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La confusion comme unique stratégie

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Paul jorion.
Published : February 12th, 2010
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Ce texte est un « article presslib’ » (*)


On ne comptait plus, hier mercredi, les confidences, communiqués et déclarations ou bien les rencontres, déjeuners, téléconférences et appels téléphoniques, étourdi par la fébrilité dont ils témoignent et impressionné par le peu de résultat qui en ressort. Seuls les mails, les SMS et les tweets n’auront pas pu être comptabilisés, les spectateurs de cette cohue débordés. Cette journée aura été l’occasion d’une sorte de mouvement brownien de conciliabules, à propos de la crise de la zone euro ; ainsi que de la Grèce, par qui le malheur est arrivé pour y avoir été appelé avec légèreté, et du soutien qui va devoir lui être accordé, après avoir sur tous les tons juré que l’on ne s’y laisserait pas prendre.

Il faudra attendre le sommet informel de demain, et peut-être même au-delà, pour connaître les mesures de soutien qui seront finalement décidées, car il semble que l’accouchement soit difficile et que seule une déclaration politique européenne, ronflante mais symbolique, soit pour l’instant au programme, un recours au FMI n’étant même pas exclu. Pour le reste, les formules à l’étude sont connues (pour l’essentiel des aides bilatérales, sauf surprise), mais leur mise au point tarde, sans que l’on soit certain qu’elle va être obtenue au finish. On se croirait revenu au temps de ces sommets bruxellois portant sur la taille des mailles des filets de la pêche au maquereau.

Sans doute est-il trop tôt pour épiloguer, alors que le dernier acte n’est pas encore écrit. Mais comment ne pas s’interroger sur les raisons de cette précipitation brouillonne de dernière heure, venant après des jours et des jours de surplace, avant que n’intervienne un tournant à 180 degrés ? Sur les difficultés rencontrées à se mettre d’accord ? Sur l’image d’improvisation que donne cette situation ? Les gouvernements européens, décidément, ne vont pas sortir grandis de cette aventure. Pour s’y être engagés sans discernement et pour tenter de la conclure si confusément.

De premières constatations peuvent cependant être tirées, sans attendre. En premier lieu, les gouvernements de la zone euro ont été les jouets des marchés, fondés à se croire tout permis, seuls des seconds couteaux se risquant à les mettre en cause. Comme s’il était définitivement acquis que, tel une sorte de pouvoir surnaturel, ceux-ci ne pouvaient être dénoncés, ne pouvant être combattus. Exprimant une démission idéologique, politique et morale, ou bien une totale connivence, au choix. Les marchés, disent leurs adorateurs, ont toujours raison. A vaincre sans péril, ils viennent de triompher. Certes sans gloire, mais non sans plus-values.

En second, que ces mêmes marchés anonymes ne sont évidement pas guidés par des pulsions d’ordre psychologique, mais qu’ils sont tout au contraire de froids calculateurs et de vilains raisonneurs. La preuve en a été donnée par le soulagement subitement intervenu sur le marché de la dette souveraine grecque, anticipant des mesures européennes de soutien sifflant la fin de la récréation, dès lors qu’il est apparu vraisemblable qu’elles allaient intervenir. Car elles étaient susceptibles d’infliger des revers de fortune aux spéculateurs qui n’auraient pas sauté du train à temps.

En troisième lieu, cette crise dans la crise – qui n’est pas terminée – a permis de constater à quel point les systèmes bancaires étaient interconnectés entre eux et fragiles, comment le sort d’un pays pouvait rejaillir sur les autres. Que le sort de chaque pays, aussi, était lié à celui de ses banques et réciproquement. Celles-ci étant gavées de titres de la dette publique achetés avec les liquidités de la banque centrale et risquant gros si elles venaient à perdre leur valeur. On a parlé de l’offensive qui menaçait l’Espagne, mais l’on a peu entendu, dans le charivari d’aujourd’hui, Mervyn King, gouverneur de la Banque d’Angleterre, énumérer tout ce qui différencie le Royaume-Uni de ce pays, comme si cela n’allait pas strictement de soi, dans le but de stopper une dangereuse contagion. Quant aux Allemands, qui ont été à la manoeuvre pour enfoncer la Grèce, puis pour lui tendre une main intéressée, ils ont dû se rendre à l’évidence qu’ils allaient finir par se brûler les doigts à leur propre jeu.

Que va-t-il rester du test qui a été engagé avec la Grèce ? La journée de demain ne sera pas de trop pour tenter de lui redonner tout l’écho que l’on en attendait. De communiquer sur la rigueur qui s’abat sur la Grèce et, grâce à un audacieux raisonnement tordant le cou à ce qui s’est passé, de s’appesantir sur ce que l’on risque à ne pas vouloir s’y résoudre. Le tout enveloppé dans l’un de ces nouveaux plans européens, encore moins crédible aujourd’hui que le précédent ne l’a été (La stratégie de Lisbonne). Mais demain sera un autre jour. Il faudra aussi vérifier sur les écrans que les spéculateurs sont allés se coucher après avoir entendu une belle histoire.

Les gouvernements européens n’ont décidément pas la main heureuse ces derniers temps. Afin de disculper le gouvernement français, mis en cause par le rapport 2009 de la Cour des comptes qui lui attribuait une responsabilité dans l’augmentation du déficit public (passé en un an de 3,4 à 7,9% du PIB), le ministre du budget a lundi soir dernier répliqué que celle-ci était « en totalité » le résultat de la crise. Comment ne pas en tirer la conclusion qui s’impose dans ces conditions ? Que c’est aux responsables de la crise de payer en totalité pour les dégâts qu’ils ont commis, et qu’il n’est pas fondé de toucher à la santé, aux retraites et aux programmes sociaux. Quand on cherche à trop démontrer…


Billet rédigé par François Leclerc


               

Paul Jorion

pauljorion.com




(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.


Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).





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