En
parallèle au nouveau plan de sauvetage de la Grèce, les
dirigeants de la zone euro ont décidé le 21 juillet dernier
de renforcer le fonds européen de stabilité
financière (FESF). Celui-ci est ainsi supposé apporter –
tout comme le Mécanisme européen de stabilité (MES) qui
est censé lui succéder en 2013 – une solution au
problème des dettes souveraines pour éviter l’apparition
de nouvelles crises comme celle à laquelle est confrontée la
Grèce.
Or, il
n’en est rien. Les problèmes d’endettement des
États européens n’ont pas pour autant été
résolus et l’accord repousse dangereusement les
échéances.
Certes, le FESF
propose de collectiviser les pertes liées aux dettes actuelles et
futures des pays en difficulté, ce qui dans l’immédiat
donne un peu de répit à la Grèce. De plus, on lui a
promis également des pouvoirs d’intervention fortement
élargis, à savoir qu’il pourra financer directement un
État dans le besoin par le rachat notamment de sa dette souveraine, ce
qui au passage faussera davantage encore le marché obligataire.
Cependant, on
peut légitimement se demander si au-delà des ambitions politiques, le FESF a
les moyens de sauver les pays qui seront dans le besoin ? Sur qui
retombera le fardeau des sauvetages, si les pouvoirs politiques lui donnaient
ces moyens ?
En
réalité, le FESF – une société de droit
luxembourgeois – ne dispose pas de fonds en tant que tel. Il est en
réalité une « coquille vide » qui agit au
nom des contribuables européens sans qu’ils aient vraiment leur
mot à dire. Tout ce qu’il possède ce sont des promesses
de financement faites par les différents États-membres et qui
se montent au total à 440 milliards d’euros.
Ces promesses
permettent au FESF de s’endetter lui-même en empruntant sur les
marchés financiers pour ensuite prêter aux États en
difficulté. Il est supposé ainsi faire bénéficier
de sa bonne réputation (et donc des taux bas auxquels il peut
emprunter) des États qui risquent in
fine de ne pas pouvoir rembourser. Cette réputation ainsi que les
sommes qui sont prêtées dépendent à
l’évidence directement du montant des garanties promises par les
États-membres.
Mais ces
promesses sont-elles crédibles ?
Il est
surprenant à cet égard de trouver parmi les pays qui promettent
de couvrir les opérations du FESF les États qui sont au
cœur de la tourmente actuelle de la dette souveraine.
Ainsi, la
Grèce a apporté des garanties pour 12,4 milliards
d’euros, alors que les dirigeants de la zone euro viennent de lui
accorder une aide de 109 milliards pour la sauver de la banqueroute. Comment
pourra-t-elle se porter garante d’un tel montant alors qu’elle
est au bord de la faillite ?
Si on y ajoute
le Portugal, l’Irlande, l’Espagne et l’Italie –
c’est-à-dire les pays qui sont au centre des soucis de dette
souveraine et qui sont déjà ou seront très vite parmi
les futurs bénéficiaires du FESF – ce montant
représente 37% du total des financements promis au FESF !
Celui-ci ne
dispose donc en réalité que de 278 milliards d’euros au
lieu des 440 milliards d’euros officiellement affichés.
C’est un montant inférieur à la seule dette grecque
(environ 350 milliards) et qui est à des années lumières
des 1500
milliards que l’un des membres de la BCE juge d’ores et
déjà nécessaires pour la crédibilité du
FESF afin d’obtenir le soutien des créanciers privés !
Garanties de financement promises au
FESF par les États-membres
Belgique
Allemagne
France
Chypre
Luxembourg
Malte
Pays-Bas
Autriche
Slovénie
Slovaquie
Finlande
Total PIIGS
–
dont Grèce
–
–
dont Irlande
–
–
dont Portugal
–
–
dont Espagne
–
–
dont Italie
|
3,5%
27,1%
20,4%
0,2%
0,3%
0,1%
5,7%
2,8
0,5%
1%
1,8
36,7%
2,8%
1,6%
2,5%
11,9%
17,9%
|
Source : FESF.
Comment les
États qui bénéficieront des aides du FESF peuvent-ils
être aussi en même temps ses garants, et ce dans une proportion
aussi importante ?
D’autant
plus que les pays perçus comme « solvables »,
à savoir la France ou même l’Allemagne, ont leur propre
dette publique à gérer. En effet, ils pourraient atteindre
aussi dans les années à venir la limite jugée de
« non retour » des 90% de dette par rapport au PIB.
Deux cas de
figures se présenteront à terme au FESF. Soit il ne pourra pas
présenter des garanties suffisantes pour venir en aide aux pays en
difficulté, certains pays contributeurs, par exemple
l’Allemagne, refusant de mettre sans cesse la main à la poche
pour remplir un « puits » devenu sans fond. Soit le
FESF mènera rapidement à une implication sans
précédent des contribuables européens, notamment
français et allemands, à cause des engagements de leurs propres
États entraînés par les pays en difficulté dans
leur sillage. Ces contribuables doivent être conscients que le FESF
repose sur leurs épaules et que ce sont eux qui seront
inévitablement mis à contribution.
La
solidité du FESF sera sans doute rapidement mis à
l’épreuve et testée par les marchés financiers,
une fois qu’il deviendra clair qu’il n’est qu’un
serpent qui se mord la queue.
Valentin Petkantchin
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