La Grève, un roman philosophique (3). La recherche du profit est-elle immorale ?

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From the Archives : Originally published March 10th, 2014
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La Grève, un roman philosophique (2). L’aristocratie du piston



Poursuivons notre exploration philosophique du roman-fleuve d’Ayn Rand, La Grève. Un thème fondamental du livre est l'esprit humain comme moyen de création et de survie.


La richesse est une création de l’esprit


Dans La Grève, tous les progrès qui rendent la vie humaine sur terre possible sont des produits de l'esprit et du raisonnement. La création de la ligne de chemin de fer « John Galt » nécessite l'ingénierie de Dagny Taggart. La création d’un nouveau métal nécessite la maîtrise par Hank Rearden de la métallurgie et de la physique. Toutes les inventions, découvertes et innovations sont des créations de l'esprit, y compris la production d'articles de base dont les êtres humains ont besoin pour survivre au jour le jour : la nourriture, les médicaments, la construction d’immeubles etc. Qu'il s'agisse d'une symphonie ou d’une mine de charbon, tout travail est un acte de création et vient de la même source : la capacité de l’esprit humain à créer quelque chose d’utile pour les autres.


Pour Ayn Rand, le profit est le signe même du service rendu : vous faites du profit lorsque vous produisez quelque chose de valeur, quelque chose que les autres veulent acheter parce que cela rend la vie humaine meilleure, plus longue, plus facile et plus agréable.


Hank Rearden se retrouve un jour accusé de violer une réglementation économique arbitraire. Au cours de son procès, plutôt que de s'excuser pour sa recherche du profit, il affirme : « Je gagne ma vie comme tout honnête homme doit le faire. Je refuse de considérer comme une faute mon existence et le fait de devoir travailler pour gagner ma vie. Je refuse de considérer comme une faute le fait d’y parvenir et même d’y réussir. Je refuse de considérer comme une faute le fait que je réussis mieux que beaucoup, le fait que mon travail a plus de valeur que celui de mon voisin et qu’un plus grand nombre d’individus sont prêts à me payer pour cela. Je refuse de m’excuser de ma compétence, je refuse de m’excuser de ma réussite, je refuse de m’excuser d’avoir de l’argent ».




Moyens économiques et moyens politiques de faire du profit.


Nous le disions dans l’article précédent, Ayn Rand souligne bien dans son roman la différence qu’il y a entre ceux qui gagnent leur richesse par la production et le commerce, et ceux dont la richesse est imméritée. Le pouvoir économique est « le pouvoir de produire et d'échanger ce que l'on a produit », tandis que le pouvoir politique repose sur l'utilisation de la force de la loi.


Hank Rearden refuse de s’accuser de faire du profit. Il poursuit son argumentaire devant ses juges : « Si je travaille, c’est pour gagner de l’argent. Si je fais des bénéfices, c’est parce que je vends un produit à des gens qui en ont besoin, qui acceptent de l’acheter et de le payer à sa juste valeur. Ce produit, je ne le fabrique pas à mes dépens pour leur seul bénéfice. Et eux ne l’achètent pas à perte pour me faire gagner de l’argent. Je ne sacrifie pas plus mes intérêts aux leurs qu’ils ne sacrifient les leurs aux miens. Nous traitons d’égal à égal, d’un commun accord et à notre avantage mutuel, et je suis fier de chaque centime ainsi gagné ».


Pour lui le commerce est une interaction volontaire, à l'avantage mutuel de chacune des deux parties. 


Ces deux caractéristiques sont essentielles :


1° Quand je vais acheter du lait dans un magasin, quand j’embauche un employé, que je crée une société avec d'autres personnes, je ne force personne. L’échange est volontaire. C'est quelque chose qui ne peut se produire qu’avec le consentement des autres parties.


2° Et la raison pour laquelle nous choisissons de nous engager dans le commerce, bien sûr, est que chacun de nous en attend un profit. Nous apprécions ce que nous obtenons plus que ce que nous donnons en échange, que ce soit de l'argent, du temps, ou quelque chose d'autre.


L’argent n’est qu’un moyen d’échange


Le discours de Francisco d’Anconia sur l'argent est l'un des passages emblématiques du roman : « Vous pensez vraiment que l’argent est à l’origine de tous les maux ? demanda-t-il. Et vous êtes-vous demandé quelle était l’origine de l’argent ? L’argent est un moyen d’échange. Il n’a de raison d’être que s’il y a production de biens et des hommes capables de les produire. L’argent matérialise un principe selon lequel les hommes disposent, pour commercer, d’une monnaie d’échange dont ils admettent la valeur intrinsèque. Ceux qui pleurent pour obtenir vos produits ou les pillards qui vous les prennent de force n’utilisent pas l’argent comme moyen. L’argent existe parce que des hommes produisent. C’est ça le mal, pour vous ? »


Ce discours, long de plusieurs pages, est un appel à comprendre le vrai sens de la richesse. Francisco d’Anconia explique que l'argent n’est rendu possible que par les hommes qui produisent des biens ou des services. L'argent est un outil d'échange qui suppose des hommes productifs et inventifs. La richesse, c’est-à-dire la production de valeur en vue de satisfaire des besoins, est donc la source d'argent. L'argent est l'effet, plutôt que la cause, de la richesse.


L'argent que détient une personne symbolise une production de biens ou de services qui a déjà eu lieu et qui a été jugée comme utile par les autres. Comme le dit Francisco d’Anconia, « l'argent n'est pas la mesure d'un homme ». Ce qui importe c’est de savoir comment il l’a gagné. Pour ceux qui vivent de leurs efforts, par la production et l'échange volontaire, de l'épicier local aux plus grands innovateurs, l’argent est, en effet, une source de fierté et d'honneur. Mais ceux qui ont acquis leur richesse par piston sont « seulement des pillards ». Hank Rearden veut s'enrichir par la création d'un nouveau type de métal qui est à la fois plus solide et moins cher que les produits de ses concurrents. En revanche, le producteur d’acier Orren Boyle veut s'enrichir en demandant à ses amis politiques de limiter par la loi la production de son concurrent Rearden. Le profit de l’un est légitime quand celui de l’autre ne devrait justement pas l’être.


 

 

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Damien Theillier est professeur de philosophie en terminale et en classes préparatoires à Paris. Il est l’auteur de Culture générale (Editions Pearson, 2009), d'un cours de philosophie en ligne (http://cours-de-philosophie.fr), il préside l’Institut Coppet (www.institutcoppet.org).
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On devrait envoyer de tels articles à l'Elysée, à Matignon et à d'autres ministères.
Il serait intéressant de connaitre l'avis des tenants de l'état-providence...
Quand on lit ça, on est vraiment convaincu de la folie et de la lâcheté de la classe dirigeante.
J'en arrive à me demander pourquoi dans notre contexte j'ai eu l'idée un jour de me mettre à mon compte !!!!!
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On devrait envoyer de tels articles à l'Elysée, à Matignon et à d'autres ministères. Il serait intéressant de connaitre l'avis des tenants de l'état-providence... Quand on lit ça, on est vraiment convaincu de la folie et de la lâcheté de la classe dirig  Read more
merisier - 3/10/2014 at 7:18 AM GMT
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