Dans quelques
semaines, nous commémorerons les quinze ans de la mort d’un
grand historien français : François Furet. Ses travaux
représentent une véritable rupture
épistémologique dans la recherche historique sur la
Révolution française. Furet se distingue notamment par le fait
qu’il a graduellement reconnu que les prémices de la Terreur
datent de 1789, rejoignant ainsi, du moins sur certains points,
l’approche contre-révolutionnaire qui rejetait ladite
Révolution en bloc ainsi que la thèse, peu satisfaisante,
d’une dichotomie 1789/1793.
Cette
dichotomie est fortement défendue par la tradition
« libérale » à laquelle est pourtant censé
appartenir Furet. Pour les historiens de cette école, les révolutionnaires
de 1793 ont trahi
les idéaux véhiculés en 1789. La Révolution ne
serait alors pas un bloc homogène mais une succession de
périodes hétérogènes.
Dans son
ouvrage majeur, Penser la
Révolution française, Furet s’écarte donc quelque
peu de la ligne idéologique de son « école
d’origine », exhumant au passage la pensée de
l’historien Augustin Cochin. Cochin ne se contente pas d’affirmer
que la Révolution française est un bloc homogène. Pour
lui, les origines de cette période sont un peu plus lointaines et
remontent au moins à 1750, date à partir de laquelle ont
commencé à se constituer les sociétés de
pensée, telles que les loges maçonniques.
Cochin ne
sombre pas, pour autant, dans la thèse conspirationniste
défendue par l’abbé Barruel
qu’il chercha à dépasser. Mais il insistera sur l’importance des
idées sur le cours de l’histoire.
Furet semble
suivre la thèse de Cochin dans l’ouvrage précité.
Il dira même, rompant presque définitivement avec l’école
libérale, que « 1789 ouvre une période de
dérive de l’Histoire », que la Terreur se
déduit du discours révolutionnaire et, surtout, que
« 1793 est déjà dans 1789 ». Rousseau est
visé à travers son pernicieux concept de
« volonté générale », repris par
la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et
qui est un des principes majeurs de la Révolution française.
Cette période de l’histoire est souvent narrée comme
consacrant l’individualisme. Mais les
« minorités » contre-révolutionnaires y
furent pourtant écrasées ou, à défaut, particulièrement
mal vues. L’unitarisme fut la règle.
Furet
n’est pas toutefois uniquement cet extraordinaire penseur de la
Révolution française : il s’est également
distingué par un ouvrage remarqué sur le communisme, intitulé
Le passé d’une illusion.
Concernant la France, Furet établit d’ailleurs un pont entre la
Révolution et le communisme hexagonal. Ce point est
matérialisé par la passion révolutionnaire qui touche la
France depuis 1789. Ce n’est pas pour rien qu’Engels admirait
profondément l’œuvre des révolutionnaires
français, en faisant un objet de réflexion en vue de
l’instauration de la dictature du prolétariat.
Cette passion
révolutionnaire a « contaminé » les
communistes français. Mais Furet ne leur cherche légitimement
aucune excuse : il rappela que de nombreuses informations circulaient
sur les crimes du communisme – via les témoignages de Victor Kravtchenko, d’Ante Ciliga
et d’Alexandre Soljenitsyne – et que ceux qui continuaient
à se revendiquer de cette idéologie étaient simplement
empreints d’illusions malsaines, l’importante influence des
intellectuels socialistes et du Parti communiste en France les confortant
dans leur aveuglement. Leur attitude à l’égard des
« marxistes déviants » en est la preuve la plus
consternante.
Le livre de
Furet est, près de vingt ans après sa publication, toujours
d’actualité : certains ont dernièrement jugé,
de façon un peu péremptoire, qu’il n’y avait plus
de communistes en France. Le fait que le PCF ne présente plus de
candidat sous sa bannière serait un symbole éclatant.
Malheureusement,
le Parti communiste a eu la « brillante » idée
de soutenir le candidat du Front de Gauche, Jean-Luc Mélenchon, lequel
s’en donne à cœur joie lorsqu’il s’agit de
défendre les dictatures communistes les plus féroces.
Et quand on voit les résultats électoraux qu’il vient
d’obtenir, il n’y a pas de quoi être
particulièrement rassuré…
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