« L’or
est-il vraiment où il devrait être ? » C’est bien là la question du
moment, l’épicentre de tout ce qui est sur le point de se passer ! Avant
de nous lancer dans le vif du sujet, j’aimerais séparer cette question en
plusieurs parties. Quel or ? L’or de qui ? Et où ? Les
réponses sont, respectivement, votre or, celui de votre pays, l’or qui est
dit être déposé dans des coffres et garantir certains « reçus »
comme ceux du Comex et de GLD. Cet or se trouve-t-il vraiment à New York,
Zürich, Londres, Dubaï, Shanghai et ailleurs ? C’est un sujet assez
vaste, je l’admets, et je m’excuse par avance si je passe au-dessus de
certains points, mais c’est aussi un sujet qui est aujourd’hui plus important
que jamais, chose que j’expliquerai dans une deuxième partie.
Comme
vous le savez certainement, le marché de l’or est de loin le plus
« confidentiel » de tous. La question la plus évidente à se poser
concernant l’or (parce que les Etats-Unis en sont le plus gros propriétaire)
est de savoir pourquoi il n’y a pas eu d’audit de Fort Knox et des autres
centres de dépôt américains depuis 1955. Nous avons pu entendre dire qu’un
audit reviendrait trop cher. Vraiment ? Nous pouvons nous permettre de
dépenser des millions (voire des milliards) de dollars pour construire des
ponts pour relier des îles désertes et étudier les effets de la consommation
de brocoli sur la vie sexuelle des girafes, mais un contrôle des réserves des
Etats-Unis serait « trop cher » ? L’or n’est tout simplement
pas là où il devrait se trouver, et si ce fait était prouvé ou rendu public,
la valeur du dollar s’évaporerait… tout comme ceux qui actionnent les leviers
financiers.
Au
cours de ces deux derniers mois, nous avons assisté à des déplacements d’or
plus rapides et plus larges qu’à n’importe quel autre moment depuis 1971. Les
Pays-Bas ont selon les dires rapatrié 122,5 tonnes d’or depuis New York, et
les Allemands viennent de récupérer 85 tonnes d’or depuis New York et Paris.
L’année dernière, à cette époque, les Allemands annonçaient n’avoir reçu que
5 tonnes d’or, ce qui en a fait sourciller plus d’un. Je rapportais alors
qu’un Boeing 747 est capable de transporter 123 tonnes d’or (êtes-vous prêt à parier que les Hollandais ont reçu leur
122,5 tonnes d'or en une seule fois?).
L’année
dernière, 5 tonnes d’or ont également été « refondues », ce qui a
soulevé quelques questions. Plus récemment, ce sont 50 tonnes d’or qui ont
été refondues avant d’être livrées, pourquoi ? Pourquoi ne pas se
contenter de renvoyer les barres originales qui ont été « conservées
dans des coffres » pendant tant d’années ? Parce qu’il ne s’agit
pas des barres d’or originales ! Note à part, n’est-il pas étrange que
l’Ukraine ait vu disparaître ses 36,1 tonnes (dont 2 se sont trouvées être de
l’étain couvert de peinture dorée) juste avant que l’Allemagne accuse
réception de 35 tonnes ? Coïncidence, j’en suis certain !
La
semaine dernière, nous avons reçu le dernier rapport de Commitment of
Traders, qui montre que les commerciaux ont accru leur position à découvert
sur l’or du Comex à hauteur de 31.000 contrats… en une semaine ! Voilà
qui représente 3,1 millions d’onces. Les réserves d’or livrables du Comex s’élèvent
actuellement à 770.000 onces d’or. Les commerciaux ont donc accru les
quantités d’or qu’ils pourraient avoir à livrer jusqu’à plus de quatre fois
l’or disponible à la livraison.
En
août dernier, et une nouvelle fois en novembre, j’ai écrit au sujet des intérêts
ouverts sur l’or et l’argent du Comex. Et nous y voilà de nouveau ! Il
ne reste que cinq jours ouvrables avant le premier jour de notice de février
pour l’or. Il existe actuellement 1752.500 contrats ouverts pour février, qui
représentent plus de 17 millions d’onces d’or. Avec seulement cinq jours
restant, il existe environ 25 onces d’or livrable pour chaque once dite
disponible. A chaque fois qu’une situation comme celle-ci s’est produite par
le passé, rien ne s’est passé. Tout comme je le pensais en août dernier, les
positions à la vente sont une sorte de levier par lequel il serait possible
de demander la livraison de métal et de forcer le Comex à faire défaut. Je
pense aussi qu’il est plus probable que ce levier soit actionné aujourd’hui.
Les Etats-Unis ont imposé de nombreuses sanctions à la Russie, et pour moins
d’un milliard de dollars, la Russie et la Chine pourraient mettre un terme au
système financier occidental tel que nous le connaissons actuellement.
Cela
se passera-t-il demain ? Personne ne peut le savoir, mais je pense que
nous verrons ce phénomène se produire dès qu’il n’y aura plus d’or disponible
à la livraison. Souvenez-vous que la Chine (et dans une moindre mesure, la
Russie, qui vient d’acheter 20,73 d’or supplémentaires) importe près de 200 tonnes
d’or par mois. Koos Jansen a rapporté que la Chine aurait importé 70 tonnes
d’or rien que la semaine dernière. Pour mettre ce chiffre en perspective,
sachez que la Chine importerait alors en une seule semaine plus de trois fois
les quantités d’or que le Comex prétend pouvoir livrer. Le monde produit 50
tonnes d’or par semaine. La Chine achèterait donc la production mondiale dans
son intégralité. (Note à part concernant le travail de Koos : il a
demandé à la banque centrale des Pays-Bas si les 122,5 tonnes d’or rapatriées
avaient été refondues ou si elles étaient sous leur forme originale… Il n’a
pas encore reçu de réponse). J’aimerai ajouter autre chose à propos du
Comex : les volumes quotidiens y ont été très bas depuis deux mois. Il
est intéressant de voir les intérêts ouverts des positions à découvert
s’élargir et le prix grimper de 10% avec de tels volumes. Comprenez bien
l’importance de ce paragraphe ; nous vivons dans un monde où un marché
qui dispose du tiers des quantités de métal que la Chine importe en une
semaine détermine le prix sur les marchés globaux. Peut-être que Rob Kirby a
raison et qu’un premium très important est effectivement payé sur les plus
grosses commandes.
Nous
avons également assisté à des mouvements importants sur GLD, qui possédait
autrefois 1.300 tonnes d’or. Ces réserves sont passées à 700 tonnes le mois
dernier et sont désormais de 740 tonnes. Les inventaires de GLD avaient
autrefois tendance à rester stables pendant plusieurs jours avant qu’un
changement soit annoncé. Aujourd’hui, ils fluctuent quasiment tous les jours.
La semaine dernière, 35 tonnes ont intégré les inventaires en seulement trois
jours. D’où provient cet or ? Et dire que les Allemands se plaignent du
cauchemar logistique qu’est le rapatriement de cinq tonnes d’or.
D’autres
récents évènements à souligner sont les nouveaux « collets » et le
GOFO. Il semblerait que nous verrons ces prochaines semaines publiés les
derniers rapports relatifs aux taux du GOFO. Pourquoi sont-ils
discontinués ? Le seraient-ils s’ils étaient positifs et témoignaient
d’une importante disponibilité d’or ? Sont-ils discontinués parce qu’ils
sont incompatibles avec les bas prix et les réserves aujourd’hui dites limitées ?
Et qu’en est-il des fameux collets sur l’or, l’argent et les autres
métaux ? Pourquoi sont-ils nécessaires si la volatilité devrait
s’étendre ? Ces questions sont d’une grande importance. Et le fait
qu’elles se posent simultanément est plus important encore.
Voici
qui conclut notre première partie. Je me pencherais dans la deuxième partie
sur la demande et sur ce que signifierait que l’or « ne soit plus
là ».
Bill Holter