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Ce texte est un « article presslib’ » (*)
A
la suite d’une réunion restée confidentielle qui
s’est tenue dans les faubourgs de Kaboul, à une date qui
n’a pas été dévoilée pour des raisons de
sécurité, les chefs d’Etat et de gouvernement du G2O
viennent de faire une annonce qui en a surpris plus d’un. La crise
majeure que nous connaissons n’aurait été, depuis son
déroulement, qu’un gigantesque Kriegspiel
destiné à tester le système, une sorte de stress test
en grandeur réelle.
Afin
qu’il se déroule dans les meilleures conditions de
confidentialité et donc que l’expérimentation soit de
qualité, il avait été dès son origine
décidé que ce test serait orchestré par l’un des
centres névralgiques les plus opaques de la planète : la United States Federal
Reserve, de son petit nom la Fed, assistée des banques
centrales des pays du G8, ce qui indique que les dirigeants chinois
n’ont pas été admis au statut de meneur de jeu et de
marché, comme l’a confirmé par un communiqué
séparé Dominique Strauss-Kahn, directeur général
du FMI, avant de confirmer qu’il n’excluait pas d’entamer
une réflexion sur certaines échéances
électorales, qu’il n’a pas voulu préciser.
Cherchant
un précédent, afin d’effectuer des comparaisons et de
fonder leurs analyses, les commentateurs ont à cette occasion
rappelé la précédente opération, d’une
envergure comparable mais à une échelle bien plus
limitée, lorsqu’Orson Welles lança sur les ondes de CBS
un reportage sur l’invasion de la terre par les Martiens et suscita une
gigantesque panique, heureusement circonscrite aux seuls Américains
à l’époque, la diffusion par Internet des radios
n’existant pas.
En même
temps qu’un point final vient d’être mis à ce test,
sans qu’il soit pour une fois besoin d’attendre pour en
connaître les résultats, ni de sommer par voie d’huissier
ses organisateurs de les dévoiler, car ils s’étalent sous
nos yeux, il a été annoncé dans le même
communiqué que « des compensations allaient être
versées à tous ceux qui auraient pu subir, en raison de sa
tenue, de fâcheuses conséquences ». Tous les
détenteurs d’un portefeuille d’actifs d’une valeur
initiale d’un million d’euros minimum (1,350 millions de dollars)
recevront ainsi une indemnité compensatoire et non imposable qui sera
calculée – « dans la plus grande
transparence » est-il dit dans la version en langue
française du texte fournie par la présidence de la
République – par les services fiscaux des pays de
résidence respectifs des destinataires. Elle serait financée
par une taxe – d’un montant modique, a-t-il été
indiqué par les services compétents – ayant comme
assiette les revenus salariaux des ménages. Les chômeurs en
seront exemptés lors du premier versement de leurs allocations.
Suite
à cette annonce, le monde s’est réveillé comme
groggy, tandis que les traders de Wall Street et de la City se remettaient
à la tâche après une nuit de folle liesse dont il risque
de rester des traces dans leurs opérations de la journée. Les
bilans des banques avaient été rectifiés dans la nuit
(en utilisant à cette fin les logiciels de programmation de la
valorisation des actifs et en changeant une fois de plus les
paramètres). Des difficultés semblant être
rencontrées sur le marché de la dette souveraine, les
détenteurs de celle-ci refusant de rembourser ce qui est devenu un
trop-perçu. « Donné, c’est donné,
reprendre c’est voler ! » s’est exclamé un
honorable Lord britannique qui a réclamé l’anonymat,
selon le Financial Times. On apprenait enfin que Bernard Madoff,
le talentueux homme d’affaire bien connu, avait été
immédiatement élargi de la prison où il avait
accepté d’être provisoirement placé afin
d’assurer sa sécurité, pour avoir accepté de
prêter son concours (rémunéré) au test. Aucune
réaction de chômeur n’a encore été
enregistrée, car il n’a pas été
précisé s’ils allaient pouvoir se remettre au travail.
Selon une indiscrétion dont a profité Yves Smith, blogger émerite de
« naked capitalism »,
qui cherche un nouveau thème a succès,
les commandes d’impression de millions de « food stamps »
n’auraient pas été annulées par le
département d’Etat à l’agriculture
américain.
La
chancelière Angela Merkel a, dès le
communiqué divulgué, chaleureusement invité son
homologue grec Georgios Papandréou, ainsi
que les autres premiers ministres des PIIGS (qui
n’étaient pas dans la confidence) a une gigantesque Oktoberfest, (fête de la bière),
avancée pour la circonstance au mois d’avril et
déplacée de Munich à Berlin. D’après le
quotidien Ta Nea, les Grecs envisageraient
cependant de maintenir leur demande de compensation à propos de
l’or dérobé par les Nazis, annonçant de prochaines
révélations sur la filière vaticane qui aurait permis de
le convoyer jusqu’à Buenos Aires via Lisbonne au lendemain de la
victoire des Alliés (moyennant une juste rétribution).
Billet
rédigé par François Leclerc
Paul Jorion
pauljorion.com
(*) Un « article presslib’
» est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que
le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’
» qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos
contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait
aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut
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Paul Jorion,
sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix
dernières années dans le milieu bancaire américain en
tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié
récemment L’implosion. La finance contre l’économie
(Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ?
(La Découverte : 2007).
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