Au début des années 2000, j’ai
expliqué à mes associés que nous étions positionnés pour une flambée du prix
de l’or. Beaucoup d’entre eux ont pensé ma suggestion ridicule et n’ont pas
acheté une seule once d’or. Au fil des années qui ont suivi, j’ai continué de
recommander régulièrement l’achat de métal jaune, à mesure que son prix
continuait de grimper. Mes associés n’ont commencé à acheter qu’en 2011,
alors que son prix commençait à plafonner. En 2012, une correction était
attendue. Et elle est arrivée.
De nombreuses années durant, le
prix de l’or s’est maintenu autour de 1.200 dollars – qui est à peu près le
prix nécessaire pour que les sociétés minières daignent continuer d’en
extraire.
A l’époque, l’or a enregistré
quelques hausses périodiques, avant d’être de nouveau forcé à la baisse. Ce
qui est compréhensible. Les banques centrales ont des raisons de vouloir
conserver le prix de l’or assez bas, parce qu’une hausse de son prix rend l’or
plus intéressant que l’accumulation d’espèces auprès de banques. Nous en sommes
arrivés au point où les banques n’ont plus aucun tour dans leur sac pour
maintenir l’économie à flots, et un effondrement est attendu depuis
longtemps.
Mais les effondrements ne se
produisent que peu souvent au moment où ils deviennent chose logique. Tant
que le public continue d’avoir confiance en le système, une économie vouée à
l’échec peut continuer de tituber pendant un temps avant de se renverser. Les
statistiques de l’emploi et de l’inflation peuvent être manipulées (et l’ont
été). Le marché boursier peut-être artificiellement gonflé (et l’a été) afin
que plane une illusion de bonne santé. Ces facteurs, ainsi que le maintien du
prix de l’or à la baisse, permettent de convaincre le public de conserver son
capital auprès des banques, et non sur l’or.
De la même manière qu’en 2000, le
pourcentage de personnes qui comprennent que l’or n’est pas l’équivalent d’une
action, mais une valeur de réserve en période de grandes transformations,
reste très limité – et est très certainement de moins d’1%, voire même 1/10e
d’1%. Ceux qui le comprennent tendent à posséder de l’or sur le long terme,
et ne se sentent que peu concernés par les fluctuations de son prix – même si
elles surpassent 100 dollars sur un mois. Ils sont engagés sur son marché sur
le long terme et pensent qu’un jour, l’or flambera, et sera potentiellement
la dernière réserve de valeur restante après un effondrement.
Mais revenons-en aux
spéculateurs qui ont attendu de voir le prix de l’or flamber pour s’investir
sur son marché. Au cours de ces quatre dernières années, à chaque fois que l’or
était en hausse en conséquence de développements économiques et politiques,
beaucoup d’entre eux en ont acheté davantage, après que son prix a grimpé
significativement. Puis, après qu’il a de nouveau baissé, ils en ont vendu –
souvent après qu’un plancher a été établi.
Ce comportement ne se limite
évidemment pas à l’achat d’or. A dire vrai, un pourcentage très élevé des
investisseurs cherche à jouer sur le marché boursier de cette manière. Ils
attendent que tout le monde achète et qu’un prix grimpe, et achètent souvent
sur marge afin de maximiser leurs positions. Puis, quand la bulle éclate, ils
restent investis sur le marché, espérant en vain voir le prix s’en retourner
jusqu’au niveau auquel ils ont acheté. Ils tendent à acheter élevé et à
vendre très bas.
Ceux qui sont baissiers sur l’or
– les investisseurs qui ne comprennent pas que l’or est très différent des
actions - ont tendance à ressentir de l’aversion envers lui, mais achètent à
un prix élevé lorsque l’achat d’or devient à la mode. Ils vendent également
bas après que son prix a été écrasé. Cette danse ne peut que leur garantir de
perdre toujours plus d’argent au fil du temps.
Cette danse est parfois décrite
comme chasser le marché, ou suivre les tendances. Les courtiers font se
poursuivre cette danse en mentionnant ces tendances à leurs clients, et leur
disant qu’ils ne devraient pas laisser ces opportunités leur passer sous le
nez. Ils sont sur le marché les équivalents de meneurs de danse : « valsez
de droite à gauche, regardez s’envoler ces dollars d’investissement ».
Seuls très peu d’investisseurs
comprennent la nature économique de l’or. Ils ont aussi tendance à ignorer le
fait que leur courtier ne bénéficie pas de leur succès, mais tire ses revenus
de leur fréquence d’achats et de ventes. Un courtier ne peut donc que
conseiller à ses clients de continuer de danser.
Cette danse se poursuivra-t-elle
ad infinitum ? Non. Nous traverserons des transformations drastiques quand
les marchés s’effondreront. A chaque fois qu’un effondrement majeur a lieu,
un mouvement de panique se développe, et l’argent qui reste encore sur la
table se dépêche de trouver un nouvel hôte plus sûr. Suite au prochain
effondrement, une partie de cet argent sera redirigé vers l’or. Le prix de ce
dernier augmentera fortement, au point peut-être qu’il ne soit plus possible
pour les banques centrales de le contenir.
Les baissiers penseront d’abord
à une anomalie. Puis, après que l’or aura franchi les 1.500 dollars, certains
décideront de tremper leurs orteils. Quand il franchira les 1.800 dollars,
ils se décideront peut-être à nager. Après 2.000 dollars, cette tendance se
renforcera. A mesure que la crise s’intensifiera, les actions plongeront
davantage. La bulle obligataire pourra aussi éclater pour faire briller l’or
plus fort encore.
Les banquiers décideront finalement
de geler les comptes, de déclarer des vacances bancaires et/ou de geler les
comptes. Après quoi l’or traversera un épisode de mania qui verra les
baissiers trébucher les uns sur les autres dans une tentative désespérée de
rattraper la tendance.
L’or continuera de grimper pour
maintenir sa valeur en tant que valeur de réserve contre une économie en
déclin. Nous pourrions penser que la situation s’arrêtera là, mais ce ne sera
pas le cas. Ceux qui comprennent l’or mettront fin à leurs achats de métal et
conserveront ce qu’ils auront accumulé. Mais une nouvelle danse commencera
alors. Les baissiers deviendront résolument haussiers. Il est important de
noter qu’à ce moment-là, ils ne comprendront pas la raison pour laquelle l’or
continue de grimper autant, et ne seront certains que d’une chose : il
monte. Ils voudront prendre part à la ruée, et feront tout le nécessaire pour
pouvoir acheter.
L’or physique se fera de moins
en moins disponible, parce que ceux qui en auront ne souhaiteront plus
vendre, quel qu’en soit le prix. Les acheteurs potentiels offriront 50
dollars au-dessus du prix au comptant, et plus encore. Ils achèteront aussi
sur marge afin d’accroître leur position.
C’est à ce moment-là que se
développera la mania. Les prix irrationnels deviendront la norme. Jusqu’où l’or
pourra-t-il grimper ? 10.000 dollars ? 20.000 ? Impossible de
le dire. Il grimpera tant que le désespoir le forcera à la hausse, et il nous
est impossible de déterminer aujourd’hui quelle sera l’ampleur de ce
désespoir.
Une nouvelle bulle naîtra, non
pas sur les actions et obligations, mais sur l’or. Et comme toutes les autres
bulles, elle finira par éclater. Cela se passera quand ceux qui comprennent
la nature de l’or réaliseront que son prix a excédé toute logique et, malgré
leur respect pour le métal, décideront de vendre une partie de leurs réserves
pour investir sur d’autres actifs qui auront tant baissé que leur seule
option sera de remonter.
Il est fort probable qu’ils
conservent une partie de leurs réserves, mais ils n’hésiteront pas à en
vendre une partie lorsque l’or sera devenu significativement surévalué.
En conséquence, la bulle sur l’or
éclatera et les baissiers, très récemment devenus haussiers, se demanderont ce
qui a bien pu se passer. Ils ne comprendront toujours pas l’or. Ils auront
simplement suivi une autre tendance, sans succès.
Moralité ? Un investisseur
ne devrait pas s’impliquer sur un marché qu’il ne comprend pas. Il ne devrait
pas non plus croire que son courtier le comprend pour lui.
Ironiquement, tant qu’il y a eu
des marchés, il y en a eu qui se lancent sur la piste sans connaître la
danse. Les investisseurs sur l’or ont l’opportunité d’enregistrer de gros
profits, mais une majorité quittera la piste les mains vides.