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L’interventionnisme
est une doctrine politique préconisant que l’État corrige
les défaillances du marché. Cette intervention est nécessairement
coercitive, mais justifiée par la prétention à corriger
un mal plus grand. La doctrine conclut rapidement aux défaillances du
marché et plus rapidement encore prétend le remplacer. Elle s’enrobe
d’une fausse morale pour mieux se vendre. N’en soyons pas dupes,
car il s’agit d’une croyance fondée sur une
incompréhension de l’action humaine. Voyons quelques-unes de ses
prétentions dans le domaine de l'emploi.
Assurance emploi
Le programme
d’assurance emploi, au Canada, se divise en deux volets:
l’assurance proprement dite de recevoir un montant d’argent
advenant la perte d’un emploi et l’aide à la
réintégration au marché du travail. Au Québec,
à la différence des autres provinces canadiennes, ce dernier
volet relève de l’autorité provinciale. En 1997, le
gouvernement fédéral répondait ainsi à une
demande dite «traditionnelle» du Québec. Il y a de ces
traditions dont on se passerait!
La nouvelle organisation n’est guère mieux que la
précédente. Il vaudrait mieux l’abolir. Idem pour son
frère fédéral. Il en coûterait beaucoup moins cher
aux contribuables si les travailleurs étaient libres
d’adhérer à l’assurance publique, sans compter que
cela lui donnerait plus de légitimité. De l’assurance
privée à cet effet existe déjà et pourrait
très bien remplacer le système actuel. De plus, à la
différence du système actuel, l’assurance privée
vous offre la garantie que vos contributions ne servent qu’à
cela plutôt qu'à renflouer les coffres de l'État.
Plus les politiciens se disent généreux envers les
chômeurs, plus ils doivent taxer les autres et plus ils taxent, plus il
y a de chômeurs. Plus vous offrez une période prolongée
de prestations ou des montants élevés, plus les gens attendront
le «bon» emploi. Il n’y a pas de problème à
prendre le temps de chercher un emploi particulier, mais que les coûts
de cette attente soit compensés par l'argent des autres remet en
question sa légitimité. Au-delà du problème
éthique, suffisant pour rejeter ce système, il est inefficace
car il n’aide pas l’emploi. Non seulement ne l’aide-t-il
pas, mais il le réduit, car il reste moins de capital, humain et
monétaire, pour la création de richesse qui seule permet
l’emploi.
Aide à
l’employabilité
En ce qui a trait au
volet «aide à la réintégration», elle peut
se résumer à diverses formes de subventions,
c’est-à-dire de l’argent soutiré aux uns et
redistribué aux autres. Emploi-Québec en est l’agence
attitrée. Ces subventions sont offertes aux individus et aux
entreprises sans but lucratif. Les entreprises privées,
majoritairement à but lucratif, sont aidées indirectement par
l’entremise des subventions offertes aux individus. Précisons
que l’entreprise privée est également aidée par
d’autres organismes gouvernementaux, quand ce n’est pas de manière
ad hoc. Les sociaux-démocrates détestent le capitalisme, mais
curieusement ils sont toujours prêts à le subventionner.
Emploi-Québec travaille en collaboration avec l’aide sociale,
erronément appelée «assistance-emploi». Je dis
erronément, car l’aide financière publique, l’aide
sociale, assiste très peu les gens à trouver un emploi. Les
dirigeants gouvernementaux semblent avoir choisi la nouvelle appellation pour
laisser croire aux contribuables qu’ils veillent à transformer
les prestataires en travailleurs. Les gouvernements sont très forts en
marketing, mais très faibles en résultat. Voyons un peu ce que
fait cette agence.
Formation de la
main-d’oeuvre
Au Québec, la
loi 90 exige des entreprises qu’elles déboursent au moins 1% de leur
masse salariale pour former leur personnel. Le gouvernement croit-il que les
dirigeants d’entreprise ont choisi des incompétents pour tenter
de faire des profits? Imaginez le fonctionnaire qui va enseigner au
capitaliste comment faire des profits. Il lui dit: «Toi, le
capitaliste, tu ne sais pas comment faire des profits. Tu es stupide, mais
compte-toi chanceux, je suis là pour t’aider. Tu vas investir
une partie de tes profits à former tes employés, car là
est le secret de la réussite. Et si tu ne fais pas comme je te
demande, je te prends ton fric.»
Cette loi n’aide pas l’emploi. Au contraire, elle réduit
les possibilités de l’employeur d’en créer de
nouveaux en temps opportun, car il ne lui est pas nécessaire de
débourser constamment en formation pour prospérer. Il
s’agit là d’un mythe. Cette loi, qui n’est rien
d’autre qu’une taxe, constitue une ingérence dans les
affaires de l’entreprise qui peut la conduire à la faillite. Les
seuls emplois qu’elle maintient sont ceux des fonctionnaires qui
veillent à son application. Non seulement elle ne remplit pas son
rôle, mais elle est destructrice d’emploi.
Aide à la
formation
La formation est
également offerte aux individus par l’entremise de
l’agence. L’aide qui s’y rattache se présente sous
forme d’allocation non remboursable au client – disons une bourse
hebdomadaire. Ajoutons que dans la majorité des cas, les coûts
de la formation sont assumés par le gouvernement. Dans la
région de Montréal, cette aide constitue quelque 80% du budget de
l’agence. Le nom d’«Emploi-Québec» est donc
lui aussi trompeur, puisqu'il y a déjà un ministère,
celui de l’Éducation, qui apporte une aide financière aux
étudiants. Un nom différent permet de laisser entendre à
la population que le gouvernement s’occupe de l’emploi. Or,
Emploi-Québec n’est pas du tout structuré pour trouver de
l’emploi aux gens et ne l’était guère davantage
lorsque l’organisme était sous la gouverne fédérale.
Cette agence et ses partenaires, qui vivent pour la plupart des contrats que
celle-ci lui accorde, donc de fonds publics, font énormément de
discrimination, mais ils prétendent qu’elle est
«positive». Les agents qui y travaillent se font endoctriner
à l’idée que sans cette discrimination réparatrice
le mal serait partout. C’est qu’il est sous-entendu que les
Québécois «pure laine» sont racistes et sexistes.
Par chance, le gouvernement et ses partenaires sont là pour
«renverser» cette situation en engageant une proportion plus
grande de femmes, de «minorités visibles» et de gens
«à mobilité réduite» que ne le justifie leur
nombre au sein de la population(1).
Cela permet au
gouvernement de dire à la fois qu’il crée de
l’emploi et qu’il fait preuve d’une morale plus grande que
le secteur privé. Le gouvernement peut se permettre d’agir
ainsi, car la compétence des agents d’aide à
l’emploi n’est pas très importante. Le travail ne consiste
qu’à redistribuer la richesse à la clientèle qui
en fait la demande. Les employés de ladite agence tenteront de
s’en défendre en prétextant qu’ils travaillent
beaucoup, mais le nombre d’heures travaillées n’est pas un
gage de qualité, ni même d’utilité. Ils doivent
leur emploi à la coercition de l’État et rien d’autre.
Malgré les apparences, le syndicat qui les représente n’a
qu’un rôle marginal à cet égard.
Étant donné que le service est offert grâce aux fonds
publics et au pouvoir de réglementation, il ne répond pas aux
véritables besoins. En tentant de servir par la voie
réglementaire le gouvernement finit par servir une clientèle
qu’il ne cherchait pas à aider. Ludwig von Mises qualifiait ce
type de gestion de «gestion bureaucratique». Celle-ci produit
inévitablement des effets indésirables. Seule une gestion
axée sur le profit permet une juste allocation des ressources.
Celle-ci répondra d'autant plus aux besoins si le gouvernement ne
contrôle pas les prix. Cela ne signifie pas que tout dans la vie se
ramène à une question de profit, seulement que
l’échange des biens et services qui n’en tient pas compte
n’a comme seul recours pour affecter adéquatement les ressources
que les lois, règles et règlements.
Effets
indésirables
Illustrons les
effets indésirables de ce type de gestion chez Emploi-Québec.
L’agence prétend cibler une clientèle, mais en discutant
avec ses employés et en scrutant ses lignes directrices on se rend
compte que les critères d’admission sont flous et uniquement
basés sur la parole des gens. Par conséquent, n’importe
qui peut se prévaloir des services. D’ailleurs, pour les
politiciens, tout ce qui compte est que le budget soit dépensé;
ils pourront ainsi pavoiser au petit écran en prétextant
qu’ils font beaucoup pour l’emploi.
Les formations et les clients qui les suivent sont payés par les
contribuables. Une femme abandonne une formation parce qu’elle doit
accoucher? «C’est pas grave, on recommencera dans deux ans. En
attendant, allez demander des prestations de maternité ou d’aide
sociale.» Certaines recommencent ce manège pendant vingt ans.
Vous devez quitter la formation pour retrouver votre père malade
à l’autre bout du monde? «Bien, on recommencera plus
tard.» Les fausses déclarations des prestataires restent le plus
souvent impunies, car ils sont prestataires. Un client abandonne une
formation parce qu’elle ne lui convient plus? «Bon, alors on va
vous diriger vers un orienteur afin que celui-ci puisse vous
guider».
Les fonctionnaires s’aident toujours entre eux. Ils se renvoient ainsi
les prestataires. «Je te l’envoie pour l’orientation, tu me
le retournes en précisant la formation qu’il
désire.» Une subvention avec ça? Les fonctionnaires
développent l’emploi, plus particulièrement le leur.
Plusieurs clients sont satisfaits, car il s’agit d’une prise en
charge qui n'a pas la connotation négative associée au statut
de bénéficiaire passif d’aide sociale. Cependant, si un
agent du gouvernement ose dire non à un prestataire, celui-ci peut
toujours faire appel à un autre fonctionnaire, un superviseur, voire
un avocat de l’aide juridique. Ainsi, il arrive que se retrouvent
ensemble trois personnes vivant de la taxation, qui se battent entre elles
pour savoir combien il faudrait encore soutirer aux contribuables. L’avocat
de l’aide juridique n’est pas le dernier recours du client
récalcitrant, car il peut toujours demander l’aide d’un
autre individu qui vit de l’argent des autres: son
député. Ne cherchez pas la loi de la jungle dans le
marché, car elle se trouve dans le secteur public.
Une autre façon pour le client d’obtenir ce qu’il
désire est de revenir constamment sur les lieux, quitte à
changer d’agent, car il est défendu à celui-ci de refuser
de rencontrer un client. Les superviseurs et la direction voient d’un
mauvais oeil un agent qui refuse la demande d’un client. Il faut
comprendre que dans l’enceinte gouvernementale la morale
sociale-démocrate est presque unanimement partagée.
Le client arrive-t-il constamment en retard à ses rendez-vous?
L’agent devra le rencontrer, si ce n’est pas le jour même,
alors une autre fois. Plusieurs agents finissent par leur dire oui, question
de s’en débarrasser. Mais cela ne dure qu’un temps, car
plusieurs de ces clients reviendront quelques années plus tard. Selon
le gouvernement, l’argent du contribuable est bien géré
et les pratiques d’Emploi-Québec préparent les gens pour
l’emploi.
Les employés de l’agence se rendent-ils compte de leur
inefficacité? Ne vous laissez surtout pas berner par leurs
statistiques sur l’emploi, car il est impossible d’attribuer
à leurs services la création d’emploi. Un client qui se
trouve un emploi comme manoeuvre après avoir étudié en
télécommunication améliore les statistiques, mais
n’a aucun rapport avec le service (formation) rendu. On ne peut
davantage établir un lien de cause à effet pour celui qui se
trouve un emploi dans son domaine après une période
prolongée de recherche, car cet emploi peut être attribuable
à plusieurs facteurs. Pis encore, le système informatique, qui
sert à établir le nombre d’emplois créé,
est sujet à une multitude de manipulations de la part des gens qui y
ont accès. Inscrire faussement qu'un client a obtenu un emploi est
souvent la seule option qui permet à l'agent de mettre un terme au
suivi d'un éternel chercheur d'emploi.
Les employés de l’agence aident bien certains clients, mais
à quel prix? Pour plusieurs d’entre eux aider n’a
qu’une seule signification: donner. Ils se disent généreux,
alors qu’ils distribuent l’argent des autres. Ils se pensent
indispensables, alors qu’ils vivent de l’argent des autres. Ils
prétendent aider l’emploi, alors qu’ils lui nuisent. Bref,
ils sont endoctrinés aux idéaux sociaux-démocrates.
Un appauvrissement
moral et économique
L’intervention
de l’État dans le domaine de l’emploi réduit le
nombre d’emplois en incitant les gens à chercher plus longtemps,
voire à chercher l’impossible. Elle offre aux gens la possibilité
de vivre de l’argent des autres. Les gens qui vivent ainsi auront
tendance à se morfondre, à se plaindre, à
développer de l’agressivité, à faire des enfants
qui risquent d’être aux crochets du contribuable pendant de
nombreuses années, etc. En somme, l’intervention de
l’État sur l’emploi conduit à un appauvrissement
autant moral qu’économique.
De manière générale, les étatistes
prétendent que le marché privilégie les uns au
détriment des autres, mais c’est faux. Il enrichit certains
davantage que d’autres, mais tout le monde en bénéficie.
C’est fort différent. Ces mêmes gens prétendent que
l’interventionnisme se fait peut-être aux dépens de
certains, mais au bénéfice de plusieurs. C’est oublier
que, dans un régime interventionniste, les bénéfices des
uns se font au détriment des autres. Bref, les
sociaux-démocrates ont tout à l’envers.
1.
Pour le gouvernement, la «minorité visible»
n’est qu’une autre appellation pour dire «minorité
culturelle ou ethnique». Elle renvoie à tout le monde sauf
l’homme blanc d’Amérique du Nord et d’Europe. >>
André Dorais
André
Dorais a étudié en philosophie et en finance et vit à
Montréal.
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