À
la suite de l'abaissement par l'Eurosystème
des taux d'intérêt appliqués à ses
opérations de politique monétaire, certains analystes ont fait
état d'une prétendue disparition d'une partie des fonds que les
banques avaient déposés sur la facilité de
dépôt. Mais où ces fonds sont-ils donc passés?
Répondre à cette question permet de revenir sur les différents
types de comptes que les banques commerciales gardent auprès de l'Eurosystème.
Ces
comptes sont au nombre de trois: le compte courant, le dépôt
à terme, et la facilité de dépôt. Le compte
courant auprès de l'Eurosystème est
le dépôt bancaire par excellence. Toute banque est tenue d'en
avoir un, et notamment d'y garder un minimum de liquidité qui
correspond à la réserve minimale réglementaire. Celle-ci
se calcule comme un pourcentage, présentement fixé à 1%,
de la masse des dépôts émis par la banque commerciale (et
donc détenus par ses clients).
Il
peut fort bien arriver qu'une banque dispose de liquidités
supérieures à la réserve minimale qui lui est requise.
Si cette banque choisit de ne pas prêter cet excès de
liquidité à une autre institution sur le marché
interbancaire, elle peut toujours placer ces sommes à la banque
centrale. Les deux autres comptes bancaires auprès de l'Eurosystème existent précisément
pour offrir aux banques commerciales une alternative de placement pour leur
excès de liquidité.
Si cet
excès est considéré comme plus ou moins structurel, et
donc durable, le dépôt à terme est le plus
approprié. Il s'agit en effet d'un dépôt à une
semaine – période pendant laquelle le montant
déposé n'est plus accessible à la banque. Si la
liquidité excédentaire est considérée comme un
phénomène isolé et passager, la facilité de
dépôt sera préférée. Elle fonctionne comme
un second compte courant, à cela près qu'elle est
rémunérée.
Ces
clarifications permettent de comprendre ce qui s'est passé. En
décidant de baisser les taux d'intérêt applicables depuis
le 11 juillet 2012, l'Eurosystème a
porté le taux de rémunération de la facilité de
dépôt à 0%. Sans rémunération, la
facilité de dépôt est devenue redondante. Voilà
pourquoi, faute d'incitation financière, certaines banques ont
décidé de virer leurs liquidités de la facilité
de dépôt sur leur compte courant ordinaire. En
conséquence, 484 milliards d'euros ont été
déplacés d'un compte à l'autre, sans pour autant
disparaître le moins du monde.
Une
question subsiste pourtant: comment expliquer les quelques 212 milliards
d'euros que les banques gardent sur le dépôt à terme? En
réalité, le dépôt à terme est un instrument
à la discrétion de la banque centrale qui lui sert à
absorber l'excès de liquidité jugée systémique.
Ces 212 milliards d'euro correspondent à l'excès de
liquidité introduite dans le cadre du programme d'achat d'obligations
d'État. De leur côté, les banques acceptent de renoncer
à la disponibilité immédiate de ces fonds car elles sont
compensées par une rémunération marginalement plus
élevée, issue d'un processus d'enchères.
Finalement,
les dépôts bancaires ne pourraient diminuer que si le
système bancaire faisait face à une fuite de liquidité
au niveau agrégé. Une telle fuite se produirait si la demande de
billets augmentait, auquel cas les banques utiliseraient leurs
dépôts à l'Eurosystème
pour acquérir les billets demandés. Un autre cas possible
serait celui où l'Eurosystème
réduirait la taille de son bilan en diminuant son offre de
liquidités. Aucune de ces éventualités ne s'est produite
récemment.
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