Après le passage de l’ouragan
Katrina en 2005, il a fallu attendre plus d’une semaine pour que l’étendue
des dégâts puisse être évaluée, et il en ira de même pour le chantier dans
lequel baigne désormais Houston. Il est notamment inconcevable que l’activité
commerciale qui a fait d’Houston la quatrième plus grande ville des
Etats-Unis et, selon Chris Martenson, l’équivalent de la dixième plus grosse
économie du monde, redevienne un jour ce qu’elle était avant le 26 août 2017.
L’activité majeure y était jusqu’à
présent le raffinage et la distribution de produits pétroliers, l’activité la
plus centrale qui soit au fonctionnement de l’économie américaine. Le public
et ses dirigeants désemparés de tout bord politique, ainsi que les médias
perdus dans le carnaval des races et des genres, sont sur le point de
découvrir la dynamique qui anime la relation entre l’énergie et une économie
industrielle.
Le pivot de cette relation est
le système bancaire, qui permet la conversion de la puissance brute du
pétrole en toutes les activités qui animent une société dite avancée. La
présomption populaire veut que l’aide fédérale aux sinistrés compense toutes
les pertes encourues. Mais cette présomption pourrait passer par la fenêtre
suite à l’inondation de 2017. Quel que soit le montant de cette aide, elle ne
pourra jamais compenser pour les heures, les jours et les semaines qui s’écouleront
jusqu’à ce que les entreprises puissent en revenir à quelque chose qui
ressemble de près ou de loin à leur rythme d’opération d’avant l’ouragan.
Et nombreuses sont celles qui ne
s’en remettront jamais, notamment les plus petites qui soutiennent les plus
grosses – les magasins d’outils, les entreprises de construction, les
sociétés de transport routier et maritime, les entreprises d’installation de
pipelines, les cimenteries, et ainsi de suite. Toutes ces activités
existaient jusqu’à présent dans le cadre d’une chaine de production et de
services hautement rationalisée, et à Houston, plus rien ne sera fait en
temps et en heure pendant encore un long moment. Et personne n’a encore
commencé à parler des couvertures versées par les sociétés d’assurance, et de
la possibilité pour les sociétés implantées dans cette zone inondable
perpétuelle de renouveler leur politique. Devront-elles se relocaliser dans
une région plus surélevée ? Qui paiera pour ça ? Et où se trouvent
ces régions surélevées, dans cette vaste plaine marécageuse ?
Le public a été conditionné, au
travers de fréquents désastres naturels, à croire que personne ne doit jamais
en assumer les pertes, au point que ces pertes n’existent même plus – de la
même manière que la banque centrale du pays a répandu l’idée selon laquelle
le risque n’existe plus en matière de gestion de capital. Nous en avons eu la
preuve aujourd’hui, avec le passage du Dow au-dessus de la barre des 22.000
points. Les efforts de la Réserve fédérale à soutenir les marchés boursiers auront
intérêt à redoubler d’intensité pour compenser le trou représenté par Houston
dans l’activité économique.
Entretemps, le Congrès se
retrouve à discuter de deux urgences financières conjointes en même temps :
l’autorisation de l’envoi d’une assistance financière à Houston, et la
résolution du problème du plafond de la dette. Des lignes de faille
commencent à se manifester, au travers du ressentiment qui persiste encore,
conséquence du refus de la délégation du Congrès texane d’envoyer une aide
financière à New York et au New Jersey suite à l’ouragan Sandy. Le Sénateur
du Texas, Ted Cruz, a par exemple réinventé sa philosophie politique du jour
au lendemain pour rendre possible une assistance fédérale en conséquence d’une
catastrophe naturelle, chose à laquelle il n’était pas si favorable avant le
26 août.
Je pense que bien que ces
politiciens aient des sentiments humains normaux – oui, vraiment – ces émotions
ne viendront pas interférer avec leur agenda mutuel d’autodestruction. Même s’ils
parviennent à établir une sorte d’enveloppe financière pour Houston, le
Trésor commence aujourd’hui a sérieusement manquer de monnaie digne de ce nom
– j’entends par là la monnaie qui peut être comptabilisée par des méthodes
autres que l’écriture de chèques sans provision. L’autre présomption à la
mode veut que la comptabilité n’ait plus aucune importance, et que la
banqueroute ne signifie plus rien. Très bientôt, ces logiques fallacieuses se
manifesteront au travers d’un déclin accéléré de la valeur du dollar.
Quelque part dans ce chantier se
tient un personnage appelé Président Trump. Comme le veut la coutume, il a
rendu visite aux sinistrés la semaine dernière, mais je suspecte que les
effets (qui n’ont pas encore été révélés) de l’ouragan Harvey le mettront
dans un bain de boue bien plus nauséabond que celui dans lequel s’est trouvé
plongé George W. Bush après Katrina.
Et regardez ce que fait
maintenant Irma dans l’Atlantique…