Il semble que ceux qui
s’opposent à l’or aient trouvé leur mentor parmi
les hommes les plus riches du monde. Le conseiller financier Warren Buffet,
surnommé ‘oracle d’Omaha’, a répétitivement
et publiquement nié le rôle de l’or en tant
qu’investissement, qualifiant les acheteurs d’or de
‘spéculateurs’ et de ‘personnes étant
effrayées de toute autre forme d’actifs’. Dans
l’esprit de Buffet, la hausse du prix de l’or présenterait
des caractéristiques identiques aux bulles des marchés de
l’immobilier et de la dotcom, et le
renversement de sa tendance haussière ne serait qu’une question
de temps. Il ne veut pas dire par là que le prix de l’or
déclinera du fait des mesures d’austérité. Simplement,
comme l’or est l’objet d’une bulle, cette dernière
finira inévitablement par exploser.
Le monde financier
aperçoit Buffet comme étant un observateur objectif, un
investisseur qui, quand il parle, prend en compte les intérêts
des hommes ordinaires. Chaque année, la lettre écrite par
Buffet aux actionnaires de Berkshire Hathaway fait plus de raffut que
l’année précédente. A chaque fois que Buffet fait
la moindre déclaration, le monde financier tout entier roucoule et
répète ses propos sans jamais les remettre en question.
Je reconnais que Buffet est un
investisseur de talent et un très bon orateur. Il est clair
qu’il ait su réussir et qu’il ait beaucoup à
offrir. Mais cela ne devrait pousser personne à penser qu’il est
un observateur de confiance. Il est un membre du capitalisme de copinage
sachant parfaitement maquiller la réalité au service de son
idéologie.
Au cours des premiers stages
de la crise financière, alors que je faisais la promotion de mon livre
Crash Proof, destiné
à prévenir les investisseurs des troubles qui les attendent,
Buffet accumulait les actions auprès de compagnies telles que Goldman
Sachs, Wells Fargo, Bank of America, et General
Electric. Je savais alors que ces sociétés étaient
insolvables, et que je ne m’en approcherai pas, même muni de
gants de jardinage. Lorsque le marché des crédits
commença à rencontrer des difficultés, Buffet mit tout
en œuvre, dans le plus grand secret comme au grand jour, pour que ces
sociétés bénéficient de plans de sauvetage. Et ce
n’était pas une coïncidence. En septembre 2008, Buffet a
clairement indiqué qu’il n’aurait jamais investi
auprès de Goldman Sachs si la société n’avait pas
joui de l’assistance fédérale. En conséquence, il
a pu tirer profit de la situation aux dépens des contribuables, dans
le même temps que ces derniers perdaient leur épargne sur les
marchés. Dans le même temps, de nombreux hommes politiques ont
acheté des actions Berkshire, faisant dans le même leur
révérence à Buffet. Buffet a récemment
déclaré que si les gouvernements ne venaient pas en aide aux
sociétés en banqueroute, il mangerait ‘son repas de
Thanksgiving à McDonald’s plutôt que chez sa fille’.
Il semblerait qu’il y ait eu deux dindes farcies à son
dîner.
Si Buffet était
réellement un capitaliste, il serait favorable à l’or. Il
a pu constater que la valeur du dollar a chuté de 86% depuis
qu’il ait été promu directeur de Berkshire Hathaway en
1965, et a lui-même indiqué dans sa dernière lettre aux
actionnaires de la compagnie qu’il est ‘normal que les
investisseurs aient peur de la monnaie papier’. Il continue cependant
de s’en prendre à l’or. Il semblerait que les seules
unités de compte approuvées par monsieur Buffet soient les
actions de sa propre société !
L’adoption d’une
mesure de valeur indépendante telle que l’or présente
deux problèmes aux yeux de Buffet. Premièrement, cela
réduirait les bénéfices nominaux de sa stratégie
d’investissement basée sur le dollar. Deuxièmement, cela
restreindrait la capacité de Washington à manipuler le
système financier en sa faveur.
Au XIXe siècle, alors
que l’or et l’argent étaient des changes légaux,
les bénéfices extraordinaires auxquels Buffets s’est
accoutumé étaient bien plus difficiles à gagner. La plupart
des gens conservaient leur monnaie sous forme de métal physique ou
auprès de banques – et en tiraient un revenu réel.
Aujourd’hui, sous notre système de devises fiduciaires, les
travailleurs sont forcés d’entrer le monde compliqué de
l’investissement. Cela peut bien sûr générer de
réels profits, mais c’est un terrain de jeu très
compliqué pour les moins expérimentés.
De plus, le système
fiduciaire gonfle artificiellement la part des services financiers dans
l’économie. Au XIXe siècle, les fortunes étaient
plus souvent formées par les chefs d’entreprises que par les
simples investisseurs. Les gens étaient plus en mesure
d’être récompensés pour leur service productif que
pour leur accès direct aux faveurs de la Fed.
Un simple coup
d’œil aux performances de Berkshire Hathaway par rapport à
l’or depuis le début de la crise suffit à comprendre
l’aversion de Buffet pour le métal jaune :
Source:
Google Finance
Mais le manque de
crédibilité de monsieur Buffet va bien plus loin qu’un
simple différent de philosophie monétaire. Depuis août
dernier, on a pu entendre partout dans la presse que Buffet paierait moins de
taxes que sa secrétaire – et demander au passage au
Congrès de voter une ‘loi Buffet’ fixant une taxe minimum
de 30% pour les millionnaires. La réaction naturelle à cela
serait de dire : ‘Si vous voulez payer plus, je vous en prie, ne
vous gênez pas’. Mais Buffet a insisté sur le fait
qu’il n’était pas suffisant pour lui de montrer
l’exemple, mais que tous les millionnaires des Etats-Unis devraient
porter avec lui le fardeau des dépenses excessives de Washington.
Le problème est que
l’argument de Buffet est uniquement fondé sur une
déception. Buffet est considéré être la
troisième personne la plus riche du monde, avec des actifs
d’environ 393 milliards de dollars, et une taxe s’élevant
à seulement 17.4% de ses revenus. La raison à cela est que ses
revenus annuels ne représentent pas plus d’1% de sa richesse,
les 99% restants provenant de ses actions auprès de Berkshire
Hathaway. Buffet dit conserver les revenus de ses actions pour les offrir
à des associations caritatives après sa mort. Donc, ce
n’est pas que les taux d’impositions soient bas, c’est
simplement que Buffet désire offrir 99% de ses richesses.
Mais même en prenant en
ligne de compte sa petite ruse fiscale, Buffet ne comprend toujours que
grossièrement le système d’impositions. Il possède
environ 1/3 des actions de Berkshire, dont les profits sont sujets à
des taxes corporatives s’élevant à 29%. L’an
dernier, Berkshire payait 5.6 millions de dollars de taxes – et la société
devrait selon certaines sources payer un million supplémentaire !
En plus de ces taxes corporatives, Buffet est sujet à des taxes sur
gain de capital de 15% sur ses actions lorsqu’il encaisse son argent,
sans parler de ses taxes sur successions futures. Il semblerait que les taxes
payées par Buffet soient en réalité bien
supérieures à celles de sa secrétaire.
Vous pouvez vous demander
pourquoi Buffet cherche à mieux comprendre son taux
d’imposition. Pour répondre à cette question, il est
nécessaire de comprendre le milieu idéologique dont provient Buffet.
Son père, Warren Buffet, était un membre du Congrès
connu pour être un libertaire. Comme ses biographes l’ont souvent
énoncé, Buffet avait le sentiment d’avoir
été déraciné de sa ville d’Omaha, NE et
forcé de déménager à Washington, DC, et se sentait
étouffé par son strict père. L’engagement de
Buffet envers l’Etat-providence est très profond.
Comme je l’ai
mentionné plus haut, Buffet bénéficie personnellement de
la corruption. Les gains nominaux de ses actions sont la source de son
prestige. Il obtient des plans de sauvetage afin de venir en aide aux
sociétés sur lesquelles il investit.
Il n’est pas surprenant
que notre pauvre Howard ait eu un faible pour l’or et l’argent
– ni que notre riche Warren les rejette comme n’ayant aucune
utilité.
Les médias font passer
Warren pour un demi-dieu, un homme du Nebraska au franc-parler capable de
défendre son propre parti face aux vipères de Wall Street. Mais
il n’est autre qu’un homme ayant le talent de pouvoir faire de la
monnaie, et ses idées ne devraient pas être exemptes
d’analyses. Essaie-t-il de dire qu’il faudrait utiliser
l’argent des contribuables pour payer les plans de sauvetage des
sociétés en lesquelles il investit afin qu’il puisse
continuer d’en tirer profit ? Comprend-il la monnaie ?
Comprend-il le principe de cycles économiques ?
Le prix de l’or ne
diminuera pas avant que les gouvernements ne changent de façon de
faire et réduisent significativement leurs dépenses. L’or
n’est pas dans une bulle. Il est le seul moyen dont vous disposiez pour
protéger votre patrimoine ; et compte tenu de la situation
économique actuelle, il devrait grimper bien plus haut. Il est temps
pour Buffet de prendre en considération les mots de son
père : ‘Si la liberté humaine signifie survivre aux
Etats-Unis, nous nous devons de remporter la bataille et de restaurer une
monnaie honnête’.
Peter Schiff
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