L’aubaine de la déflation

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Published : March 19th, 2015
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Category : Crisis Watch

Parmi toutes les croyances économiques largement répandues et ô combien erronées se trouve la notion absurde qu’une baisse des prix à la consommation est mauvaise pour l’économie, et que tout doit être fait pour la combattre.

La récente décision relative au franc suisse a fixé les projecteurs sur cette question. Dimanche dernier, j’écrivais par exemple ceci dans Swiss Peg Removal: Did Anyone Win?

S’il est un grand perdant dans tout cela, c’est bien l’industrie du tourisme. Les prix des hôtels ont gagné jusqu’à 40% en Suisse en une seule nuit par rapport aux prix de l’hôtellerie dans les autres pays.

Mais les consommateurs suisses qui achètent des produits importés de France, d’Espagne et du reste de l’Europe en bénéficient énormément.

Mais qu’est-ce qui est le plus important ? Je suggère que ce soit le bénéfice apporté aux consommateurs suisses, du moins dans le grand ordre des choses. Les consommateurs ont plus d’argent à dépenser sur d’autres choses, comme les sorties au restaurant, les hôtels et les vacances.

 

L’aubaine du shopping

Un article intitulé Soaring Franc Creates Bonanza in Swiss Stores a été publié lundi par le Wall Street Journal, qui confirme exactement mes prédictions :

 

La hausse du franc suisse qui a soulevé tout un tollé sur les marchés financiers est une véritable aubaine pour les magasins, où les consommateurs peuvent soudainement obtenir des réductions sur toutes sortes de produits, depuis les légumes jusqu’aux robes de soirée.

Lundi dernier, la chaîne Coop, basée à Bâle, a annoncé avoir réduit le prix de plus de 200 fruits et légumes importés depuis l’Union européenne. La chaîne, qui est le deuxième plus gros détaillant du pays après Migros, a également annoncé de potentielles baisses de prix pour le poisson, le poulet et le fromage.

Coop n’est pas le seul détaillant à se mettre à la promotion. Les magasins de meubles, agences de voyages et boutiques de mode font aussi baisser leurs prix pour attirer des clients.

« Pour nous femmes au foyer, c’est une très bonne nouvelle pour nos achats de tous les jours », a dit Anita Mueller, qui faisait son shopping lundi matin sur Banhofstrasse, l’avenue principale de Zürich.

Même les boutiques de luxe multiplient les promotions. La vitrine de Grieder & Cie., un grand magasin de luxe du quartier commerçant de Zürich, était fardée d’une pancarte indiquant aux consommateurs qu’ils pourraient désormais tirer davantage de leur argent.

« En raison de la hausse soudaine du franc suisse face à l’euro, et pour nous donner le temps d’ajuster nos prix, nous offrons une réduction de 20% sur tous nos produits qui ne sont pas déjà en réduction, et ce pour une durée indéterminée », indiquait la pancarte.

Les consommateurs suisses ont aussi pu tirer profit de la hausse de leur pouvoir d’achat en se rendant en Allemagne. BVB, l’organisme responsable du transport à Bâle, a multiplié le nombre de trams en partance pour la ville frontalière de Weil am Rhein pour accommoder les chasseurs de bonnes affaires qui cherchent à tirer le plus de bénéfices possibles de leurs francs suisses.

 

TUI Suisse, l’un des plus gros organisateurs de voyages en Suisse, a réduit ses prix de 15% sur les voyages tout compris à destination des plages de la Méditerranée. Leurs voyages en Grèce, en Espagne, en Turquie, en Italie et au Portugal sont tous inclus dans cette promotion, qui a été surnommée « remise euro ». TUI Suisse, qui a des succursales dans de nombreux centres commerciaux du pays, a également baissé le prix de ses voyages au Maroc et en Egypte pour tout l’été.

 

Attendons avant de pleurer les exportateurs

Dans Swiss Peg Removal: Did Anyone Win?, j’ai également écrit ceci :

« La sagesse populaire veut que les exportateurs suisses se retrouvent crucifiés et que les consommateurs tirent parti de la situation. Il est clair qu’il y aura un choc initial. Mais sur le long terme, nous devrions voir les choses ainsi : le prix des marchandises qui sont utilisées dans la fabrication de produits d’exportation (le métal des montres et autres appareils fabriqués en Suisse) finira par baisser. »

Attendons encore avant de pleurer les exportateurs.

Dollar vs franc suisse





Jeudi dernier, la valeur du franc suisse gagnait 28% face au dollar. La moitié de cet écart a désormais été récupéré.

Les exportateurs suisses pourront importer des marchandises pour 14% de moins qu’en début de semaine. Ils perdent sur leurs inventaires actuels, mais il n’y a ici rien qui ressemble aux scénarios catastrophes populaires, à l’exception du choc initial survenu sur le marché boursier.

Devinez quoi ?

Les consommateurs achètent ! Ils ont même besoin de trains supplémentaires en partance pour l’Allemagne. Et les autres formes de transport sont aussi en hausse. Qui aurait pu y croire ?

L’idée générale est que lorsque les prix baissent, les consommateurs ne cessent plus d’attendre. C’est une opinion dont je me moque déjà depuis des années.

Une épreuve économique pour les Keynésiens

Revenons un instant sur mon article intitulé Challenge to Keynesians "Prove Rising Prices Provide an Overall Economic Benefit"


Je défie les Keynésiens et les Monétaristes de me prouver qu’une hausse des prix est susceptible de nous offrir un bénéfice économique.

Il ne fait aucun doute que ceux qui ont les premiers accès à la monnaie en tirent parti (les banques, les riches et les différentes branches du gouvernement au travers de la taxation). Mais ces bénéfices existent aux dépends de tous les autres.

La notion absurde derrière les arguments en faveur de l’inflation est qu’une baisse des prix pousse les consommateurs à repousser leurs achats dans le temps et, sur le long terme, contribue à l’effondrement de l’économie.

Quelques questions qui nous ferons redescendre sur Terre

  • Si le prix des produits alimentaires baissait, les gens cesseraient-ils de manger ?
  • Si le prix de l’essence baissait, les gens cesseraient-ils de conduire ?
  • Si le prix des billets d’avion baissait, les gens cesseraient-ils de voyager ?
  • Si la poignée de votre poêle à frire se cassait ou que votre sèche-cheveux rendait l’âme, attendriez-vous avant de les remplacer parce qu’ils pourraient coûter encore moins cher dans un mois ?
  • Si les ordinateurs, les imprimantes, les télévisions et autres appareils électroniques coûtaient moins cher l’année prochaine, et moins cher encore dans deux ans, les gens attendraient-ils avant d’acheter ?
  • Si votre manteau était usé, attendriez-vous une année de plus pour en acheter un nouveau si les prix étaient soldés mais que vous vous attendiez à des soldes plus intéressantes encore dans un an ?
  • Les gens reporteraient-ils leurs procédures médicales pendant aussi longtemps que les prix baisseraient ?
  • Si la théorie de la déflation était correcte, pourquoi les gens font-ils la queue au magasin lorsque les prix baissent ?

Question bonus

Si une baisse des prix pousse les gens à cesser d’acheter, comment se fait-il qu’on vende encore des ordinateurs et des télévisions, dont la qualité augmente et le prix baisse d’année en année ?

 

Les partisans de Krugman applaudissent l’Abénomie

L’idée qu’une baisse des prix à la consommation puisse entraîner une spirale descendante est absurde. Au Japon, tout le monde serait mort depuis bien longtemps si cette théorie était vraie.

Plutôt que d’accepter l’aubaine représentée par une baisse des prix (qui bénéficie clairement aux consommateurs), le Japon s’est battu bec et ongles alors que l’applaudissaient les partisans de Krugman.

Les conséquences du combat du Japon contre l’inflation

  • Le Japon est passé du plus gros créditeur au plus gros débiteur mondial.
  • Son ratio dette/PIB est le plus élevé parmi les nations développées, et s’élève à 250%.
  • Le Japon a dilapidé l’intégralité de son épargne.
  • Et les Keynésiens n’ont cessé de l’encourager ; ils sont allés jusqu’à conclure que le Japon a échoué parce qu’il n’a pas suffisamment dépensé.

Le Keynésianisme dans la théorie et dans la pratique

Selon la théorie keynésienne, les consommateurs repoussent leurs achats dans le temps en période de baisse des prix. Mais dans la pratique, c’est tout le contraire.

Si les consommateurs estiment que les prix sont trop élevés, ils attendent une baisse de prix. C’est ce qui se passe tous les ans à la période de Noël et tout au long de l’année pour les produits qui ne sont pas immédiatement nécessaires.

La grande expérience du système bancaire centralisé

Malgré tout cela, et en ignorant l’échec total du Monétarisme et du Keynésianisme au Japon depuis des décennies, le 15 janvier dernier, Barry Ritholtz, de chez Bloomberg, a fait l’éloge de la grande expérience du système bancaire centralisé.

J’ai défendu le camp adverse dans mon article Grand Experiment Failure; Bankers Prefer Bubbles; Europe is not USA; Final Epitaph.

Faisant l’éloge de la Fed (et pointant un doigt accusateur vers la BCE), Ritholtz a proposé que soit gravée sur la pierre tombale de Bernanke l’épitaphe « Au moins, nous aurons essayé ».

J’ai répondu à son article par ceci :

 

Voilà où se trouve toute l’ironie : « Au moins, nous aurons essayé (de générer une inflation) » n’est pas seulement l’essence de la hausse des écarts de salaires dont se plaint Janet Yellen (entre autres), mais aussi l’essence du problème de la dette qui pèse sur le monde.

Epitaphe final

Ritholtz a proposé son épitaphe. Voici la mienne. Elle s’adresse aux banquiers centraux en général, et est écrite du point de vue des historiens du futur :

« Ces imbéciles pensaient que le monde avait besoin de 2% d’inflation, pensaient qu’ils pourraient mettre fin aux cycles de croissance et de récession, et pensaient qu’ils pouvaient redresser l’économie globale comme ils redresseraient une voiture dans un virage de montagne. Les conséquences ne auront été une série de bulles économiques toujours plus grandes, dont le point culminant aura été la crise des devises de (date) ».

Addendum:

Lacy Hunt, de chez Hoisington Management, m’a envoyé cet intéressant commentaire : « la recherche académique indique qu’aux Etats-Unis, les programmes de QE ont contracté plutôt qu’étendu l’activité économique, comme ça a été le cas au Japon. Ainsi, Steen aurait pu réaliser que quelque chose qui n’est bon ni pour le Japon ni pour les Etats-Unis ne peut pas l’être pour la BCE ».

J’aimerais ajouter que je suis tout à fait d’accord avec Lacy. Les bénéfices économiques des programmes de QE n’ont été qu’une illusion monétaire couplée à des coûts « temporairement » dissimulés.

  1. Bulles sur les actions et les obligations toxiques.
  2. Expansion des inégalités de richesse.
  1. Expansion de la dette qui finira par ralentir la croissance future.

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, les interventions constantes sur les marchés libres n’ont jamais apporté de bénéfice économique de long terme.

Déflation des actifs et déflation des prix à la consommation

Les banquiers centraux à la rescousse – ou non.

Les craintes de voir baisser les prix à la consommation sont infondées.

Ironiquement, en combattant la déflation des prix, les banques centrales génèrent une inflation des actifs, alimentent la volatilité (le franc suisse en est le parfait exemple), génèrent des bulles spéculatives toujours plus importantes (dont l’immobilier est l’exemple le plus frappant), et l’inégalité des salaires.

Lorsqu’exploseront ces bulles, les banques se retrouveront en difficulté pour avoir émis des prêts garantis par des actifs spéculatifs (comme par exemple la bulle sur l’immobilier ou encore les prêts accordés à des puits pétroliers qui nécessitent un pétrole à 90 dollars le baril pour être profitables).

Les banquiers centraux tenteront inévitablement d’adoucir le choc, ce qui encouragera davantage la spéculation. La même chose se produira encore et encore, donnant vie à des bulles toujours plus importantes.

Tribut musical

Malgré la folie du système bancaire, un tribut musical est de rigueur.



Lien vers la vidéo : Bonanza

Autre épitaphe pour les banquiers centraux

Peut-être mon épitaphe proposée plus haut est-elle trop longue. C’est pourquoi je propose cette autre gravure funéraire : « On a tout foutu en l’air ».

 

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Réflexions sur de débat de l’inflation /déflation/stagnation et autres remarques sur l’or, l’argent, les monnaies, les taux d’intérêts et les politiques monétaires affectant les marchés mondiaux.
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