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Que peut-on attendre de l’économie dans les années à venir ? Préparant
avec la Banque mondiale sa réunion de printemps de la semaine prochaine à
Washington, le FMI nous livre en avant-première le fond de sa pensée, et l’on
n’en sort pas ébloui.
Non pas tant à cause des médiocres perspectives qu’il dessine, aussi bien
pour les pays avancés que pour les émergents, mais en raison de
la multiplicité des raisons à cette situation qu’il invoque, ce qui fait que
l’on ne sait plus par quel bout prendre la question. En d’autres termes,
comme si les dés étaient jetés, ce que corrobore l’importance que le Fonds
accorde dans son analyse au vieillissement de la population dans les pays avancés,
sur lequel on ne peut pas agir, auquel s’ajoute un chômage qui ne donne pas
signe de se résorber si l’on considère le taux de participation au marché du
travail.
Dans les cinq années à venir, la croissance devrait être de 1,5% en
moyenne pour les premiers, et de 5,2% pour les seconds. Loin dans les deux
cas de renouer avec les taux d’avant la crise de 2007. Côté préconisation, le
maître mot est investissement, car « des réformes et des politiques
soutenant l’offre devraient être adoptées », dirigés vers la recherche
et le développement, l’éducation et les infrastructures. Autant dire selon
les recettes de toujours, comme autant de manières de préparer l’avenir sans
s’aventurer à le décrire, et sans se pencher sur la demande et ses
perspectives.
En pointant la faiblesse de la croissance, les inquiétudes du Fonds se
manifestent sur un autre terrain, plus d’actualité : celui du désendettement
qui ne va pas en sortir facilité. Un sujet sur lequel il travaille en
permanence, étant par sa mission au cœur de la gestion de la dette. Certes,
les commentaires se multiplient en Europe à propos de l’impact positif des
taux du marché obligataire sur le coût de la dette. Mais les deux phénomènes
ont des effets contradictoires, et si la faiblesse de la croissance s’annonce
persistante, va-t-il en être de même pour les taux obligataires ? La hausse
des taux aux États-Unis – toujours retardée, mais toujours à l’ordre du jour
– va en effet tôt ou tard pousser celle des taux européens. Les banques
centrales agissent de manière décalée dans le temps, mais le levier monétaire
de la Fed est plus puissant que celui de la BCE, rôle mondial du dollar
oblige.
L’accalmie qui est actuellement enregistrée sur le marché obligataire
européen ne sera pas éternelle, et il faut se préparer à un retournement de
conjoncture. Raison pour laquelle le Fonds met l’accent sur une politique
d’investissement que l’Union européenne continue de peiner à concrétiser avec
son « Plan Juncker ». La consolidation fiscale ne fait pas
bon ménage avec le financement de celui-ci, qui dépend largement
d’investisseurs privés. On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, et on
ne sort pas si facilement que cela du « piège à liquidité ».
En dernier ressort, qu’il s’agisse d’éponger la dette ou de financer les
investissements, il reste comme solution de faire appel à la BCE, en raison
de ses capacités de création monétaire. Comme André Grjebine, directeur de
recherches à Sciences-Po, l’explique à Ivan Best de La tribune, celle-ci
pourrait être mise à contribution une fois un Trésor européen créé, dont elle
pourrait acheter les titres sans violer l’interdiction qui lui est faite de
financer les États. Le plan peut séduire sur le papier, un mécanisme pouvant
permettre de rembourser la BCE en fonction de l’accroissement de la croissance
résultant des investissements qu’elle finance. Ce qui en passant rappelle un
autre mécanisme, proposé par Yanis Varoufakis, le ministre grec des finances,
qui suggère d’assujettir le remboursement de la dette au taux de croissance
de l’économie. Mais cela représenterait une forme avancée de mutualisation
qui n’est pas politiquement à portée, tant que les compteurs de la dette
n’auront pas été mis à zéro, c’est à dire tant que la consolidation fiscale
n’aura pas été menée à son terme. On se mord le bout de la queue.
Encore un effort, il va falloir être un peu plus pertinent pour expliquer
les raisons de l’atonie de la croissance et pour sortir des eaux troubles sur
lesquelles le système financier navigue. Les taux négatifs en représentent
une éloquente illustration, la Suisse a émis un emprunt sur dix ans assortis
d’un rendement de -0,055 %. Pour l’Allemagne, le rendement d’une émission à 5
ans est ressorti à -0,08%…
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