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La mondialisation en berne

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Published : October 16th, 2012
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Category : Editorials

 

 

 

 

L’assemblée générale du FMI qui vient de se terminer à Tokyo ne laissera pas un souvenir impérissable, car l’organisation internationale semble condamnée à lancer des alertes sans effet et à formuler des préconisations sans résultat. En définitive, cette impuissance exprime bien l’élan brisé de G20 présentés il y a encore peu comme prenant les choses en main au nom d’une nouvelle gouvernance qui ne fait pas ses preuves.


Divergeant sur le rythme du désendettement en Europe, Christine Lagarde et Wolfgang Schäuble se sont à l’issue de l’assemblée appliqués à minorer du mieux qu’ils pouvaient leurs désaccords, après n’avoir pu éviter de les exposer publiquement. « En réalité, ce qui a été parfois présenté comme un désaccord tient surtout à la perception [qu'on a de ce sujet]», a tenté la directrice du FMI. Animée par la volonté de convaincre – contre toute évidence – elle a prononcé des paroles définitives : « Nous ne sommes peut-être pas d’accord sur tout, mais je crois qu’il existe un consensus général sur le fait que l’action collective est en train de produire des résultats », en référence à la précieuse consigne qu’elle a donnée et qui tient en un seul mot : agir ! Face à l’adversité, Wolfgang Schäuble a semblé mettre un peu d’eau dans son vin en expliquant : « on peut parler du rythme de réduction de la dette, mais pas de son principe », sans aborder la question essentielle des moyens…


Les représentants de la Chine et du Brésil ont lancé de véritables mises en garde. Yi Gang, le gouverneur adjoint de la Banque centrale chinoise, a estimé que l’économie mondiale était perturbée par l’absence « d’un plan crédible de réduction du déficit budgétaire à moyen terme dans des économies développées importantes, comme les États-Unis et le Japon ». Car la lente reprise dans les pays développés entraîne « des retombées coûteuses sur le reste du monde » et l’effet bénéfique des mesures massives d’assouplissement monétaire des banques centrales de ces pays « restait à prouver ». Il a prôné « la nécessité d’une action résolue, rapide et décisive pour stopper le ralentissement économique mondial et préserver la stabilité financière ».


Guido Mantega, le ministre brésilien des finances, a été encore plus direct : « Les pays avancés ne peuvent pas espérer se débarrasser de la crise aux dépens des pays émergents », a-t-il déclaré, justifiant que le Brésil puisse prendre « toutes les mesures nécessaires » pour se protéger des flux de capitaux qui résultent des injections de liquidités de la Fed. « Il est évident que si vous pratiquez une politique monétaire accommodante pendant dix ans, à un certain moment vous allez obtenir des résultats, mais les effets collatéraux seront peut-être pires que les résultats directs », a-t-il prédit.


Ne contribuant pas à détendre la situation, les décisions du G20 de 2010 sont toujours bloquées et le renforcement de la présence des émergents au sein du FMI n’avance pas en raison du veto américain, au grand soulagement des Européens qui devraient se serrer pour leur faire de la place. Guido Mantega a évoqué un « échec » et un « signe négatif » envoyé au reste du monde. Répercutant les critiques qui se sont vigoureusement exprimées, Christine Lagarde a estimé que l’impact de la politique des banques centrales, qu’elle saluait jusqu’alors, était désormais « incertain » et qu’elles risquaient de créer une « surchauffe » dans les pays émergents.


Il est loin le temps où, avec assurance, il était prédit que l’Asie allait relancer la machine et la croissance. La dynamique s’est au contraire inversée, conduisant le ministre du Trésor australien, Wayne Swan, à déclarer « il est temps que les autres fassent leur part du travail », car « l’Asie ne peut porter l’économie mondiale ». La question ne peut manquer d’être à ce stade posée : qui peut donc la porter ? Telle qu’elle a été conçue, la mondialisation est en berne et ses effets se retournent contre ses artisans. Après celle de la machine à fabriquer du crédit, cela fait beaucoup de pannes décidément ! Mais que fait l’OMC ?



Billet rédigé par François Leclerc


Son livre, Les CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de paraître


Un « article presslib’ » est libre de reproduction numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.



 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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