La prétendue loi de Volker,
chargée du contrôle (ha !) des pratiques bancaires et approuvée la
semaine dernière par un petit groupe de directeurs d’agences de régulation fédérales,
est la plus récente farce que les Etats-Unis ont élaboré contre eux-mêmes
dans ce qui est devenu le plus grand exercice d’autodestruction de tous les
temps.
Tout d’abord (et il y a
beaucoup d’ensuites), cette loi nous arrive sous
forme de près de 1000 pages de jargon légal incompréhensible attachées à la
déjà obèse réforme Dodd-Frank Wall Street
(ha !) et à la loi de 2012 sur la Protection des Consommateurs
(ha !) qui contenait déjà 2000 pages, sans compter les énormes piles de
présages et d’interprétations mandatées, dont la loi Volker n’est qu’un
exemple. Ces additions ont été requises parce que la loi Dodd-Frank
elle-même ne définissait pas vraiment de mesures de mise en application et
laissait plutôt les agences régulatrices en inventer les règles – ce qu’elles
ont fait avec l’aide d’avocats-lobbyistes nommés par les banques elles-mêmes.
Cela signifie que les lobbyistes ont rédigé la loi Dodd-Frank
et toutes ses clauses, et donc que les banques ont établi les règles. De quoi
accabler votre crédulité ? C’est pourtant le genre de nation que sont
devenus les Etats-Unis : tout peut arriver, et rien n’a d’importance. Il
n’y a plus de Loi, rien que des prétendus.
La loi de Volker est une
tentative boiteuse de restaurer le cœur des provisions Glass-Steagall de la Loi Bancaire de 1933, qui ont été abrogés
en 1999 suite à l’effort cynique de l’estampeur de Wall Street Robert Rubin
et de son bras droit Larry Summers, qui ont tous
deux été Secrétaires du Trésor sous Bill Clinton. Glass-Steagall
a été votée par le Congrès suite à des révélations de mauvaise conduite de la
part de banquiers qui a entraîné l’effondrement du marché des actions de
1929. L’objectif principal de Glass-Steagall était
de séparer le système bancaire commercial (comptes de dépôt et prêts) du
système bancaire de l’investissement (sous-traitance et négoce de titres).
L’idée était d’empêcher les banques d’utiliser l’argent des comptes clients
pour parier sur les actions et d’autres instruments spéculatifs. Cette loi
était destinée à aller main dans la main avec la Federal
Deposit Insurance
Corporation (FDIC), aussi créée en 1933, et de protéger les comptes des
citoyens ouverts auprès des banques commerciales. Les limites de protection
étaient au départ très modestes : 2.500 dollars
au départ, pour passer un peu au-dessus de 40.000 dollars en 1980. Les
banques d’investissement n’étaient pas concernées par Glass-Seagall, puisque leurs activités reposaient sur des paris
de haute qualité.
La loi Glass-Seagall de 1933 était longue de 53 pages et écrite dans
un langage précis, clair et succinct. Elle est restée en application pendant
66 ans. Sur cette période, les activités bancaires étaient assez ennuyeuses,
notamment sur le plan commercial. Elles fonctionnaient sur le principe 3-6-3
– payer 3% d’intérêts sur les dépôts, prêter à 6%, et partir jouer au golf à
3 heures de l’après-midi. Les banquiers gagnaient bien leur vie, mais leur
situation n’avait rien à voir avec les rackets obscènes générés par les
opérations de pillages d’aujourd’hui. Avant 1980, le secteur financier de
l’économie représentait 5% des activités. Son objectif était d’allouer du
capital précieux aux nouvelles opérations productives.
A mesure que le secteur
manufacturier Américain s’est rendu devant les autres pays, il y avait de moins
en moins d’entreprises productives vers lesquelles diriger du capital. Ce qui
restait était le développement de propriétés (les banlieues) et le secteur
financier qui en est à l’origine. La finance a finalement englobé 40% de
l’économie, et le paysage Américain a été détruit. La révolution informatique
des années 1990 a stimulé une vague d’innovation des activités financières.
Cette innovation s’est majoritairement trouvée être une nouvelle espèce de
fraude. Vous comprenez désormais l’histoire de la soi-disant ‘bulle sur
l’immobilier’ et du krach de 2008. Les Etats-Unis ne s’en sont jamais
relevés, et les tentatives de reprise sous la forme de plans de sauvetage, de
QE et de taux d’intérêts à zéro pourcent se sont transformées en rackets
visant à couvrir le papier les échecs nationaux. Tout cela est lié à
l’histoire de l’industrialisation et de sa relation avec les ressources
uniques et limitées d’énergies fossiles dont la race humaine a pu profiter
pendant quelques centaines d’années. Cette histoire commence à se décomposer,
et nous refusons d’accepter la réalité des choses.
L’absurdité de Dodd-Frank et de Volker n’est qu’un autre symptôme de ce
manque tragique d’attention. La prolixité baroque de ces statuts a peut-être
été amusante pour les banquiers qui les ont construits – des milliers de
pages de formules incantatrices insensées visant à contrer toute tentative de
forcer une conduite décente chez les banquiers et leurs supposés régulateurs
– mais elle ne fait rien pour nous aider à affronter la prochaine phase de
l’Histoire.