En général, lorsque les
hommes politiques s’excusent pour quelque chose, c’est qu’ils ont été pris en
flagrant délit, ou qu’ils sont sur le point de l’être. C’est probablement ce
qui s’est passé récemment avec l’ancien Premier ministre britannique, Tony
Blair, qui a décidé de « s’excuser » pour avoir envahi l’Irak en
2003. Blair fait face à la publication potentielle d’un rapport accablant
quant à sa conduite au gouvernement à l’aube de l’invasion de l’Irak par le Royaume-Uni
et les Etats-Unis en 2003.
Une série d’emails a
également été envoyée depuis les serveurs privés de l’ancienne Secrétaire d’Etat,
Hillary Clinton, expliquant que Blair a apporté son soutien à l’action
militaire américaine en Irak une année entière avant que la décision ait
officiellement été prise. Bien que Tony Blair ait assuré à ses constituants son
dévouement à la diplomatie dans le cadre de la crise irakienne, il aurait
officieusement promis d’intervenir dès que Bush le lui demanderait.
Observateur attentif de
l’opinion publique, Blair a pris la surprenante décision de s’excuser le mois
dernier, à l’occasion d’un entretien avec CNN.
Les excuses des
politiciens ont cependant très souvent deux caractéristiques : elles ne
mentionnent pas de prise de responsabilités personnelle, et n’expient pas
leurs méfaits.
Tony Blair ne s’est donc
pas excusé pour son rôle dans le déclenchement d’une guerre désastreuse en
Irak. Il ne s’est pas excusé pour avoir, comme l’a expliqué l’ancien
inspecteur des Nations-Unies en Irak, Hans Blix, « faussé les preuves de
l’existence d’armes de destruction massive en vue d’obtenir une approbation pour
son intervention en Irak ».
Non. Tony Blair s’est
excusé du fait que « les renseignements qu’il a reçus aient été faux ».
Il s’est excusé des « erreurs de planification » quant à l’Irak post-Saddam.
Et a refusé de s’excuser pour avoir renversé Saddam Hussein.
En d’autres termes, il s’est
excusé de la manipulation des renseignements par ses collègues, qui ont
faussement justifié de la présence d’armes de destruction massive en Irak. La
menace représentée par l’Irak pour le Royaume-Uni n’en était pas une. Mais
pour Blair, la faute est celle de quelqu’un d’autre.
Et ne nous attendons pas
à une excuse similaire de la part de George W. Bush. Ou encore de la part du
Président Obama pour avoir mené une guerre tout aussi désastreuse sur de faux
prétextes contre la Lybie.
S’ils s’excusaient un
jour, soyons certains qu’ils ne confesseront jamais, eux non-plus, leurs
propres manipulations. Ils ne s’excuseront jamais de la destruction qu’auront
causée leurs manipulations.
D’ailleurs, plutôt que
de s’excuser pour avoir poussé les Etats-Unis à déclarer la guerre à la Lybie
sur de faux prétextes, Obama envoie désormais des troupes en Syrie. N’oublions
pas que cette action militaire américaine a été vendue au départ comme étant
une opération de courte durée destinée à venir à l’aide d’une petite
communauté religieuse coincée sur une colline du nord de l’Irak. Après une
année et des milliers de bombes lancées en Irak et en Syrie, Obama a annoncé
la semaine dernière l’envoi de troupes en Syrie, et ce bien qu’il ait promis
plus de sept fois que cela n’arriverait pas.
Voici ma proposition :
plutôt que de prononcer excuses et non-excuses, pourquoi ne pas lancer un
débat sur les politiques qui nous ont menés à un tel désastre ? Pourquoi
ne pas discuter de la raison pour laquelle les Etats-Unis ne cessent de mener
des guerres sur de faux prétextes ? Ce sont des discussions que nous n’aurons
pas, parce que les deux partis sont en faveur de la guerre. Ils sont prêts à
tomber au rang de pays du Tiers-monde pour maintenir leur empire. Et quand
nous en serons arrivés là, il ne restera plus personne pour s’excuser.