Mais
nous n’y sommes pas préparés.
Tesla a récemment fait la une
suite au premier accident causé par son système d’autopilotage, qui a manqué
de détecter un camion semi-remorque venu se placer juste devant le véhicule
sans chauffeur. Mais il arrive aussi que des humains manquent de voir
certains objets, et des accidents mortels se produisent souvent qui
impliquent des chauffeurs de chair et d’os. L’année dernière, 38.300
personnes ont été tuées dans des accidents de la route aux Etats-Unis, soit
8% de plus qu’en 2014, et 4,4 millions ont été suffisamment blessées pour
nécessiter une attention médicale.
D’autres fabricants ont des
systèmes similaires, voir plus développés que celui de Tesla, mais ils se
montrent plus conservateurs dans leur publicité et dans ce qu’ils laissent
faire les conducteurs.
Mardi dernier, Ford, pour
annoncer son projet de développement de taxis sans chauffeur, a transporté
des journalistes à bord de ses véhicules autonomes. Son service de taxis sera
d’abord disponible dans les grandes villes telles que New York et Detroit, et
se limitera initialement aux villes.
Uber teste actuellement deux
douzaines de Ford Fusion partiellement autonomes à Pittsburgh, ce qui ne
devrait pas être sans causer d’accidents. Là où il y a des véhicules en
marche, il y a toujours des accidents.
Ford a opté pour ce projet parce
que c’est ce que lui impose l’avenir. Et parce qu’il y a de l’argent à se
faire. La société s’attend à des marges de profit de 20% sur ces services, ce
qui est bien plus que les marges de ses autres activités. Les ventes de
véhicules autonomes pourraient représenter 20% de ses ventes aux Etats-Unis d’ici
la fin de la décennie.
GM et d’autres fabricants
automobiles ont des projets similaires. Google, Apple et d’autres sociétés s’aventurent
aussi sur le terrain, non pas en fabricant les voitures – dont tout le monde
se moque – mais en en développement les logiciels, les détecteurs, les
services de navigation et les interfaces « passagers » (puisqu’il n’y
aura plus de « conducteurs »). Tout le monde y met son grain de
sel. De grosses sommes de monnaie affluent sur le secteur.
Il y aura des délais, des
contretemps et des accidents. Beaucoup demanderont à ce que tout s’arrête. Et
d’autres refuseront de monter à bord de ces voitures. Il n’en est pas moins
qu’elles représentent l’avenir.
Quand je remplacerai mon
véhicule par un autre susceptible de conduire tout seul et de m’emmener en
toute sécurité jusqu’à ma destination – un jour qui ne peut pas arriver assez
vite – mon action n’aura pas de gros impact sur l’économie.
Mais ce qui se passera sur le
secteur sera une version plus restreinte de la révolution industrielle :
les chauffeurs professionnels disparaîtront.
Et la magnitude du problème est
à en couper le souffle. Voici combien de personnes travaillent dans ce
domaine aux Etats-Unis :
- 1,8
million de conducteurs de camions semi-remorque ou de long courrier en 2014, un
nombre qui gonfle en moyenne de 4% par an, et dont le salaire médian
était de 40.600 dollars par an en 2015. A ce rythme, nous devrions avoir
1,94 millions de chauffeurs de long courrier d’ici la fin de l’année.
- 1,33
million de chauffeurs-livreurs en 2014, un
nombre qui gonfle en moyenne de 4% par an, et dont le salaire médian
était de 27.800 dollars en 2015. Ils collectent et livrent de petits
paquets ou commandes au sein d’une ville ou d’une région, conduisent des
camions de 11 tonnes ou moins, généralement entre un centre de
distribution et les domiciles de particuliers. A ce taux, ils devraient
être 1,44 million d’ici la fin de l’année.
- 233.700
chauffeurs de taxi et autres chauffeurs en 2014, un
nombre qui gonfle de 13% par an. Leur salaire médian est de 23.510
dollars. Un sur cinq travaille à temps partiel. Ce nombre de prend pas
en compte les chauffeurs utilisés par Uber, Lyft et autres.
- Plus
de 500.000 chauffeurs Uber, Lyft et autres. Ce chiffre est
une estimation pour les Etats-Unis. Le
secteur est en pleine expansion : le nombre de chauffeurs Uber a
doublé en 2015 pour passer à 327.000. La moitié de ces chauffeurs
travaille quinze heures par semaine ou moins.
D’ici
la fin 2016, nous pourrions avoir aux Etats-Unis plus de 4,1 millions de
personnes qui conduisent pour gagner leur vie. Plus de 3,5 millions le font à
temps-plein.
Mais pour les sociétés du
secteur, le coût représenté par ces chauffeurs, depuis leurs salaires jusqu’aux
charges, représente le plus gros de leurs dépenses. Sans oublier que des
chauffeurs peuvent tomber malades, ont besoin de vacances et ne peuvent pas
conduire 24 heures par jour, sept jour sur sept.
Uber a annoncé
avoir perdu 1,68 milliards de dollars au cours des trois premiers
trimestres de 2015. C’est beaucoup d’argent. Et une majorité de ce drain
pourrait disparaître si la société n’avait plus à payer de chauffeurs.
Les compagnies de transport et
de livraison savent qu’automatiser le processus de conduite pourrait leur
faire économiser de très grosses sommes. Et les plus importantes cherchent
toutes à le faire.
Aucune n’emploiera uniquement
que des camions autonomes dès l’année prochaine. La transition prendra
quelques temps. Mais compte tenu des ressources investies sur la recherche, elle
ne prendra pas tant que temps que ça. D’ici quelques années, de gros chiffres
devraient commencer à apparaître.
Qu’arrivera-t-il ensuite ?
Que feront les 3,5 millions de professionnels qui auront perdu leur travail ?
Certains prendront leur retraite d’ici là. Mais le secteur représente encore
une grosse opportunité pour ceux qui n’ont aucun diplôme et souhaitent
travailler dur. Cette opportunité finira bientôt par disparaître.
Et que vont faire les employés à
temps partiel du secteur ? Comment pourront-ils complémenter leurs
revenus pour maintenir leurs dépenses, qui sont si critiques pour l’économie ?
4 millions d’emplois est un
chiffre énorme. Tous ces gens ne pourront pas se tourner vers le
développement de logiciels. Il n’y a pas assez de place pour eux dans les
usines. Même le secteur du fast-food est automatisé, comme beaucoup d’autres
emplois dans l’actualité et les médias. Tout pourrait se passer bien plus
rapidement que ne le pense la société. Et personne n’en parle.
Ce
développement technologique et ces réductions de coûts pourraient expliquer
pourquoi certains directeurs sont si baissiers sur les emplois au sein de
leur propre compagnie. Lisez ceci : The
Chilling Thing CEOs of Corporate America Said about Jobs