A ceux qui se
lamentent du taux de chômage en France, Frédéric Lefebvre
a apporté il y a quelques jours une réponse pour le moins
surprenante : en substance, c’est à cause du taux de
natalité élevé, qui pousse sur le marché de
l’emploi plus de jeunes Français que de jeunes Allemands en
Allemagne, qu’il est si dur de lutter contre le chômage en
France. C’est si simple, si évident, c’est sans doute un
chapitre de Zadig et Voltaire.
Au-delà
de la maladresse politique insondable, le Secrétaire
d’État chargé « du commerce, de
l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des
services, des professions libérales et de la consommation »
commet une erreur théorique grave.
Cette vision
malthusienne du marché du travail est en réalité celle
qui a inspirée les 35 heures à
l’époque, et qui servait d’argument pour condamner la
réforme des retraites l’année dernière : le
partage du travail, partage des richesses, ou la fameuse logique du
gâteau.
Il existerait
un gros marché du travail posé sur l’économie
française qu’il s’agit de partager au mieux - donc
d’en confier la tâche à l’État, connu pour
son grand sens du partage. Frédéric Lefebvre aurait ainsi pu
expliquer avec la même assurance que les Français travaillent
trop, et qu’il est donc difficile de trouver du temps de travail pour
les chômeurs. Allons-y, il est grand temps de passer aux 22 heures, et
en route vers le plein emploi ! Sur le volet des retraites, dans la
même logique, si « les vieux prennent les emplois des
jeunes », envoyons-les à la pêche à 45 ans, et
hop ! Plus de chômage des jeunes !
Il semble donc
qu’il faille encore le répéter :
• Non, le travail ne se partage pas.
• Non, la richesse n’est pas un
gâteau à découper.
• Non, trop de travail ne tue pas le
travail.
Comment un Ministre en charge des entreprises peut-il mener une action
positive sur l’emploi en considérant un nouvel arrivant sur le
marché du travail comme un prédateur qui vient menacer le
triste gâteau dont il s’imagine le gardien ?
C’est toute la vision de l’économie et de la
croissance qui doit être renversée. La richesse se crée
dans la rencontre du travail et de la créativité, pas dans les
ministères. Les nouveaux arrivants sur le marché du travail ne
sont pas un frein mais bien évidement une chance pour la vigueur de
notre économie. Encore faut-il les laisser libres de produire de la
richesse, et c’est bien là que l’État porte une lourde responsabilité dans le freinage de la
croissance et du plein emploi. La fiscalité progressive est à
ce titre un bon exemple de frein à la réussite et à
l’enrichissement. Le plafonnement des revenus d’un
auto-entrepreneur (pour être bien sûr qu’il ne se mette pas
à gagner trop d’argent) est un autre dispositif
contre-productif, qui limite la croissance au lieu de la stimuler, et qui
décourage les entrepreneurs au lieu de les motiver.
Enfin et surtout, le seul moyen de lutter efficacement contre le
chômage est de débarrasser le marché du travail du boulet
que sont les réglementations de toutes natures (temps de travail,
salaire minimum, licenciement, etc.) et qui sont aujourd’hui avec le
poids de la dépense publique, le seul vrai frein à la
croissance.
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