Ce mardi, en deuxième lecture, doit passer la Loi Santé et, hasard de l’actualité, la France est en état d’urgence. Le hasard fait parfois bien les choses.
La Loi Santé, quel vaste programme ! La presse traditionnelle a bien évoqué les actuelles tensions entre le corps médical et leur ministère de tutelle, et Contrepoints a même réalisé un important dossier à ce sujet, mais la situation n’a guère évolué ces derniers mois.
Les griefs des médecins à l’encontre de cette loi sont particulièrement nombreux et argumentés. « Remise en cause profonde » du système de santé français, « loi inadaptée aux vrais problèmes », les anathèmes pleuvent sur le projet et sur son porteur, Marisol Touraine, cible toute trouvée par une obstination presque suspecte à vouloir passer un texte de plus en plus controversé. On peut le comprendre : cette loi concoctée par un gouvernement en vase clos achève l’étatisation du système commencée en 1945. En généralisant le tiers-payant, déconnectant ainsi définitivement les patients du coût de leurs soins, on achève de fonctionnariser complètement les professionnels médicaux. L’avantage en termes de contrôle sur ces derniers est alors évident du point de vue de l’État qui peut enfin prétendre régler les problèmes récurrents de trous dans la Sécurité Sociale, en décidant arbitrairement des prix pour les uns et des salaires pour les autres.
Et comme pour tout marché planifié, comme pour tous prix régulés, comme pour tous salaires décrétés, on sait déjà, au vu des nombreuses expériences collectivistes partout dans le monde, le résultat auquel on doit s’attendre inéluctablement : une fois cette loi passée, les pénuries fleuriront. On observe déjà une désertification médicale, on peut déjà voir certaines carences en médicaments à certains moments de l’année, on constate déjà des queues aux urgences et du manque de personnel un peu partout ; la Loi Santé, en étatisant ce qui ne l’était pas encore, promet au moins de façon mécanique d’accroître les problèmes qui existent déjà.
À ceci s’ajoute la diminution évidente des libertés ; le « parcours de santé » était une étape, l’impossibilité de changer de mutuelle pour le salarié, au 1er Janvier 2016, en est une autre, et la Loi Santé termine la marche, avec la fanfare.
Bref, l’histoire se répète et les Français, sous prétexte de nouveaux droits que les socialistes du cru distribuent toujours avec emphase, vont se faire gentiment pigeonner une fois encore. Et cette fois-ci, il ne leur sera même pas laissé l’illusion de pouvoir se plaindre et d’exprimer un quelconque mécontentement.
En effet, les attentats de vendredi dernier ont magistralement changé la donne.
D’une part, les actions de grève qui avaient lieu le 13 novembre ont été immédiatement interrompues : les cinq syndicats de praticiens de ville, ainsi que la FHP (Fédération hospitalière privée) avaient appelé les médecins libéraux à suspendre leurs activités et à fermer leurs établissements mais à la nouvelle des attentats de Paris, ils ont unanimement suspendu leur mouvement. Coïncidence macabre, on se rappelle que leur mouvement de grève de janvier dernier avait aussi été interrompu suite aux attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher.
D’autre part, la France, maintenant en état d’urgence, ne peut plus se permettre de divaguer en vains débats dont l’issue est déjà connue, hein, mes petits amis. Je notais hier que cet état d’urgence est fort commode pour conserver le pouvoir à tout prix et réduire au silence les opposants et les ennemis politiques du gouvernement en place. Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour une démonstration magistrale de l’application concrète de cette nouvelle donne.
C’est ainsi qu’on apprend qu’en raison de la réunion exceptionnelle du Congrès lundi (hier), l’examen du projet de loi Santé à l’Assemblée a été repoussé à ce mardi. Dommages collatéraux : ceux qui s’opposaient à cette loi (au rang desquels, les médecins libéraux, on l’a vu, mais aussi les buralistes qui contestent le paquet neutre de cigarettes) ne pourront pas se rassembler aux abords de l’Assemblée lundi puisque c’est maintenant interdit. Ils ne pourront pas plus tenter de dialoguer directement avec des députés, puisqu’ils ne seront pas là.
Autrement dit, toute opposition possible à cette loi sera extrêmement feutrée, pour ne pas dire inexistante. Jouant sur les deux tableaux, celui d’un nécessaire appel à la décence qui coupera court à toute montée en tours des médecins, et celui d’une situation délicate qui ne permet pas l’organisation de la moindre manifestation, la Loi Santé passera donc sans le moindre pépiement de gêne. Bien joué.
Pour celui qui veut bien regarder, on voit très bien que cet état d’urgence offre un tuyau bien pratique pour faire passer un peu tout et n’importe quoi ; le pouvoir en place dispose maintenant d’un moyen simple, efficace et maintenant testé pour faire ce qu’il veut. Comme, de surcroît, il n’a jamais brillé par ses scrupules ou une morale irréprochable, on le voit mal s’empêcher de l’utiliser à présent, faisant subitement preuve d’une conscience qu’il n’a jamais démontrée avant. Autrement dit : attendez-vous à d’autres surprises sur le même mode décontracté.
Ici, je sais que certains n’hésiteront pas à trouver mesquines ou déplacées les bisbilles des médecins, et très nauséabonde la politicaillerie qui accompagne cette loi Santé alors que Paris et la France pansent leurs blessés et pleurent leurs morts. Bien sûr, il ne faut pas perdre de vue l’horreur de ces attentats qui, en contraste de ces mondanités législatives un peu embarrassantes, donnent à toute réflexion sur ces dernières une couleur de futilité. Soit.
Cependant, je dois noter deux choses :
D’une part, il est pour le moins particulièrement cavalier que la République récompense le travail et l’abnégation des personnels de soin lors des épreuves que nous venons de traverser, leur dévouement à leur métier, en faisant passer ainsi une loi les concernant directement et à laquelle ils sont justement majoritairement opposés. Plus qu’une maladresse, on frise une nouvelle provocation.
D’autre part, je ne peux m’empêcher de penser que ces politicailleries, et le prétexte de l’état d’urgence pour éliminer les débats, sont comme des petits coups de canif répétés et systématiques dans le dos des Français et qu’ils participent grandement à l’érosion complète de la démocratie française et de la crédibilité des politiciens au point que plus personne ne puisse réellement leur faire confiance. Si, sur le court terme, la gravité des actes perpétrés le vendredi 13 novembre ne fait pas l’ombre d’un doute, sur le long terme, les actes qui sont posés maintenant par les actuels dirigeants auront des conséquences plus graves encore, et avant tout pour les Français eux-mêmes.
À ce train-là, on peut raisonnablement s’interroger sur la façon dont peuvent tourner les prochaines élections, voire se demander si elles auront lieu.
Mais allons donc. J’exagère, c’est évident.
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