C’était attendu, cela s’est enfin concrétisé. Lorsque la BCE a ouvert la boîte de Pandore des taux négatifs en 2014, les banques rechignèrent à répercuter les taux négatifs sur leurs clients. Leur crainte était légitime : en cas de taux négatifs, les épargnants allaient retirer leur argent. Après tout, devoir payer sa banque pour la doter du privilège de détenir son argent est totalement absurde pour la plupart des gens normaux.
Cependant, au fil des années qui passent et des taux qui deviennent toujours plus négatifs, les banques ont dû admettre en douce qu’elles n’ont plus vraiment le choix. Elles ont ainsi commencé par infliger des taux négatifs à leurs gros clients. Tout en espérant ne pas devoir en arriver là avec les particuliers.
En novembre dernier encore, la Deutsche Bank promettait que les taux négatifs ne concerneraient que les grosses sociétés et ses riches clients. Le directeur général adjoint de la banque expliquait ainsi que son institution avait déjà payé des milliards d’euros d’intérêts sur ses dépôts à la BCE. Et notamment plusieurs centaines de millions rien qu’en 2019.
Aujourd’hui, moins d’un an plus tard, la banque basée à Francfort, elle-même en difficulté, a capitulé. Afin de ne pas devoir supporter ces frais, elle a décidé d’appliquer un taux négatif à tous les nouveaux comptes en banque qui présentent un solde supérieur à 100 000 €.
Un porte-parole de Deutsche Bank a déclaré au Handelsblatt :
« La pression continue des taux négatifs oblige la Deutsche Bank à facturer des frais aux nouveaux comptes dont le solde est supérieur à 100 000 € à partir du 18 mai 2020. » Le « taux de dépôt » de -0,5 % correspond au taux que la BCE inflige aux institutions qui utilisent ses services pour parquer de l’argent.
« Cela nous aide au niveau de nos résultats, mais surtout cela va limiter les flux entrants d’épargne qui nous coûtent de l’argent », a écrit Manfred Knof, responsable de la division Particuliers, dans une note à l’attention de ses employés. Cela sera surtout vrai « si la concurrence devait modifier ses conditions, et pousser ainsi sa clientèle à trouver une alternative chez nous ».
Autrement dit, alors que la BCE inonde de liquidités le système financier européen, les banques européennes ne souhaitent pas attirer les dépôts. Pire encore, elles vont déployer des efforts pour dissuader l’arrivée de nouveaux clients, sauf s’il s’agit de menu fretin.
Mais que se passera-t-il quand les banques vont finalement décider d’appliquer ces règles à la majorité de leurs clients en lieu et place des membres du 1 % et des entreprises ?
2 options pour les épargnants
Eh bien, les épargnants, qui possèdent collectivement des trillions de dépôts dans les banques européennes, disposent de 2 options lorsqu’ils deviendront persona non grata :
- Soit retirer leur argent et le conserver dans un coffre-fort hors réseau bancaire (un exercice auquel les Allemands sont bien rodés, notamment depuis la fin 2016 et les rumeurs de failles de la Deutsche Bank, qui déclenchèrent des achats effrénés de coffre-fort en Allemagne). Cela dit, la BCE s’est préparée à un tel événement en ne produisant plus le billet de 500 € ;
- Soit acheter des actifs tangibles alternatifs, l’option la plus probable, car leur possession n’engendre pas de pénalité financière. Par exemple l’or ou même des cryptos.
Si, dans les mois à venir, on assiste à une vague « mystérieuse » d’achats qui dope les prix des actifs non traditionnels sur lesquels les banques centrales n’ont pas de pouvoir, nous saurons pourquoi : cela signifiera que la véritable grande rotation a enfin débuté.
Source : Zerohedge