Que
dire de la lettre de James Comey envoyée au Congrès
vendredi dernier ? Il me semble que le directeur du FBI ait opté pour la
solution nucléaire contre sa maison mère le Département de la Justice, et notamment
contre sa supérieure, le procureur général Loretta Lynch. Pourquoi ? Parce que le
procureur général a refusé de se
pencher sur les emails d’Hillary Clinton, et ce même après que davantage de
preuves ont été présentées dans le cadre de l’affaire de sexting d’Anthony Weiner, le mari de la chef de cabinet d’Hillary, Huma Abedin, avec une mineure.
Le
weekend dernier, nous avons pu entendre après trois semaines de silence de
plomb de la part des avocats du Département de la Justice que le FBI n’avait
pas obtenu de mandat pour examiner les emails présents sur l’ordinateur et
les autres appareils électroniques de Weiner. Que
penser lorsque le directeur du FBI en personne n’est pas en mesure d’obtenir
un mandat en un temps éclair ? Que le Département de la Justice est en
guerre contre le FBI. Le Watergate ne ressemble qu’à un maigre gruau en
comparaison à la fantastique bouillabaisse qu’est devenu le fiasco de la
campagne présidentielle.
C’est
une situation qui n’a été que rendue plus évidente par la manière dont le New York Times
a minimisé l’affaire lundi matin. Le chroniqueur Paul
Krugman a qualifié la lettre de Comey de
« cryptique ». Son cryptographe personnel insinue que Comey tente d’étouffer l’enquête quant à une possible
« intervention de la Russie dans les affaires électorales des
Etats-Unis ». Le chef de l’opposition du Sénat, Harry Reid, a ajouté
qu’il est désormais « évident que Comey
possède des informations explosives quant à une coordination entre Donald Trump, ses conseillers et le gouvernement russe ».
Quoi de plus ridicule. Est-ce la faute de la Russie si Hillary s’est encore
mise dans de sales draps ?
Un
peu plus tôt cette semaine, les avocats du Département de la Justice ont
tenté d’écraser une enquête parallèle sur la Fondation Clinton. Comment pourraient-ils
croire que l’affaire finira par être balayée sous le tapis ? Il est
temps que la Chambre ou le Sénat assigne Bill Clinton à comparaitre pour
qu’il s’explique quant à sa réunion du mois de juin avec Loretta Lynch. Il ne
devrait plus profiter d’une quelconque immunité.
Et
en parlant d’immunité, quand accepterons-nous enfin qu’Huma Abedin ait pu obtenir quelques privilèges aux cours des
cycles précédent de l’enquête sur les emails d’Hillary ? Un certain
nombre des partenaires de campagne de Clinton ont obtenu l’immunité juridique
en début d’année, ce qui a rendu les preuves qui abondent sur leurs
ordinateurs portables inadmissibles dans l’affaire du serveur de messagerie.
Il
y a certaines choses qu’on ne sait pas encore : Qu’a jusqu’à présent fait
l’avocat général du district du Sud de New York, Preet
Bharara, dans le cadre de l’affaire ? Il
travaille pour le Département de la Justice, mais est connu pour opérer de
manière indépendante. Il ne fait aucun doute qu’il soit déjà impliqué dans
l’affaire de sexting
qui implique Weiner, et donc qu’il ait accès à un
grand nombre de preuves et soit en mesure d’obtenir ses propres mandats.
Ce
qui semble aujourd’hui se détricoter, ce sont les efforts de Loretta Lynch de
protéger Hillary Clinton ; c’est pourquoi elle cherche désormais, ce qui
n’est pas sans rappeler un certain film d’Alfred Hitchcock, à nous faire
croire que Comey a poignardé Hillary dans la
douche. (Dans le film
Psycho, Janet Leigh, dans le rôle de Marion Crane,
s’enfuit de son lieu de travail avec de l’argent volé à son employeur avant
que Norman Bates ne l’assassine sous la douche dans sa chambre de motel.)
Trump joue bien évidemment le jeu avec son
imbécilité habituelle. Il serait bien tragique que cette succession
d’évènements mène à son élection – mais ne serait-il pas tout aussi tragique
de voir Hillary accéder à la Maison Blanche, sous le feu de toutes sortes
d’accusations ? Si elle se trouve élue, elle ne cessera de semer la
confusion avec l’aide du procureur spécial, et sera tentée à tout instant de
déclarer la guerre à la Russie pour détourner l’attention du public de ses
déboires judiciaires.
Nous
apprendrons bientôt plus de la nature des tensions entre le FBI et le
Département de la Justice, et de celles qui sont internes à ces deux agences.
Il y a bien trop d’individus écœurés dans la nature pour éviter d’autres
fuites et l’apparition d’une multitude de nouveaux emails en provenance de
ceux qui chercheraient à semer une piste d’incriminations jusqu’au bureau de
l’Avocate générale en personne.
Voilà
qui n’est pas beau à voir. Si vous pensez que tout cela pourra être réglé
avant le 8 novembre, attendez-vous à être déçu. Cette affaire a tant de
divisions qu’elle ressemble à un mille-pattes d’Amazonie en comparaison au
cafard au pas lourd qu’était le Watergate. Les tristes évènements
continueront de s’enchaîner jusqu’à ce que l’économie américaine et sa
matrice de rackets vampires que sont les marchés financiers n’implosent en
2017, dans le même temps que s’effondreront l’Union européenne et le commerce
global.