En l’espace d’une nuit, la Chine a secoué
les marchés du monde en imposant à sa devise sa dévaluation la plus
importante en deux décennies.
Une dévaluation de cette sorte est
supposée améliorer l’économie domestique en stimulant les exportations, en faisant
baisser les coûts de production domestiques par rapport aux autres sources,
et en limitant les importations en faisant grimper leur coût relatif.
En d’autres termes, la Chine a clairement
signalé que le dollar, auquel elle rattache sa propre devise, est surévalué
par rapport à l’économie globale ainsi qu’à son économie domestique.
La Chine est le « canari dans la
mine de charbon » de l’économie globale, une source majeure de main d’œuvre
et d’offre. Sa propre économie souffre de la baisse de la demande
internationale.
Pourquoi la demande baise-t-elle ?
Parce que les corporations multinationales et le système bancaire ont
financiarisé tout ce qu’ils ont pu pour accroître les profits des entreprises
et le capital d’une poignée d’individus, aux dépens de tous les autres.
Si plus personne n’a d’argent à dépenser
et que plus personne ne peut accroître son niveau d’endettement au service de
la consommation pour des raisons de frais trop importants, que pensez-vous qu’il
arrive à la demande ?
Rien de nouveau sous le Soleil. Cette
situation n’est pas inconnue des économistes. Remercions la parade de Wall
Street pour nous avoir remémorés le discours livré par Franklin Roosevelt à l’université
d’Oglethorpe en 1932, au plus profond de la Grande dépression.
« Notre
problème de base n’a pas été une insuffisance de capital, mais une
distribution insuffisante du pouvoir d’achat couplée à une spéculation trop
importante en matière de production. Bien que les salaires aient augmenté au
sein de nombreuses industries, ils n’ont pas augmenté proportionnellement aux
revenus du capital, et le pouvoir d’achat de groupes entiers de notre
population s’est trouvé amoindri.
« Nous
avons accumulé une telle surabondance de capital que nos banquiers se sont
confrontés les uns aux autres, certains ayant employé des méthodes
discutables, dans leurs efforts de prêter ce capital à l’échelle domestique
comme internationale. Je suppose que nous sommes à l’aube d’une
transformation fondamentale de notre pensée économique populaire, et que dans
le futur, nous penserons moins au producteur, et plus au consommateur.
« Peu
importe ce que nous décidons de faire pour redonner vie à notre ordre
économique en péril, nous ne pourrons la porter beaucoup plus loin sans une
distribution plus sage et plus équitable des revenus nationaux. »
Les banquiers ont détourné les yeux de
tous vers leurs débats sur les taux d’intérêt, alors même qu’ils faisaient
gonfler leurs bilans de manière obscène, au bénéfice des Hommes de la
finance, de l’assurance et de l’immobilier qui achètent des actifs productifs
et établissent des monopoles grâce à ce papier. La Fed est le régulateur clé
du système bancaire. Et elle échoue complètement à jouer son rôle.
Vous n’êtes peut-être pas d’accord avec
les méthodes employées par FDR sous le New Deal, mais je pense que son
analyse est correcte. Andrew Jackson a fait une observation similaire à une autre
époque, et a eu recours à des méthodes différentes pour faire face au
problème.
« Malgré
son grand nombre et le capital dont il dispose, le peuple est constamment en
danger de perdre son influence au gouvernement, et lutte pour maintenir ses
droits face aux efforts incessants de leur porter atteinte.
« Ses
souffrances naissent du pouvoir que les intérêts monétaires dérivent de la
devise papier qu’ils contrôlent, et des privilèges obtenus par les
corporations dans divers Etats, qu’ils emploient dans leurs propres intérêts.
Prêtez plus attention à cet esprit de monopole là où vous vivez, et vous
trouverez que les pouvoirs les plus grands du gouvernement ont été offerts et
distribués librement, et que le contrôle de vos intérêts les plus chers est
passé entre les mains des corporations. »
Le problème n’était pas la monnaie papier
per se, mais la concentration de pouvoir et de capital que le recours
abusif au pouvoir monétaire a pu offrir à une poignée d’individus et d’institutions.
Aucun système n’est protégé face aux groupes peu scrupuleux qui opèrent dans
le secret et sans aucune transparence ou considération pour l’Etat de droit.
Si quelque chose est clair, c’est que la régulation par la Fed et les autres
membres du système bancaire est un échec, et la source de bien des calamités.
La
raison première pour laquelle nous ne pouvons pas prendre en considération
les réalités de notre propre situation est que la classe politique et
financière est aujourd’hui prise au piège dans une trappe de crédibilité.
Elle ne peut pas dire la vérité sans compromettre sa propre avarice et sa
propre soif de pouvoir. C’est une situation dangereuse, puisque FDR était en
quelque sorte une aberration, une étrange combinaison d’avantages personnels
et de souffrance physique profonde, à une époque où sont montés en puissance
de dangereux démagogues, aux Etats-Unis comme ailleurs.
Les implications en seront une
intensification de la guerre des monnaies, à mesure que les puissances
financières amplifieront leur mainmise sur les gouvernements et les systèmes
économiques, et feront gonfler la monnaie tout en en conservant une majorité
pour eux-mêmes de manière à ce que les salaires et les revenus des masses
demeurent trop faibles pour soutenir la reprise économique. La Loi de Say,
selon laquelle une baisse de la production crée sa propre demande au travers
d’une hausse nécessaire des salaires, est un mensonge tout aussi grand que l’hypothèse
d’efficacité des marchés.
Les banques centrales continueront d’influencer
le système, en créant de la monnaie, en levant une taxe sur tous ceux qui
détiennent de leur devise, et en ayant recours à des dévaluations de devises.
Leur jeu de confiance en des administrateurs parfaitement objectifs, qui n’oseraient
jamais jouer le rôle de vice-rois pour les intérêts monétaires, fera bien
plus de perdants que de gagnants. Comme James Montier l’a expliqué dans son essai
:
« De
peur que vous pensiez que je suis injustement dur à l’égard de ces pauvres
banquiers centraux, laissez-moi me tourner vers l’idolâtrie des taux d’intérêt
qui semble caractériser le monde dans lequel nous vivons. Beaucoup perçoivent
les banquiers centraux comme des dieux, ou comme les divinités mineures d’une
sorte de panthéon économique. S’ajoute à cette déification des banquiers
centraux l’idée que les taux d’intérêt soient une panacée.
Quel que
soit le problème, les taux d’intérêt pourront le régler. L’inflation est trop
élevée ? Faîtes grimper les taux. L’économie est trop molle ?
Faîtes baisser les taux. Une bulle éclate ? Faîtes baisser les taux. Et
ainsi de suite. John Kenneth Galbraith nous a poétiquement expliqué qu’ils
sont « notre forme de fraude la plus prestigieuse, notre évasion la plus
élégante de la réalité… La seule difficulté, c’est qu’il est hautement
probable qu’un processus tout à fait acceptable n’existe que dans la pensée
économique établie, et non dans le monde réel. »
La Chine
aurait apparemment commencé à mettre à jour les achats d’or officiels de la
Banque populaire de Chine, du moins selon les
dires T. Ferguson. Voilà un certain temps que nous n’avons plus entendu
parler de Koos Jansen, j’ai hâte de savoir ce qu’il en pensera.
Restez aux aguets. Les choses ne font que
commencer.