Depuis l’avènement des taux d’intérêt négatifs, la
plupart des actifs qui étaient jusqu’ici boudés en raison de leur faible
rendement (voire de leur absence de rendement) sont de nouveau prisés par les
investisseurs. Parmi ces produits, l’or recommence ainsi à susciter
l’intérêt, et pas seulement auprès de ceux qui connaissaient déjà son rôle de
stockage patrimonial.
Ainsi, plutôt que de sombrer dans les affres de l’épargne qui appauvrit,
on voit de plus en plus d’experts financiers proposer l’or comme
alternative de placement, au moins le temps que la situation
économique et financière revienne à la normale. En effet, mieux vaut
aujourd’hui acheter de l’or même s’il ne rapporte rien plutôt que de perdre
de l’argent en le prêtant aux banques. Car, pour ceux qui auraient perdu de
vue cette notion élémentaire : tout placement financier est un moyen pour les
banques d’attirer des capitaux contre rémunération. Et aujourd’hui, cette
rémunération est au mieux nulle, au pire négative… de surcroît, sans
aucune garantie de récupérer son capital.
Un investissement à échelle humaine
Toutefois, ce n’est pas la seule raison qui incite à penser que l’or
pourrait bien trouver une place au rang des investissements rentables. Et
l’une de ces raisons tient justement à la pire dérive des méthodes de
trading aujourd’hui en vigueur : les THF. Derrière ces trois
lettres, se cache le trading haute fréquence (ou HTF en
anglais, pour high-frequency trading), qui se caractérise par l’exécution à
grande vitesse de transactions financières à travers le monde, mais des
machines, des ordinateurs qui jouent sur des microsecondes pour capter
les variations infinitésimales des valeurs boursières à la hausse ou la
baisse. Dans un tel contexte, seuls les mouvements qui s’étalent sur
plusieurs heures, voire plusieurs jours, restent encore à la portée des
opérateurs humains. Et c’est justement dans ce cadre qu’évoluent actuellement
les cours de l’or ou de l’argent.
Pendant longtemps, les métaux précieux connaissaient assez peu de
fluctuations par rapport aux autres grands indicateurs dont se servent les
investisseurs pour juger de la pertinence de leurs placements.
Au mieux, l’or suivait le coût de la vie et c’est même ce qui faisait sa principale
force : garantir la valeur d’un patrimoine à travers le temps.
Mais aujourd’hui, l’or redevient un actif presque spéculatif. D’abord parce
qu’il est déconnecté des politiques monétaires mais aussi et
surtout parce que les marchés traditionnels sont devenus à ce point
« automatisés » qu’ils ne répondent presque plus aux modèles
patiemment élaborés depuis des décennies par les théoriciens de la finance.
Des mécanismes qui permettaient jusqu’ici d’anticiper, d’analyser et de jouer
quasiment avec ou contre les tendances afin d’en tirer un intérêt
substantiel. Un « jeu » devenu pratiquement impossible dans un
univers d’octets et de microsecondes qui voit s’échanger des
milliards de dollars chaque instant sur un seul centième de pourcent
dans un sens ou dans l’autre.
L’or redevient un actif « classique »
Dès lors, pour peu que l’on prenne le temps de sortir des marchés
« classiques », on retrouve assez rapidement une certaine logique
dans la manière dont l’or se comporte, en dépit des manipulations
grossières dont se sont rendues coupables quelques grosses
institutions telles que la Deutsche Bank ou la Bank of Nova Scotia par
exemple (laquelle vient d’ailleurs de rendre publics des courriels internes
attestant des manipulations de cours dont on l’accuse depuis deux ans). Mieux
encore, alors qu’on avait pris l’habitude de le voir relativement stable, l’or
connaît depuis quelques mois des variations de plus en plus régulières et
significatives (comme par exemple la baisse soudaine des cours
survenue la semaine dernière, suivie d’une reconsolidation brutale cette
semaine), lesquelles sont de plus en plus directement liées à l’environnement
financier mais aussi stratégique et politique à l’échelle de la planète.
Ainsi, il devient possible de traiter avec l’or comme on le fait avec
d’autres actifs plus traditionnels, en l’achetant à la baisse et en le
revendant à la hausse, ce que certains ne se sont pas privés de faire depuis
le début de l’année 2016, expliquant en partie les fluctuations de plus en
plus larges de son cours.
Certes, il reste encore à comprendre le mécanisme qui sous-tend ces
variations, et ceux qui ont tenté de le rapprocher des modèles ou des
référentiels connus en ont été pour leurs frais. Mais sans que cela nuise à
ses qualités intrinsèques de valeur-refuge et de réserve
de valeur inaltérable, l’or est en train de prouver à tous qu’il est
loin d’être cette « relique barbare » d’un autre âge et qu’au
contraire, il peut parfaitement,nt s’inscrire dans une stratégie
d’investissement moderne, lucide… et même rentable.