|
Investir
est une décision à long terme. Risquée et longtemps
pesée sous tous ses aspects. Faute d’un cadre législatif
et fiscal stable, les entreprises qui le peuvent, c’est-à-dire
les entreprises étrangères, se retiendront d’investir
dans un pays. La Belgique en est aujourd’hui la preuve.
En
matière de stabilité législative et fiscale, la Belgique
fait en effet figure de très mauvais élève. Le pays est
en proie à une crise politique grave depuis plus de 5 ans. La remise
constante aux calendes grecques d’un nouveau gouvernement suite aux
élections de juin 2010, n’est que le dernier épisode de
la saga belge. Le précédent gouvernement était
déjà paralysé et incapable d’entreprendre, non
seulement la réforme institutionnelle que les Flamands appellent de
leurs vœux, mais aussi les indispensables mesures destinées,
entre autres, à assainir les finances publiques. Une situation qui
effraie les investisseurs étrangers.
Mauvais
bulletin
Ainsi,
avant même les élections de juin 2010, le rapport
d’enquête annuel de la société de conseil Ernst
& Young sur l’attractivité de la Belgique soulignait
déjà le manque
d’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers. Parmi les raisons avancées par le
consultant, l’importance pour ces investisseurs de disposer d’un
cadre législatif et fiscal stable, une exigence peu compatible avec
l’atmosphère de crise politique qui régnait
déjà à l’époque dans le pays. Ernst &
Young attribuait la légère amélioration des chiffres de
l’année 2009 à au calme institutionnel qui
s’était installé après deux années de fortes
tensions et appelait de ses vœux « la formation rapide
d’un gouvernement». Raté. Assez logiquement, l'édition
2011 du même rapport ne laisse aucune place à
l’équivoque. Si les investissements se sont maintenus en 2010,
note Ernst & Young, c’est principalement parce qu’ils sont le
résultat de décisions prises bien avant le début de la
crise. Mais l’avenir s’annonce moins rose, car les investisseurs
se montrent désormais plus que circonspects. « Trois
quarts des 204 chefs d’entreprise interrogés sont d’avis
que l’absence d’un gouvernement fédéral en bonne et
due forme, et l’impasse politique dans laquelle se trouve
aujourd’hui le pays, auront un impact négatif sur le climat
d’investissement ».
D’autres
voix s’élèvent d’ailleurs pour confirmer les
constatations d’Ernst & Young. Ainsi IBM Global Services, qui
publie chaque année Global
Location Trends, une étude sur les destinations
préférées des entreprises, abonde
dans le même sens : la Belgique a
accueilli en 2010 moins de projets d’investissements (166) qu’au
cours des années 2008 (189) et 2009 (177) pourtant marquées par
la crise économique, alors qu’on constate, depuis 2009, une
hausse des investissements à travers le monde. IBM ajoute une cause
majeure à la désaffection des entreprises
étrangères pour la Belgique. Outre le contexte politique tendu,
le coût exorbitant de la main d’œuvre effraie lui aussi les
investisseurs potentiels. Un souci lui aussi récurrent, intrinsèquement lié aux
préoccupations sur l’avenir institutionnel du pays : faute
d’accord gouvernemental, les charges qui pèsent sur le travail
resteront inchangées. L’instabilité politique risque donc
bien à terme de détourner définitivement les
investisseurs étrangers du pays.
Frédéric Wauters
|
|