale et ne sont jamais concernés par ces petits débordements), l’État a largement de quoi s’occuper. D’autres priorités, impérieuses, s’imposent naturellement aux autorités du pays et à la classe jacassante qui en relate les chroniques quotidiennes.
Il est dès lors normal que la sphère publique se soit emparée, au-delà de la valeur nutritive des repas de certaines cantines, du terrible problème de la précarité menstruelle sur lequel les plus hautes instances de la République sont invitées à se pencher de façon urgentissime, ce qui explique une prochaine prise de décision courageuse du Président Macron sur cette question si substantielle.
Ah, décidément, les impôts des Français sont bien employés !