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La fausse rémission

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Published : January 27th, 2012
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Hier, il en était question dans la presse, aujourd’hui il est répondu qu’aucune décision n’est prise à ce propos, ce qui ne vaut pas démenti. De quoi s’agit-il ? Du renforcement des pare-feux destinés à empêcher la propagation de la crise obligataire, à sa généralisation aboutissant à l’éclatement de la zone euro. Devant l’amicale pression de ses collègues, qui la pressent de plus en plus nombreux et l’isolent drapée dans son intransigeance, Angela Merkel pourrait concéder un engagement supplémentaire de l’Allemagne, moyennant des contreparties qui restent à établir. De pure forme destinées l’aider politiquement en Allemagne, ou réelles et aboutissant à renforcer le pacte budgétaire qui avait été desserré ?


Pris dans la nasse et ayant un besoin vital de refinancer la dette italienne à des taux inférieurs à ceux du marché, Mario Monti n’a cessé de faire pression afin qu’une telle décision soit prise, espérant qu’elle contribuerait à leur baisse. Hier, à Bruxelles, il a été plus loin en déclarant à propos de la BCE : “je pense que nous pourrions assister à une évolution [de son rôle]”, en référence explicite à son intervention sur le marché obligataire. Pour justifier cette prédiction, il n’a pas eu besoin de chercher loin, s’appuyant aussi bien sur les achats de la BCE sur le marché secondaire que sur le LTRO (long-term refinancing operation, le prêt bancaire massif à trois ans), deux mesures non conventionnelles qui la font flirter avec la politique suivie par ses consœurs occidentales.


Le ministre espagnol des affaires étrangères, José Manuel Garcia-Margallo, est sorti de ses gonds diplomatiques en critiquant la même Angela Merkel, coupable de “réagir toujours avec un quart d’heure de retard”. Appelant à ce qu’un signal politique de la détermination de sauver l’euro soit donné aux investisseurs, il a déclaré que “la première preuve est de mutualiser la dette”. “Nous devons convaincre nos partenaires, et particulièrement les Allemands, qu’il faut faire quelque chose pour contenir la dette publique”, a-t-il poursuivi, pour observer que “chaque jour qui passe sera pire, c’est une maladie qui avance et, si nous ne coupons pas à temps, la thérapie sera beaucoup plus douloureuse”. Sa conclusion en découlait : il faut “relancer la croissance, sinon tout ça ne servira à rien”.


De fait, les signe de dérapage de la situation espagnole se multiplient. Le gouvernement n’obtenant de la Commission qu’une fin de non recevoir à ses demandes de réévaluation de ses objectifs: “il est essentiel de ramener sans délai les finances publiques à un niveau soutenable et de ce fait nous pensons qu’il est essentiel de respecter les objectifs budgétaires en 2012” lui a répondu le commissaire Olli Rehn. Pedro Passos Coelho, le premier ministre portugais avait de son côté soutenu la position espagnole, partageant avec lui “une vision commune sur les défis que l’Union européenne doit affronter”. Faisant valoir que celle-ci, ainsi que le FMI, “ne retireront pas leur soutien à un pays qui, pour des raisons extérieures, ne serait pas en mesure de revenir sur les marchés comme prévu”…


Le premier ministre japonais s’est rappelé au bon souvenir de ceux qui voudraient oublier la dimension mondiale de la crise. Yoshihiko Noda vient de se décider à proposer au Parlement un doublement de la taxe sur la consommation (TVA), actuellement de 5%. Une réforme qui est un vrai serpent de mer, toujours envisagée, jamais entreprise. Jusqu’à maintenant financée en interne, la dette publique du Japon a atteint 200% du PIB, mais il va falloir affronter les rigueurs du marché international, rendant impossible pour le gouvernement de financer plus de la moitié de son budget par l’émission d’obligations.


La crainte d’une situation à l’européenne s’est emparée du monde politique japonais. L’économie japonaise va se contracter de 0,4% durant l’année fiscale en cours (avril 2011 à mars 2012), et il va falloir que se confirment les prévisions de croissance pour la suivante, dans un contexte mondial défavorable, avec un yen fortement apprécié en raison de la poursuite de la guerre monétaire de tranchée.


Symbole d’une situation problématique et conséquence du séisme du 11 mars et de ses suites, le pays enregistre son premier déficit commercial depuis 1980. Au côté de ses importations de produits alimentaires, l’importation de pétrole et de gaz y a également contribué, en raison de l’arrêt de la quasi totalité du parc des centrales nucléaires, tandis que sa production a été très perturbée.


Enfonçant le clou, la dette britannique vient de dépasser le seuil symbolique de 1.000 milliards de livres (soir 1.200 milliards d’euros) et a continué de se creuser de 21 milliards d’euros en un an, en dépit du plan d’austérité des conservateurs et des libéraux. Ce montant exclut le coût du sauvetage des banques en 2008/2009, estimé à des centaines de milliards de livres. Ce faisant, le Royaume-Uni continue d’emprunter sur le marché à des conditions proches de celles de l’Allemagne, car il ne faudrait pas affoler le lieu d’élection de la City…


La mise à jour des prévisions économiques du FMI confirment le fléchissement de la croissance mondiale (+ 3,3% au lieu de + 4%), qui doit beaucoup à la croissance chinoise et indienne, et l’entrée de la zone euro dans la récession (- 0,5%). L’Allemagne ne connaîtrait une croissance que de 0,3%, tandis que l’Espagne et l’Italie verraient la leur chuter. Conclusion : “Le risque le plus immédiat est l’intensification du cercle vicieux entre les pressions sur le financement des États et celui des banques dans la zone euro, provoquant une réduction de l’effet de levier bancaire plus importante et plus durable et des contractions importantes du crédit et de l’activité”. Le FMI préconise en conséquence d’exécuter avec précaution les plans d’austérité, car “un rééquilibrage trop rapide durant l’année 2012 pourrait exacerber les risques”. Olivier Blanchard, l’économiste en chef du fonds, risquant cette formule: “abaisser la dette est un marathon, pas un sprint”.


Les dirigeants européens vont comme à l’accoutumée avoir de quoi s’occuper pour continuer de gérer à la petite semaine leur crise. S’il se confirme qu’un plan A’ encore dans les limbes pourrait en émerger, il ne répondra toutefois pas aux préoccupations du FMI, car il restera consacré à la réduction des déficits et n’abordera le thème de la relance que pour la forme. Les analystes sont quant à eux dans l’expectative, observant les effets de la première vague de prêts de la BCE (LTRO) et supputant ceux de la seconde, fin février.


Utilisant ses fonds pour refinancer leur dette, les banques espagnoles et italiennes en ont également profité pour acheter de la dette publique de leur pays, ce qui explique la baisse des taux intervenue sur les émissions à court terme. La question est désormais de savoir si cela va se reproduire, en particulier pour les émissions à long terme, et si le LTRO pourrait contribuer à détendre le marché obligataire, au moins jusqu’à la mise en service en juillet du nouveau pare feu, le MES.


Mais s’il devait en être ainsi, ce qui est loin d’être garanti, les banques qui se prêteraient à ces profitables opérations de carry trade – étant donné le différentiel des taux de leurs emprunts et de leurs acquisitions – en sortiraient fragilisées. Elles deviendraient très vulnérables à une nouvelle hausse des taux des obligations achetées, car cela aurait pour conséquence leur dévalorisation et la nécessité de les déprécier dans leur livre (sans même parler d’éventuelles décotes). Cela au moment où elles doivent renforcer leurs fonds propres, une obligation pour laquelle le LTRO n’est d’aucune aide.


Dans le meilleur des cas, la BCE aura alors contribué à déplacer le problème, sans rien régler. Ni la question de la solvabilité des banques, ni celle des États. Le désendettement reste à accomplir, il aura seulement été évité que de chronique il ne devienne brutalement aigu.


 

 



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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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