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Fin 2008, l'encours des titres de la dette
américaine fédérale (Treasury securities) s'élevait à
6 338 milliards de dollars, ce qui représentait 59 % de toute la dette
publique américaine, en y incluant celle des États, ou 43 % du
PIB d'alors. En juin 2013, ce montant avait presque doublé et se
situait à 11 888 milliards, c.à.d. 71% du PIB attendu pour
2013. La part de la dette fédérale dans la dette publique
consolidée est aussi passée à 68%. En effet, la
dynamique de la dette publique consolidée a été
déterminée par la variation de la dette fédérale,
dont la hausse de 5 550 milliards de dollars entre décembre 2008 et
juin 2013 représente 83% de l'accroissement de la dette publique
consolidée.
Sur cette période presque quinquennale,
peut-on déceler un changement dans la structure de détention de
ces titres? Le tableau suivant décrit les grandes catégories de
détenteurs de la dette américaine fédérale. En
2008, un peu plus de la moitié de cette dette (51 %) était détenue
par les étrangers. Le reste était distribué entre les
fonds mutuels (12 %), les gouvernements locaux (8 %), les ménages (4
%), les fonds privés de retraite (3 %) et d'autres. Les
autorités monétaires détenaient 7,5% du total.
La répartition a sensiblement changé
en 2013. La part détenue par les étrangers a diminué
légèrement, pour se situer à 47 %. Le grand changement
intervient au niveau de la distribution nationale, où ménages
et autorités monétaires détiennent, à eux seuls,
plus du quart de la dette fédérale, à comparer avec un
peu plus de 11% il y a cinq ans. En pourcentage, les titres
fédéraux détenus par les ménages et les
autorités monétaires ont crû de 397 % et 307 %
respectivement!
Répartition des détenteurs de dette
fédérale américaine
Trois conclusions simples s'imposent.
Premièrement, le désenchantement des investisseurs
étrangers reste à prouver. Il est vrai que sur la
première moitié de 2013, les titres détenus par les
étrangers n'ont augmenté que de 27 milliards de dollars, ce qui
n'était que 8,4% de la hausse totale. Il n'y a cependant pas eu encore
de retrait net de la part des investisseurs étrangers.
Deuxièmement, les autorités
monétaires mènent une politique très agressive d'achat
de la dette fédérale qui a pour objectif d'abaisser les taux
d'intérêt dans l'économie. Depuis juin 2013, l'encours
sur le bilan de la Réserve Fédérale a encore monté
de quelques 206 milliards.
Troisièmement, ce contexte de taux bas
modifie profondément les incitations des épargnants et des
institutions financières. Les ménages semblent
privilégier la dette américaine fédérale (sans
doute au détriment des dépôts bancaires), alors que les
intermédiaires financiers quittent les titres de dette
fédérale (sans doute au profit des actions). Voilà ce
qui expliquerait aussi les nouveaux sommets du Dow et du Nasdaq.
En réalité, tous les
éléments sont réunis pour faire de la dette
fédérale américaine un des investissements les plus
risqués. Si les autorités monétaires se désengageaient
de leur politique actuelle, la hausse des taux d'intérêt ferait
subir des pertes aux investisseurs privés. Si, au contraire, elles
maintenaient leur politique, la bulle financière de tous les actifs en
dollars qui est en train de grandir finirait par éclater tôt ou
tard. Dans un cas comme dans l'autre, les taux actuels sur la dette
fédérale américaine (0,13% sur un an, 1,36% sur cinq ans
et 3,81% sur trente ans) sont totalement déconnectés des
véritables risques associés.
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