Malgré la Constitution de la Vème République qui distingue précisément
l'organisation qu'est l'Etat et l'organisation qu'est l'ensemble des organismes
de sécurité sociale, tout se passe aujourd'hui dans les discours, politiques
ou non, comme si l'Etat avait la "responsabilité" de l'ensemble ou
en était la cause.
Mais il n'en est rien.
En outre, et ceci est encore
plus grave, les lois projetées pour les parlementaires en relation avec
l'un et l'autre sont devenues incompréhensibles si on les met en regard avec
les propos présents des instances de la commission de l'Union européenne sur
le déficit des pouvoirs publics en France.
1. Un exemple.
En effet, à les en croire, le
déficit de la puissance publique (tous pouvoirs publics confondus) est
supérieur à ce qu'il devrait être au maximum.
Si l'on en croît, par exemple, le journaliste
de Le Point qui
en informe, il faut savoir que:
"Les déficits de la France :
Fin 2013, la France affiche un déficit de 4,1 % du PIB.
Fin 2014, le trou devrait s'aggraver à 4,4 %, selon les prévisions du
ministère de l'Économie et des Finances, avant de refluer légèrement à 4,3 %.
Autant de prévisions qui
reposent sur une hypothèse de croissance de 0,4 % cette année et 1 % l'année
prochaine.
La Commission européenne est plus pessimiste.
Pour Bruxelles, l'activité ne devrait croître que de 0,3 % en 2014 et 0,7 %
en 2015.
Logiquement, le déficit devrait donc se creuser davantage que prévu par Paris
l'année prochaine, à 4,5 % du PIB.
En 2016, la Commission table même sur un déficit aggravé à 4,7 % du PIB !
La France se retrouverait alors avec le plus gros déficit de toute la zone
euro.
Même si ce chiffre a été abondamment repris dans la presse, il n'est pourtant
pas très significatif puisqu'il ne prend pas en compte les 16 milliards
d'efforts de contraction des dépenses annoncés par François Hollande dans le
cadre des fameux 50 milliards d'économies."
Or, quand on additionne les chiffres donnés dans les deux lois de l'Etat et
de l'organisation de la sécurité sociale, il s'avère largement au-dessous comme
on va le montrer ci-dessous.
Pourquoi cette divergence ?
A cause d'un nouveau type de rapport qui a été créé de toutes pièces
depuis quelques années et qui n'est pas l'objet d'une loi, mais existe en
marge des lois et qui est totalement ignoré par l'homme de la rue, voire du
parlementaire.
En quoi consiste-t-il?
2. Le "rapport
économique social et financier" (R.E.S.F.).
Ce rapport n'est autre que le "rapport économique social et
financier" (184 pages du tome 1 pour 2015 contre 172 pour 2014).
Il faut savoir que, selon les mots mêmes du R.E.S.F.:
"Le 'rapport économique social et financier' tient compte des
modifications apportées à l’article 50 de la loi organique du 1er aout 2001
relative aux lois de finances par la loi organique relative à la programmation
et à la gouvernance des finances publiques du 17 décembre 2012.
Comme prévu par la loi organique, ce rapport présente les évolutions
détaillées des prélèvements obligatoires et de la dépense publique et se
substitue donc aux anciens rapports sur les prélèvements obligatoires et sur
la dépense publique.
Il prend en compte l’évolution du droit dérivé européen avec l’application
des règlements dits et notamment du règlement du Parlement européen et du
Conseil du 21 mai 2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et
l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des
déficits excessifs dans les États membres de la zone euro.
Au regard des nouvelles exigences européennes, le rapport économique social
et financier tient lieu de 'projet de plan budgétaire' ('draft budgetary plan').
En raison du déclenchement du mécanisme de correction à l’occasion de
l’examen par le Haut Conseil des Finances publiques du projet de loi de
règlement de 2013, est annexé au rapport économique social et financier le
rapport prévu à l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative
à la programmation et à la gouvernance des finances publiques."
En particulier, ce R.E.S.F.
« analyse les mesures de correction envisagées, qui peuvent porter sur
l’ensemble des administrations publiques, en vue de retourner aux
orientations pluriannuelles de solde structurel définies par la loi de
programmation des finances publiques ».
Selon la page 51 du R.E.S.F.:
" [...] le solde public est passé de -5,1 % de PIB en 2011 à -4,1 % en
2013".
Pour 2015, selon la page 52, le R.E.S.F. (cf. tableau ci-dessous):
" [...] le solde public se redresserait à -4,3 % du PIB, porté par
l’accroissement des efforts en dépense qui représenterait 0,5 point de
PIB."
Et avec ces chiffres, la
Commission dite "de Bruxelles" n'est pas d'accord.
Dont acte.
Et en tout état de cause, les
chiffres indiqués dans les lois que doivent voter les parlementaires ne sont
qu'une partie de la réalité.
Une partie de la réalité n'est donc pas le résultat du vote des
parlementaires, mais de bureaucrates irresponsables.
3. Le régime général
de l'organisation de la sécurité sociale.
(cf. http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/plfss_2015.asp)
Le 2° du I porte rectification, pour le régime général (régime essentiel de
l'organisation de la sécurité sociale), des prévisions de recettes, fixées
par la loi de financement pour 2014, des objectifs de dépenses afférents et
du tableau d’équilibre, ces données étant mises en regard, dans le tableau
ci-après, des rectifications que propose d’y apporter le présent article.
TABLEAU D’ÉQUILIBRE
2014 DU RÉGIME GÉNÉRAL
(en milliards d’euros)
Prévisions initiales
pour 2014
(LFSS 2014)
|
Prévisions révisées
pour 2014
(PLFSS 2015)
|
|
Recettes
|
Dépenses
|
Solde
|
Recettes
|
Dépenses
|
Solde
|
|
Maladie
|
163,8
|
169,8
|
-6,0
|
161,4
|
168,8
|
-7,3
|
Vieillesse
|
116,0
|
117,2
|
-1,2
|
115,1
|
116,7
|
-1,6
|
Famille
|
56,9
|
59,2
|
-2,3
|
56,2
|
59,1
|
-2,9
|
AT-MP
|
12,1
|
12,0
|
0,1
|
12,0
|
11,8
|
0,2
|
Total (*)
|
336,6
|
346,1
|
-9,5
|
332,7
|
344,3
|
-11,7
|
Article 12
Approbation du tableau d’équilibre de l’ensemble
des régimes obligatoires pour 2015 Conformément aux dispositions organiques (L.O.
111-3 du code de la sécurité sociale), cet article, pendant de l’article
d’équilibre du projet de loi de finances, retrace l’équilibre financier de la
sécurité sociale dans un tableau, présenté par branche et établi pour
l’ensemble des régimes obligatoires de base, dont il propose l’approbation.
Le tableau suivant met en regard les données afférentes au tableau
d’équilibre financier pour 2015 avec celles relatives à l’exercice 2014.
TABLEAU D’ÉQUILIBRE DE
L’ENSEMBLE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE
(en milliards d’euros)
|
2014*
|
2015
|
|
Prévisions de
recettes
|
Objectifs de
dépenses
|
Solde
|
Prévisions de
recettes
|
Objectifs de
dépenses
|
Solde
|
Maladie
|
186,4
|
193,8
|
-7,4
|
191,3
|
198,0
|
-6,7
|
Vieillesse
|
218,1
|
219,9
|
-1,7
|
222,7
|
224,0
|
-1,3
|
Famille
|
56,2
|
59,1
|
-2,9
|
52,4
|
54,6
|
-2,3
|
AT-MP
|
13,5
|
13,2
|
0,3
|
13,7
|
13,5
|
0,3
|
Toutes branches
(hors transferts)
|
461,2
|
472,9
|
-11,7
|
466,5
|
476,6
|
-10,1
|
* Prévisions révisées par le présent
projet de loi de financement.
3.a. Récapitulation des
recettes du régime général de l'organisation de la sécurité sociale :
€ 467 milliards
3.b. Récapitulation des
dépenses du régime général de l'organisation de la sécurité
sociale :
€ 477 milliards
4. Loi de finances de
l'Etat.
(cf. http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers...nances_2015.asp
)
4.a. Le solde
budgétaire de l’État (§ 3.A.)
Le solde budgétaire du projet de loi de finances pour 2015, avec un déficit
de 75,7 Md€, traduit la poursuite du redressement des comptes publics à
travers la mise en place des mesures du plan de 50 Md€ d’économies annoncé
par le Gouvernement dès le printemps 2014.
Et l'exposé des motifs insiste sur le fait qu'il est à remarquer que:
"La méthodologie utilisée
pour estimer le solde structurel
- n’est pas la même que celle utilisée dans la loi de programmation des
finances publiques pour les années 2012 à 2017,
- mais correspond à celle du projet de loi de programmation des finances
publiques pour les années 2014 à 2019.
Les principales différences consistent en
- une révision de l’estimation de croissance potentielle, désormais identique
à celle de la Commission européenne,
- une mise à jour des élasticités spontanées à l’activité impôt par impôt
(identiques à celles de la Commission européenne) et, enfin,
- en un changement de référentiel de comptabilité nationale (passage du SEC
95 au SEC 2010).
Ce nouveau référentiel de comptabilité nationale entraîne une modification
des niveaux de PIB et de solde public, notamment en raison du changement dans
la date d’enregistrement des crédits d’impôts." (loi de finances, p.42).
Ces écrits ne peuvent que faire rêver d'autant qu'il n'est pas évoqué que,
pour plus d'amples explications, on peut se reporter à Thibault Guyon et
Stéphane Sorbe (2009) " target="_blank";Solde structurel et
effort structurel : vers une décomposition par sous secteur des
administrations publiques", numéro 2009/13, direction générale du
Trésor et de la politique économique, décembre.
4.b. Récapitulation
des recettes du budget général.
Le parlementaire connaît les
recettes du budget général, par exemple dans le tableau qui suit:
(En milliers d’euros)
|
Numéro de ligne
|
Intitulé de la
rubrique
|
Évaluation pour 2015
|
|
|
|
1. Recettes
fiscales
|
378 166 193
|
|
11
|
Impôt sur le revenu
|
75 808 000
|
12
|
Autres impôts directs perçus
par voie d’émission de rôles
|
2 947 800
|
13
|
Impôt sur les sociétés
|
56 999 000
|
14
|
Autres impôts directs et
taxes assimilées
|
14 221 233
|
15
|
Taxe intérieure de
consommation sur les produits énergétiques
|
14 573 234
|
16
|
Taxe sur la valeur ajoutée
|
193 235 170
|
17
|
Enregistrement, timbre,
autres contributions et taxes indirectes
|
20 381 756
|
2. Recettes non
fiscales
|
13 719 408
|
|
21
|
Dividendes et recettes
assimilées
|
5 534 927
|
22
|
Produits du domaine de
l’État
|
1 924 061
|
23
|
Produits de la vente de
biens et services
|
1 166 000
|
24
|
Remboursements et intérêts des
prêts, avances et autres immobilisations financières
|
931 260
|
25
|
Amendes, sanctions,
pénalités et frais de poursuites
|
1 025 740
|
26
|
Divers
|
3 137 420
|
Total des recettes
brutes (1 + 2)
|
391 885 601
|
|
3. Prélèvements
sur les recettes de l’État
|
71 558 252
|
|
31
|
Prélèvements sur les
recettes de l’État au profit des collectivités territoriales
|
50 516 252
|
32
|
Prélèvement sur les recettes
de l’État au profit de l’Union européenne
|
21 042 000
|
Total des recettes,
nettes des prélèvements (1 + 2 - 3)
|
320 327 349
|
|
4. Fonds de concours
|
3 925 069
|
|
|
Évaluation des fonds de
concours
|
3 925 069
|
Bref, recettes brutes du budget général :
€ 392 milliards
4.c. Dépenses du
budget général.
Le parlementaire connaît aussi
les dépenses du budget général, par exemples dans les états suivants:
ÉTAT B
(Article 32 du projet de loi)
Répartition, par mission et programme,
des crédits du budget général
BUDGET GÉNÉRAL
Mission
|
Autorisations
d’engagement
|
Crédits
de paiement
|
Totaux
|
410 613 652 074
|
395 617 020
335
|
4.d. Récapitulation des
dépenses du budget général
- dépenses autorisées :
€ 411 milliards
ou bien
- dépenses de paiements :
€ 396 milliards
5. Budget de l'Etat et
financement de l'organisation de la sécurité sociale, des chiffres absents.
Le parlementaire n'a
aucune difficulté pour connaître le total des grandeurs agrégées.
- Recettes agrégées:
€ 859 milliards
(392 + 467 = 859)
- Dépenses agrégées (sur la
base des dépenses autorisées ):
€ 888 milliards
(411 + 477
= 888)
- Dépenses agrégées (sur la base des dépenses de paiements) :
€ 873 milliards
(396 + 477 = 873)
Bref, pour le parlementaire, le budget de l'Etat et le financement des
organismes de sécurité sociale ont des déficits de même ordre et, mis ensemble,
entre € 14 et 29 milliards, soit entre 1.6 et 3.3% des recettes.
Rapporté au produit intérieur brut (P.I.B.) égal à € 1937 milliards pour 2014
(cf. target="_blank" http://ec.europa.eu/economy_finance/ameco/...ResultSerie.cfm ),
les déficits précédents sont donc à multiplier par plus de 50%.
6. Remarque.
Tous les chiffres précédents
ne peuvent donc pas être reliés à ceux de textes antérieurs sur le même sujet
pour la raison donnée en motif, la variation des comptabilités, comme, par
exemple:
a)&n target="_blank"bsp;Les
déficits se suivent et se ressemblent... La dette ? Ah, Ah, Ah ! d'octobre
2011 dont le sommaire est:
1. Les prélèvements
obligatoires.
2. Le marché financier,
"ce pelé, ce gâleux"...
* En 2012.
* De 1958 à 1971.
* De 1970 à 1986.
* De 1983 à 1992.
* Faisons le point.
*De 1995 à 2011.
* Eclairer pour mieux
obscurcir...
* Le capharnaüm financier.
Addendum.
1. Election Woes
2. S&P, Moody’s
b)&n target="_blank"bsp;ce
billet du 21.12.2011 ou
target="_blank" c) celui-ci
du 25.12.2010
d)&n target="_blank"bsp;La
confusion organisée. de septembre 2013 dont le sommaire est:
1. La divergence.
2. Remarque.
3. Le tribut.
La CRDS
La CSG
Le versement annuel du
Fonds de réserve pour les retraites
Le versement annuel du Fonds
de réserve pour les retraites
Les autres ressources
4. Les "autres" dépenses.
5. Le tribut oublié.
7. Un dernier mot.
Tout cela ajoute donc à la caricature des lois périodiques de première
importance que doivent voter les parlementaires et qu'ils ne votent en
définitive que pour une faible partie et proportion en connaissance de cause,
faute d'informations compréhensibles.
Les héros de cette situation?
Les bureaucrates de tout poil qui ont créé toutes ces statistiques variables,
sans aucune valeur économique, et qui n'ont pas le souci de donner des
éléments sur leurs travaux, provisoirement aboutis, de les justifier à
chacun, à commencer par les parlementaires, ce qu'ils seraient bien
incapables de faire.
Fausse république des chiffres des statistiques, fausse démocratie des gens,
tel est l'état de la France, aujourd'hui en 2014.