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Les économistes qui sont d’accord
avec l’idée très populaire que l’expansion de la
masse monétaire soit le meilleur remède à nos
problèmes économiques passent complètement à
côté des inquiétudes que les gens comme moi
éprouvent quant à l’inflation, et se contentent
simplement pour nous rassurer de pointer du doigt le taux d’inflation
officiel relativement bas qui accompagne actuellement les politiques
activistes de la Fed. Dans un récent commentaire dont je suis
clairement la cible, Paul Krugman note que la
hausse de l’IPC de moins de 2,5% au cours de ces quelques
dernières années suffit à prouver que j’ai tort.
Il va même jusqu’à dire que l’indice est
relativement élevé par rapport à l’inflation et
que la Fed pourrait faire un bien meilleur travail si des
méthodologies plus laxistes étaient considérées.
Il existe en revanche un certain nombre de preuves qui démontrent
clairement l’inutilité de l’IPC, qui ne traduit que
très mal la hausse réelle des prix.
Les journaux et magazines en sont un très
bon exemple. La vérité est loin d’être retranscrite
par les rubriques économiques qu’offrent ces différents
outils, bien qu’elle le soit par le prix affiché sur leur
couverture. Par exemple, entre 1999 et 2002, l’indice ‘magazines
et journaux’ de l’US Bureau of Labor Statistics
(BLS) a augmenté de 37,1%. Il suffit d’observer attentivement
les prix des 10 magazines et journaux les plus populaires (WSJ, Washington
Post, Times, Sports Illustrated, US News and World
Report, Newsweek, People, NY Times, USA Today et LA
Times) sur la période pour se rendre compte que leur prix ont en
réalité augmenté de 131,5% (soit 3,5 fois plus
rapidement que ce qui est indiqué par les statistiques du BLS).
Certains défenseurs du BLS pourraient
répondre à cela en disant que la hausse du prix de ces journaux
a été atténuée en raison d’une
disponibilité accrue de contenu gratuit sur internet. Mais cela n’a
rien à voir avec ce que j’essaie de dire ici. Avant
l’ère digitale, le BLS aurait pu dire que le prix réel
des journaux était contrebalancé par les librairies publiques
qui en rendaient disponibles des copies gratuites. Il est vrai que les
articles disponibles sur internet peuvent avoir un impact, puisque nombreux sont
ceux qui apprécient lire des magazines et journaux sur une tablette
tactile.
Un autre exemple étonnant est celui des
assurances maladie, une couverture qui est nécessaire à tant de
familles. Selon le BLS, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes,
puisque leur prix n’aurait augmenté que de 4,3% entre 2008 et
2012. Il est intéressant de noter que sur la même
période, Kaiser Survey of Employer Sponsored
Health Insurance a
déterminé une hausse du prix des assurances maladie de 24,2%.
Si le BLS avait reporté une augmentation de prix plus importante,
l’IPC n’en aurait pas été affecté, puisque
croyez-le ou non, les assurances santé ne représentent que
moins d’1% du total de l’IPC. En 2002, Kaiser Survey
déterminait à 15.745 dollars le coût annuel moyen de
l’assurance maladie des ménages, soit au tiers de leur revenu
annuel moyen.
Si le BMS semble tomber si loin de la
réalité lorsqu’il détermine
l’évolution du prix des journaux et celui des assurances
santé, pouvons-nous lui faire confiance pour ce qui concerne les prix
des autres secteurs ? S’il se trompait pour tous les autres
produits comptabilisés dans le calcul de l’IPC tout autant
qu’il se trompe pour des assurances santé et des magazines,
l’inflation devrait aujourd’hui être à deux
chiffres !
Encore plus flagrante est la manière dont
le calcul de l’IPC a été modifié au fil des
années pour s’assurer que les augmentations de prix les plus
importantes soient laissées de côté. Depuis les
années 1970, la formule permettant de calculer l’IPC a tant
changé que l’indice ne ressemble aujourd’hui plus en rien
à ce qu’il était dans les années Carter. Les
économistes des médias grand public se contentent
d’ignorer toute critique en la qualifiant simplement de théorie
de la conspiration qui n’aurait pas lieu d’être. Mais
compte tenu des enjeux que tout cela implique, il est difficile de croire que
l’influence institutionnelle ne joue aucun rôle. Les
statisticiens employés par le gouvernement sont responsables des
changements relatifs à la formule de calcul utilisée, et leurs
patrons sont fortement récompensés si les chiffres de
l’inflation sont peu élevés. Le comportement humain est
toujours influencé par ce genre de facteurs.
L’IPC est calculé non seulement de
manière à reporter les fluctuations de prix, mais
également les choix des consommateurs, leurs habitudes d’achat
et l’arrivée de nouveaux produits. En d’autres termes,
l’indice a été modifié pour traduire non pas la
hausse des prix mais le coût de la vie, ou devrais-je dire le
coût de la survie.
Comme je l’ai déjà
indiqué dans ma Global Investor Newsletter,
j’ai moi-même mené une étude qui consiste à
sélectionner l’évolution de prix déterminée
par le BLS de vingt produits de la vie de tous les jours sur deux
périodes données de dix ans, et de comparer ces transformations
à celles reportées par l’IPC sur la même
période. Les vingt produits que j’ai sélectionné
sont : œufs, voitures neuves, lait, essence, pain, loyers,
café, services dentaires, pommes de terre, électricité,
sucre, billets d’avion, beurre, bières en canette, pommes,
transports publics, céréales, pneus de voitures, viande de
bœuf et médicaments.
Je suis conscient que tout le monde
n’achète pas autant de pommes de terres et de café que
son voisin et que la part que chacun de ces produits représente dans
le budget des ménages a changé au fil des décennies.
Mais tout ce que je cherche à déterminer ici est la
manière dont leur prix a évolué par rapport à
l’indice des prix à la consommation. J’ai choisi
d’étudier la période allant de 1970-80, ainsi que les
années 2000-2012, parce que ces deux périodes correspondent
à des politiques monétaires laxistes et à
d’importants déficits, et qu’elles correspondent aux
transformations les plus importantes en matières de calcul de
l’IPC. Alors que l’IPC a augmenté très rapidement
dans les années 70, le degré auquel le prix de nos vingt
produits a outrepassé l’IPC a été bien plus
important au cours de cette dernière décennie.
Entre 1970 et 1980, l'IPC officiel a
augmenté de 112%, et le prix de notre panier de produit a
augmenté de 117%, soit seulement 5% plus rapidement. Entre 2002 et
2012, l’IPC a augmenté de 27,5% contre 44,3% pour notre panier
de produits. Le prix de notre panier de produit a donc augmenté 61%
plus rapidement que l’IPC. Et souvenez-vous que je n’utilise
là que les données reportées par le BLS qui, comme nous
l’avons vu, sous-estime grandement la hausse des prix. Cette
différence peut être expliquée par la manière dont
est calculé l’IPC et les produits qui le composent. La formule
utilisée dans les années 1970 capture efficacement
l’évolution de prix de nos produits de la vie de tous les jours.
Mais pour ce qui est de ces dix dernières années, c’est
une toute autre histoire.
Si les hausses de prix mises en lumière
par mon étude étaient capturées par l’IPC, ce
dernier serait actuellement assez élevé pour que des
restrictions sévères soient imposées aux actions de la
Fed qui visent à stimuler l’économie. Mais la Fed
continue d’agir comme si l’inflation était très
faible et commet des erreurs qui un jour reviendront nous hanter. Au cours de
cette dernière décennie, la Fed a passé le plus clair de
son temps à nier l’existence d’une bulle sur le
marché de l’immobilier, bien qu’une montagne de preuves se
soit amassée pour nous confirmer le contraire. L’erreur commise
par la Fed de conserver les taux d’intérêts trop bas
durant trop longtemps n’a fait que gonfler cette bulle et imposer des
conséquences terribles à l’économie. La Fed,
aujourd’hui complètement aveugle face aux risques que
représente l’inflation, continue de répéter les
mêmes erreurs, et cette-fois ci, les conséquences en seront bien
plus graves.
A côté des statistiques qui
permettent de dissimuler l’inflation réelle, certains facteurs
macroéconomiques ont également contribué au maintien des
prix à des niveaux relativement bas malgré les vagues de
quantitative easing. Le déficit de la
balance commerciale des Etats-Unis et l’accumulation de dollars par les
banques centrales étrangères font qu’une grande partie
des nouveaux dollars se retrouvent dans les coffres de banques étrangères,
et non dans les centres commerciaux des Etats-Unis. Tant que des biens affluent sur le territoire Américain et que des
dollars sont envoyés à l’étranger, un plafond est
maintenu sur les prix domestiques. En effet, l’inflation des Etats-Unis
est exportée à mesure que les banques étrangères
monétisent leur déficit et recyclent leurs surplus de dollars
en obligations. La demande a forcé les rendements des bons du
Trésor à la baisse, ce qui a permis au gouvernement des
Etats-Unis d’emprunter toujours plus. Bien entendu, lorsque ces flux se
trouveront inversés, le prix des obligations chutera, leur rendement
grimpera, et un tsunami de dollars viendra s’abattre sur les
côtes Américaines, noyant les citoyens des Etats-Unis dans un océan
d’inflation.
Contrairement à ce que pensent Krugman et les Keynésiens, je pense qu’il
est impossible de créer quelque chose à partir de rien. Selon
moi, imprimer un dollar entraîne une dévaluation de la valeur de
tous les autres dollars en circulation d’un montant égal au
pouvoir d’achat de ce nouveau dollar. Selon les Keynésiens, la
nouvelle monnaie apporte une croissance économique tangible, et de la
valeur économique réelle peut être créée
par le simple fait d’ajouter quelques zéros
supplémentaires sur un morceau de papier. Pour plus
d’informations, je vous conseille de jeter un œil à ma
récente vidéo.
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