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L’insolvabilité en question

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Published : July 25th, 2012
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« Et pourtant, les fondamentaux sont sains !» : cette assurance tient lieu de réconfort aux yeux des autorités européennes, prises à contre-pied par la décision de Moody’s de placer « sous perspective négative » l’Allemagne, tout en mettant cruellement en évidence qu’elles ne comprennent pas ce qui leur arrive. Accusant les marchés de « péter les plombs » confrontés à la panique bancaire d’hier. Toute la question est en effet de savoir ce qui doit être rangé dans la catégorie des dits « fondamentaux ».


L’agence de notation, comme c’est sa mission, anticipe sur les conséquences qu’aurait pour l’Allemagne un éclatement de la zone euro, à commencer par une sortie de la Grèce, l’un pouvant déclencher l’autre. Sans emphase, les jours qui viennent vont être décisifs.


Un sauvetage de l’Espagne va devoir d’une manière ou d’une autre être mis sur pied. El Ecomista évoque une version « assouplie », qui serait à l’étude au sein du gouvernement espagnol, qui consisterait à ce que soit dans l’immédiat accordé au pays une ligne de crédit sur laquelle il pourrait tirer pour financer ses proches échéances. Notamment celle d’octobre, d’un montant de près de 28 milliards d’euros. Une manière de gagner du temps et d’éviter un sauvetage à la dimension de la quatrième puissance économique européenne, assorti d’un train supplémentaire de mesures de rigueur, car l’effondrement financier est imminent. Les 18 milliards du fonds réunis avec le concours de la loterie nationale du pays, destinés à soulager les régions espagnoles étant par ailleurs probablement insuffisants, ces dernières demandant les unes après les autres à y puiser. Seul un achat massif de la dette espagnole par la BCE permettrait de détendre la situation et de repousser les échéances, sans rien régler.


Il est également envisagé par Jean-Claude Juncker, chef de file de l’Eurogroupe, de faire la courte échelle à la Grèce, sous la forme d’une « aide intérimaire » qui lui éviterait de faire défaut le 20 août prochain sur le remboursement de 3,2 milliards d’euros d’obligations détenues par la BCE. Un simulacre de négociation permettrait aux autorités européennes de sauver la face et d’éviter l’effondrement, afin de voir venir. Mais c’est tout vu, la question se pose désormais très crûment : faut-il encore verser 35 milliard d’euros à la Grèce, qui vont s’additionner à ce qui a déjà été prêté, et prendre le risque de ne jamais les revoir eux non plus ?


La déclaration de Mario Monti estimant ne pas voir la nécessité de convoquer dans l’urgence un sommet ne peut avoir qu’une seule raison : rien ne serait plus désastreux que d’ajouter à la situation actuelle – où la capitalisation boursière des banques continue de se réduire comme peau de chagrin – un sommet qui n’aboutirait pas à des décisions concrètes et se réfugierait dans de vagues proclamations. En attendant, la prochaine réunion des ministres des finances est programmée pour la fin août, autant dire une éternité.


Le Conseil constitutionnel allemand ne rendra son avis à propos de la constitution du MES – le nouveau fonds de soutien européen – que le 12 septembre prochain, ce qui permet d’envisager, dans la plus optimiste des hypothèses, qu’il puisse être à pied d’œuvre fin septembre. D’ici là, il faut tenir. Ne disposant que d’un pare-feu aux moyens limités, et dont les fonds vont devoir être utilisés avec parcimonie en attendant que le suivant prenne la relève, les autorités européennes se retrouvent avec sur les bras la construction d’une union européenne renforcée dont seules la fondation de l’austérité budgétaire prend tournure. Les architectes restent en désaccord sur les plans de la maison et sur l’ordre dans lequel les travaux doivent être effectués.


Hier, les marchés étaient en panique, aujourd’hui ils sont fébriles. Dans quel état seront demain les autorités européennes ? La solvabilité de l’ensemble de la zone euro est en question et le refinancement de sa dette globale ne fait que repousser le dénouement. Laisser chacun en tête-à-tête avec propre fardeau ne produira pas non plus les meilleurs effets.



Billet rédigé par François Leclerc


Son livre, Les CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de paraître


Un « article presslib’ » est libre de reproduction numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.


 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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