Mes chères contrariées, mes chers contrariens,
L'information la plus importante du week-end est sans contexte la
moutarde qui monte au nez de nos « amis » allemands.
Alors que les divisions de Panzerspéculateurs
se massent proche de la frontière, le gouvernement Daladier a
décidé de décréter la mobilisation
générale. La ligne Maginot budgétaire a
été activée. Elle est censée stopper net
l'offensive des Panzerspéculateurs.
Aux actualités ce matin, le ministère de la censure
expliquait que nous n'avions rien à craindre. Nos défenses
tiendront.
Ha, oui, pardon, excusez-moi, ma femme me glisse
dans l'oreille que nous ne sommes pas en 40. Je me suis égaré.
Quoique non en fait. Je voulais juste montrer qu'encore une fois, les
relations entre la France et l'Allemagne sont complexes. Et puis
au-delà, l'Allemagne a décidé de mettre la pression sur
notre pays en disant clairement que nous sommes le maillon faible. En
réalité, ce n'est pas si faux que cela. D'autres n'hésitent
pas à franchir le Rubicon, en expliquant que l'Allemagne ne peut
s'empêcher de mettre l'Europe à feu et à sang tous les
cinquante ans. Lorsque l'on voit ce qu'il se passe en Espagne, en
Grèce et même au Portugal, où plus de 5 000 militaires
ont manifesté dans les rues de Lisbonne, on peut légitimement
se poser des questions sur l'attitude allemande. Mais nous y reviendrons un
peu plus bas.
Nous avons
donc appris que :
Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble
aurait demandé au Conseil des experts économiques de son pays
de réfléchir à des propositions de réformes
économiques pour la France, craignant une chute de la deuxième
économie de la zone euro et de ses conséquences sur le devenir
de l’Europe dans son ensemble…
Malgré les démentis qui sont intervenus vendredi
après-midi, le pavé dans la mare a été
jeté ! Deux responsables, s’exprimant sous le sceau de
l’anonymat, ont ainsi expliqué à Reuters que W. Schäuble avait demandé aux « sages
» de réfléchir à un rapport susceptible de donner
des pistes de réformes pour la France avant qu’il ne soit trop
tard…
Berlin s’inquiète en effet de la tournure des
événements en France à la lumière des
dernières décisions prises par le gouvernement Ayrault qui ne
s’attaquerait pas aux réformes structurelles indispensables pour
remettre le pays sur de bons rails budgétaires… De quoi manquer
les objectifs de déficits l’an prochain et plonger l’Euro
dans une nouvelle crise qui risquerait cette fois d’être fatale
à la monnaie unique.
« Les inquiétudes s’accumulent en raison du manque
d’action du gouvernement français sur la réforme du
marché du travail », a estimé Lars Feld,
un des membres du comité des sages, à l’agence Reuters.
« Le principal problème en ce moment, ce n’est plus
la Grèce, l’Espagne ou la
l’Italie, c’est devenu la France parce qu’elle n’a
rien entrepris de nature à rétablir sa
compétitivité, au contraire, elle va dans l’autre
direction ! », a poursuivi Lars Feld. «
Il faut à la France une réforme du marché du travail,
c’est le pays de la zone euro qui travaille moins d’année
en année, alors, qu’attendez-vous comme résultat ? Les
choses n’iront pas en s’améliorant, à moins que de
vrais efforts soient déployés. »
Voilà résumé en quelques paragraphes la position
allemande et l'inquiétude que suscite la gestion de notre pays.
Soyons honnêtes avec la nouvelle équipe socialiste au
pouvoir. Le gouvernement Ayrault est allé bien plus loin dans la
rigueur et dans les hausses d'impôts que le gouvernement Fillon.
J'ai tout de même l'impression que la
« parole » allemande est nettement plus
libérée depuis que les socialistes français sont au
pouvoir, il convient de rappeler néanmoins que jamais la dette ne
s'est autant accrue en pourcentage comme en montant absolu que pendant le
quinquennat de Nicolas Sarkozy. Cette remarque ne constitue pas une critique
mais un simple rappel des faits. C'était à ce moment
l'idée de la relance qui présidait aux décisions
économiques. Mais ce fut clairement une erreur.
Concernant l'attitude de nos « amis » allemands,
effectivement elle peut prêter le flanc aux critiques.
Il n'y aurait pas de problème avec notre partenaire germanique
si nous avions chacun notre monnaie. Peu ou prou, ce serait
« chacun son problème ». Non, le
véritable souci, c'est que nous partageons la même monnaie.
Notre euro.
L'euro est
un carcan pour les économies du sud au sens large
On parle côté allemand de la compétitivité
française. Mais il ne faut pas oublier l'aspect monétaire de
notre compétitivité.
Lorsque l'euro a été introduit, il valait environ 0,9
dollars. Aujourd'hui, il en vaut 1,30. Nous avons, sans rien faire, en
quelques années, perdu plus de 40 % de compétitivité par
rapport à nos concurrents américains par exemple et uniquement
à cause d'une très forte appréciation de l'euro. Cela
n'arrange pas notre pays, ni l'Espagne, ni le Portugal, ni la Grèce,
ni même l'Italie.
Cette monnaie forte, c'est une monnaie allemande, pour
l'économie allemande. Cela n'est pas transposable aux autres
économies de la zone euro. C'est peut-être regrettable, mais
c'est ainsi.
Nous construisons
des lignes Maginot
Alors fidèles à notre tradition de
bâtisseurs/guerriers, nous construisons des lignes Maginot qui ne
résisteront pas, car elles sont tout simplement chimériques.
L'euro peut-il subsister sous cette forme ?
L'euro est-il en train de devenir le point d'achoppement des relations
franco-allemandes ?
Car il ne faut pas se leurrer. Au-delà des piques sur notre
gestion budgétaire, tout en sachant que plus de rigueur, ou de
chômeurs, ou moins de CDI (ce qui revient au même), cela
pèsera très fortement sur notre croissance,
c'est-à-dire, dans l'état actuel des choses, sur notre
récession économique.
Il n'y a fondamentalement aucune raison que l'Allemagne attaque ainsi
frontalement notre pays. Alors quel est le mobile ?
Je pense qu'une guerre vient de commencer autour des aspects
monétaires et de l'euro.
Ce qui est sûr, c'est que comme en 40, ce n'est pas la ligne
Maginot qui nous sauvera.
Charles SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
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