Première
partie
Alors que le
marché du vin faisait déjà l’objet
d’évolutions majeures (voir la 1ère partie de
cet article), la peste du phylloxéra sera à la fois une
catastrophe pour les producteurs de vins français et une formidable
opportunité de renouveler le marché.
Arrivée
des Amériques, cette épidémie se répand en Europe
à partir de 1858. Elle ne
laissera aucune chance aux
producteurs habitués à une gestion peu rigoureuse de
leurs vignobles qui se retrouvent rattrapés par leurs erreurs de
gestion et font faillite. De même,
les vignerons peut-être plus soucieux de la qualité mais
de plus petite taille ne peuvent faire face aux dégâts
financiers causés par l’épidémie et doivent
aussi abandonner la production.
Seuls les vignerons les plus audacieux sur le plan technique et les mieux
pourvus en capital disposeront des moyens humains et financiers pour faire
face à la peste venue de l’autre côté de
l’Atlantique.
Motivés
par la pression qu’exerce un marché de consommateurs
atterrés de perdre ainsi leur boisson préférée,
les producteurs se lancent dans une bataille désespérée
contre le phylloxéra via un échange frénétique de
leurs réserves de plantes et de leurs techniques. Ces efforts de
coopération ont donné naissance à la technique du
greffage de plantes de vigne européennes sur des racines de vigne
américaines, ce qui permet encore aujourd’hui de combattre
relativement efficacement la fameuse peste.
Une fois le
phylloxéra sous contrôle (il n’a jamais été
définitivement vaincu) et les vicissitudes des deux guerres mondiales
passées, les vignobles de l’Europe de l’Ouest connaissant
un nouvel essor.
L’affluence des troupes américaines en Europe ainsi que
l’intensification des échanges entre l’Europe
Occidentale et l’Amérique vont permettre aux consommateurs
outre-Atlantique de redécouvrir le vin européen. . Au
début, le marché américain reste fidèle au
Chianti italien pas cher. Facile à reconnaitre par sa bouteille
entourée d’un panier d’osier, il est facile à boire, sans grande
personnalité, mais produit en grandes quantités et très
accessible. Sous l’impact de la croissance économique
d’après-guerre, la demande va cependant se montrer plus
exigeante aux États-Unis comme en Europe Occidentale et ainsi faire la
place belle à la patrie des vins fins par excellence
qu’était la France.
Les grands
marchands internationaux connaissent bien les avantages des vins
français. Les techniques productives françaises ont
été améliorées sous la pression de consommateurs
avisés comme ceux de la Cour, de l’aristocratie et de la
bourgeoisie anglaises ; des marchands flamands et enfin de la fastueuse
Cour de France qui dès le XVIème siècle sous François
Ier connaît un renouveau certain.
La
multiplication des richesses lors de la Révolution Industrielle
entraîne une explosion du nombre de consommateurs exigeants de vins
français, ce qui pousse à améliorer encore sa
qualité.
Ainsi, quand
les grands marchands du XXème siècle cherchent un produit
sûr pour satisfaire les préférences du public, ils savent
où le trouver. Pour satisfaire un
marché en demande de
qualité, il n’y avait tout simplement pas mieux que de
lui proposer des vins à la
française. C’est ce processus qui a conduit à une
certaine homogénéisation du vin tant décriée
aujourd’hui.
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