John
Maynard Keynes pensait qu'il avait assez efficacement mis un terme à
l'or en tant qu'étalon monétaire dans les années 1930.
Les gouvernements du monde ont fait de leur mieux pour lui venir en aide.
Mais cela prit bien plus de temps que tous ne se l'imaginaient. L'utilisation
de l'or dans la monnaie s'est maintenue jusqu'aux années Nixon, et ce
fût lui qui finalement régla l'affaire une fois pour toutes. Il
était par là supposé écrire la fin de l'histoire,
et donner naissance un nouvel âge prospère qui est celui du
papier.
Tout
ne se déroula cependant pas comme prévu. Dans les années
1970, le système monétaire se révéla être
un véritable chaos. Ce qu'un dollar valait en 1973 ne serait
aujourd'hui que l'équivalent de 2 centimes, cinq centimes en valaient
un seul, et un centime valait... bien moins que rien. C'est une fiction
comptable qui prît le dessus sur l'espace physique, et ce sans la
moindre raison.
Bienvenue
dans l'ère de la monnaie papier, dans laquelle les gouvernements et
banques centrales sont en mesure de manufacturer autant de monnaie qu'ils le
désirent et ce sans limite aucune. L'or était la
dernière de ces limites. Son ban en tant que standard libéra le
monstre de l'inflation ainsi que Léviathan lui-même.
Mais
devinez quoi? L'or n'est en réalité allé nulle part. Il
y a toujours un choix possible, étant celui que chaque investisseur
embrasse en temps de trouble. Il reste la plus liquide, plus stable, plus
fongible, plus commercialisable, et plus fiable source de fortune de la
planète. Il a une expansion achat-vente bien plus dépendante
qu'aucune autre commodité, dans la mesure où sa valeur se
calcule sur un indice de poids.
Mais
l'or est-il mort en tant qu'outil monétaire? Peut-être que non.
Dès que l'échec de la monnaie papier devient évident,
quelqu'un mentionne l'or puis guette l'hystérie. C'est
précisément ce qui s'est produit il y a quelques jours alors
que Robert Zoellick, directeur de la Banque Mondiale, émettait
quelques bruits étranges en direction de l'or. Il suggérait
vaguement que son prix pouvait être utilisé en tant
qu'étalon afin d'évaluer la qualité de la politique
monétaire.
Que
s'est-il passé? Le ciel lui est-il tombé sur la
tête ? Brad DeLong, de bord Keynésien, a surnommé
Zoellick 'le plus idiot des êtres vivants' et le New York Times a
dépêché une légion d'experts pour nous assurer que
ce standard or ne permettrait pas de changer les choses, placerait la politique
monétaire sous tension, apporterait plus d'instabilité que nous
ne pouvons imaginer, donnerait naissance à une nouvelle la Grande
Dépression, et déboucherait sur toutes sortes de souffrances
humaines importantes.
Cette
petite explosion a cependant prouvé une chose: les journaux,
gouvernements, ainsi que leurs économistes académiques favoris
détestent tous le standard or. Je peux comprendre cela. L'absence
d'étalon or a rendu possible la naissance de ce papier auquel ils
portent tous tant d'amour, dirigé par l'Etat et ses responsables, un
monde de dettes conséquentes, de possibilités infinies
d’endommager la société jusqu’à sa source.
L'une
des explosions les plus comiques vient de Nouriel Roubini, qui a listé
une série de mérites de l'or sans les reconnaitre en tant que
tel: l'or limite la flexibilité et les moyens d'actions des banques
centrales (vérifié!); avec l'or, une banque centrale ne peut
simuler de croissance et gérer la stabilité des prix
(vérifié!); avec l'or, les banques centrales ne peuvent
délivrer de prêt de recouvrement (vérifié); avec
l'or, les banques s'engraissent plutôt que ne ferment leurs portes
(vérifié!).
Son
seul point vraiment négatif était qu'avec l'or, nous avons plus
de cycles économiques, mais il a totalement tort sur ce point, comme
seul un rapide coup d'œil sur les données permet de le
démonter. Comment
quelqu'un serait-il en mesure de prouver que le réveil et l'explosion
de l'une des plus grosses bulles qu'ait connu l'histoire mènera
à nouveau le monde vers sa calamité ? Info
spéciale: l'or n'était autrefois en rien responsable de ce
désastre.
Comme
Murray Rothbard l'a décrété, l'essence de
l'étalon or est qu'il place quelque pouvoir entre les mains des gens.
Ces derniers ne sont plus dépendants des faits et gestes des banquiers
centraux, officiers de trésorerie, et de ce qui se déroule dans
les centres monétaires. La monnaie devient non seulement un outil de
comptabilité mais également une forme réelle de
propriété comme toutes les autres. Il est fiable,
transportable, a valeur universelle, et plutôt que de perdre de la
valeur, il maintient ou augmente sa valeur dans le temps. Sous un
étalon or réel, il n'y a aucun besoin de banque centrale, et
les banques elles-mêmes deviennent comme chaque autre entreprise, et
non une organisation socialiste gigantesque soutenue par des milliards de
monnaie publique.
Imaginez
posséder de la monnaie et la regarder agrandir plutôt que
diminuer son pouvoir d'achat en termes de biens et services. C'est ce
à quoi la vie ressemblerait sous l'or. Les épargnants seraient
récompensés plutôt que punis. Personne n'utiliserait le
système monétaire en vue de voler quelqu'un d'autre. Le
gouvernement serait uniquement en mesure de dépenser ce qu'il
possède et rien de plus. Le commerce international ne serait plus
troublé en permanence par les fluctuations constantes que connaissent
les valeurs de devises.
Bien
sûr la direction de la Banque Mondiale ne parlait pas vraiment d'un
étalon or réel. Il était plus question de l'instauration
d'un contrôle sur les banques centrales qui tendent actuellement
à suivre la Fed dans son projet d'inflation de réserve monétaire
en vue de diminuer le taux de change de leur devise et de subventionner les
exports.
L'institut
Mises a depuis sa fondation excellé en termes d'éruditions et
d’écrits au sujet de l'or. L'étalon or a pour sûr
un passé, mais cela ne le rend en rien moins important. Ceux qui
haïssent l'étalon or du passé n'ont à l'heure
actuelle aucun désir de réforme monétaire
sérieuse.
Nous
devrions nous réjouir dans l'attente du jour où les
autorités monétaires rendront enfin la monnaie papier
directement convertible en or (ou en argent ou quoi que ce soit d'autre). Je
doute que nous ne voyions arriver ce jour d'ici peu. Mais une chose pourrait
bien venir à se produire immédiatement: la libération du
marché et la création d'un certain étalon or permettant
l'innovation réelle que serait le choix de devise. C'est là un
fait que les opposants au standard de l'or seront également en mesure
de supposer, puisque, comme Alan Greenspan l'a lui-même une fois admis,
un peuple s'opposant à l'or s'oppose directement à la liberté
humaine.
Ce
débat ne concerne pas réellement la politique monétaire,
encore moins les aspects techniques de la transition. Il concerne la
philosophie politique: dans quel type de société
désirons-nous vivre? Une société dirigée par un
état continuellement en croissance et tout-puissant, ou dans laquelle
les gens ont une liberté qui soit garantie et protégée?
Llewellyn H. Rockwell, Jr
LewRockwell.com
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