Interview de James Turk, publiée le 12 septembre 2016 sur KWN :
La grande question du moment est de savoir si la Fed va relever son taux
directeur à l’occasion de sa réunion prévue les 20 et 21 septembre. Cette
possibilité fait trembler de peur les marchés.
Je pense que les chances de voir la Fed relever ses taux avant
l’élection de novembre sont proches de zéro tout simplement car ce serait
politiquement intenable. Voici une bonne façon de l’expliquer.
Observez ce graphe ci-dessus provenant des statistiques du
Bureau of Labor. Il représente le nombre total d’employés dans le secteur de
la production de 2006 à aujourd’hui. Aujourd’hui, il y a presque 2 millions
de salariés de moins dans l’industrie qu’en 2006. Il s’agit d’une baisse
effrayante de 14 % alors que les politiciens nous disent que nous connaissons
une reprise économique depuis le crash de 2008.
Du pire moment de la crise, à savoir en 2010, l’emploi dans l’industrie a
connu un rebond, même si ce mot est peut-être un peu fort. Si ce graphe
représentait le cours d’une action, on pourrait parler d’un « rebond du
chat mort ». Il est également alarmant que l’emploi dans l’industrie a
connu un pic en janvier de cette année pour ensuite décliner inexorablement,
baissant de 0,5 % jusqu’à la fin août. Ce déclin est l’un des nombreux
exemples illustrant la faiblesse de l’économie.
La Fed est vraiment coincée
La vérité est que la Fed est prise entre le marteau et l’enclume.
Premièrement, nous assistons à l’échec des politiques keynésiennes. Ils sont
probablement en train de se gratter la tête à se demander pourquoi malgré
toute cette création monétaire et ces interventions pour baisser
artificiellement les taux, ils sont incapables de donner une seconde vie à
l’économie. De nombreux docteurs en économie sont plongés dans le plus grand
des embarras.
Deuxièmement, les décideurs de la Fed savent pertinemment bien que
des taux plus élevés ne feront qu’affaiblir davantage l’activité économique
car le fardeau de la dette est trop lourd à porter. De plus, avec une économie
moribonde, la richesse créée n’est pas suffisante pour servir la dette
actuelle.
Observez simplement l’endettement du gouvernement fédéral américain,
désormais proche de 20 trillions de dollars. Si les taux grimpaient à un
niveau juste, disons 5 %, le coût annuel en intérêts du service de la dette
grimperait d’un trillion, ou peut-être un peu moins si on prend en compte les
obligations à long terme à taux fixe. Pour mettre ce montant en perspective,
comparez-le avec les 3,2 trillions de recettes fiscales que le gouvernement
encaisse chaque année.
Le gouvernement ne baissera pas ses autres dépenses. En conséquence de la
hausse des taux, nous assisterions au creusement du déficit fédéral qui ne
ferait qu’empirer la dette, et donc le coût de son service. Tout cela pour
dire que les acheteurs d’or et d’argent ne doivent pas craindre une
éventuelle hausse des taux.
L’or peut grimper de concert avec les taux
Comme nous l’avons vu dans les années 70, le cours de l’or a grimpé de
concert avec les taux. Mais à l’époque, la situation fiscale du gouvernement
était bien meilleure. Il a pu faire face aux politiques du président de
la Fed Volcker jusqu’à ce que les taux réels (taux d’intérêt moins inflation)
atteignent les 6 %. Volcker inversa la tendance d’une inflation galopante et
sauva le dollar. Mais au prix de faire partir l’économie en vrille
pour connaître la pire récession depuis la Seconde Guerre mondiale.
Cette fois, l’option de Volcker et ses taux élevés n’en est plus une pour
la Fed. Il y a trop de dette aujourd’hui. En bref, quelque chose devra céder,
et ce sera le pouvoir d’achat du dollar. L’inflation est déjà en
hausse ; durant la majorité de cette année, elle a dépassé l’objectif de
la Fed en la matière.
Donc, au lieu de se focaliser sur les taux d’intérêt, les acheteurs d’or
et d’argent doivent se concentrer sur la situation d’ensemble, à savoir un
pays croulant sous la dette, des décideurs de la Fed malavisés pris au piège,
hors d’eux de constater que les dogmes keynésiens insensés qu’ils suivent ne
marchent pas, sans parler de la hausse du prix des matières premières et de
l’inflation. Je pourrais poursuivre ainsi, mais je crois que c’est clair.
Tout un chacun a besoin d’or et d’argent pour faire face à la tempête
financière qui s’annonce. »