I. L’expansion monétaire se poursuit
Dans les analyses monétaires,
les bilans du secteur bancaire commercial sont séparés de ceux de la Réserve
fédérale. Mais combiner les deux pourrait s’avérer bien plus révélateur.
Tout d’abord, l’addition des
volumes des banques commerciales à ceux de la Fed nous offre un bien meilleur
aperçu de l’expansion monétaire dans son ensemble – notamment en période de
crise économique et financière.
Cette addition permet dans un
second temps de découvrir qu’en période de crise, la banque centrale place
les intérêts de l’industrie bancaire en tête de ses intérêts, comme nous
pouvons le voir avec sa politique de restauration du système bancaire.
L’expansion des bilans de la
Fed enregistrée depuis 2008 a non seulement empêché le secteur bancaire de se
contracter, elle a aussi favorisé le maintien de l’expansion monétaire, comme
le montre le graphique ci-dessous.
La Fed a gonflé ses bilans en
fournissant du crédit additionnel au système bancaire commercial et en
achetant des obligations à des entreprises bancaires et non-bancaires. En
conséquence, les bilans combinés des banques commerciales et de la Fed ont
atteint un record.
II. Expansion de la masse de paiements
L’expansion des bilans des
banques commerciales et de la Fed a été accompagnée par une expansion de la
masse des paiements sous la forme de M1, qui a gonflé de 58% entre août 2008
et février 2012.
Pour ce qui concerne M1, la
demande de dépôt est passée de 314 à 772 milliards de dollars, ce qui
représente une hausse de 146%. Cette hausse des moyens de paiements peut
s’expliquer en partie par les taux d'intérêt très faibles (le faible coût
d’opportunité de la possession de monnaie).
Il se peut en revanche qu’elle
soit due aux achats d’obligations de la Fed aux sociétés non-bancaires
(ménages, fonds de pension et compagnies d’assurance). Par ces opérations, la
Fed augmente directement les moyens de paiement, ce qui représente une
politique d’expansion monétaire sans expansion du crédit bancaire.
La hausse de la masse de
paiements enregistrée ces dernières années est un signe de ce que nous
pouvons indubitablement appeler inflation selon la définition que lui donne
l'école autrichienne d’économie.
Une hausse de la masse monétaire
mène nécessairement à un déclin du pouvoir d’achat de chaque unité monétaire
– par rapport à une absence de changement en matière de masse monétaire.
Plus important encore, une
hausse de la masse monétaire empêche l’apparition d’une hausse du pouvoir
d’achat – qui se serait produite si la Fed n’avait pas placé des moyens de
paiements entre les mains des banques commerciales et des sociétés
non-bancaires.
Une hausse de la masse
monétaire peut se traduire par une hausse des prix – que ce soit ceux des
biens à la consommation ou ceux des actifs (actions et immobilier, par
exemple).
Une hausse des prix érode le
pouvoir d’achat d’une monnaie et endommage la fonction de coordination des
prix sur le marché et pousse les agents du marché à prendre de mauvaises
décisions, qui mènent au mal-investissement.
Une telle politique n’a rien
de neutre. Les grands gagnants de la politique de la Fed sont par exemple
ceux qui détiennent des biens et des actifs dont les prix n’ont pas pu
baisser, alors que les grands perdants en sont les propriétaires de monnaie
que l’on a empêché d’acheter à des prix moins élevés.
III. La croissance qui donnera lieu à une dépression
L’expansion actuelle de la
masse monétaire – une politique monétaire qui vise à aller bien plus loin qu’empêcher
la masse monétaire de diminuer – est la preuve des tentatives de maintien de
la croissance engendrée par l’expansion du crédit bancaire en circulation.
En revanche, une telle
politique ne pourra pas nous guérir du malaise économique et politique
apporté par l’expansion du crédit bancaire en circulation. A dire vrai, une
telle politique monétaire ne pourra qu’aggraver la situation.
Elle ne laissera pas seulement
place à la dépression, qui permettra plus tard à l’économie de se
rééquilibrer, mais aussi ruiner la devise. Ludwig von
Mises (1881–1973), dans Interventionism: An Economic Analysis (1940), a noté ceci :
La croissance ne pourra pas se
prolonger indéfiniment. Il y a deux alternatives. Soit les banques continuent
d’étendre le crédit sans restriction et d’alimenter une orgie de spéculation
qui, comme pour tous les autres cas d’inflation illimitée, se terminent par
un effondrement du système de monnaie et de crédit. Soit les banques mettent
fin à leurs activités avant que ce point soit atteint et renoncent
volontairement à l’expansion de crédit pour accepter la crise. Dans les deux
cas, une dépression survient. [1]
La conclusion à en tirer est
que la politique monétaire d’expansion de la masse monétaire au travers du
crédit bancaire offert à taux d’intérêt très faible est la pire de toutes les
politiques monétaires.