Mes chères contrariées, mes chers contrariens,
Autant lorsqu'elle était ministre des Finances, les propos de
Madame Lagarde étaient sans intérêt, autant ceux qu'elle
tient comme directrice générale du FMI sont dignes
d'intérêt.
Notre chère Christine a donc partagé dimanche quelques
confidences avec nous, le petit peuple. Que nous dit-elle ? Que de bonnes
nouvelles.
Souvenez-vous, il y a quelques temps, le FMI devait s'ouvrir à
d'autres pays. C'était les fameux G20 qui sauvaient le monde à
chaque fois qu'ils se réunissaient, le sauveur chef étant le
président Sarkozy. Bref, les pays émergents qui ont
émergé devaient se voir offrir plus de poids au sein du FMI.
Pour mémoire, le FMI signifie non pas Femme de Ménage
Incluse, comme peuvent le croire, injustement bien sûr, beaucoup de
citoyens depuis l'affaire DSK, mais bel et bien Fonds Monétaire
International. A l'origine, le FMI était l'organisme ayant
compétence pour gérer le Système Monétaire
International.
Donc Madame Lagarde nous a annoncé ce week-end que la Chine,
l'Inde ou le Brésil devront encore patienter avant d'être mieux
représentés au FMI: la réforme renforçant la
place des pays émergents au sein de l'institution n'entrera pas en vigueur
comme prévu au sommet du FMI à Tokyo, en raison du blocage de
fait des États-Unis.
En 2010, les pays du G20 s'étaient mis d'accord pour rebattre
légèrement les cartes au sein du conseil d'administration du
Fonds, actuellement dominé par les Européens, en donnant plus
de droits de vote aux puissances émergentes.
Cette réforme, qui fera notamment de la Chine le
troisième pays le plus puissant du Fonds, devait entrer en vigueur
lors de l'assemblée annuelle du Fonds Monétaire International
et de la Banque mondiale, qui s'achève dimanche dans la capitale
japonaise.
Mais il n'en sera rien. Comme beaucoup de choses
décidées en grande pompe lors des ultimes sommets de la
dernière chance, il ne reste rien des bonnes résolutions
quelques mois après.
La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a
dû le reconnaître vendredi : « Nous voyons la ligne
d'arrivée, elle est proche et j'exhorte à nouveau les États
membres à la franchir », a-t-elle déclaré.
La patronne du Fonds s'est bien gardée de mettre un pays
à l'index et surtout pas son principal actionnaire, les États-Unis,
qui bloque pourtant l'ensemble du processus après l'avoir
encouragé.
L'enjeu, c'est évidemment une bataille de titans pour le
leadership monétaire mondiale que se livrent les deux véritables
superpuissances économiques actuelles, la Chine d'un côté
et les États-Unis de l'autre.
Pour information, de plus en plus de rumeurs insistantes circulent
autour des officines de rachats d'or qui fleurissent depuis deux ans à
travers le monde entier, et pointent toutes vers la même
direction : l'île de Man, paradis fiscal britannique. Les
quantités phénoménales d'or collectées
viendraient réalimenter les coffres de Fort Knox et les caisses de la
Banque Centrale Américaine.
L'inextricable
situation du Système Monétaire International
Le système monétaire international est en lambeaux.
Fort de ce constat, on entend régulièrement certains
spécialistes nous expliquer qu'il serait temps de réorganiser
le système monétaire international, essentiellement
hérité de la Seconde Guerre mondiale et des accords de Bretton Woods, qui consacraient
la suprématie incontestable du roi dollar.
Pourquoi ne pas créer une nouvelle monnaie qui serait un panier
de monnaies existantes par exemple. Un peu de yen saupoudré de dollars
américains, assaisonné au yuan chinois, épicé
avec de l'euro, mâtiné d'un peu de livres sterling... On
pourrait même y rajouter quelques litres de pétrole sous forme
de barils... dont le prix reste essentiellement calculé en dollars...
Plus je cherche et moins je vois l'intérêt de ce type de
nouvelles mesures. Changer de monnaie ne change rien aux stocks de dettes. Ce
sont les dévaluations qui peuvent avoir un effet sur les « write-off » (ce mot anglais très
pratique permet aux Français de ne pas dire des gros mots comme « effacement
de la dette » ou « faillite » ; il peut
être avantageusement remplacé par le terme « hair cut »,
signifiant aussi « coupe de cheveux »).
Mettre en place une monnaie internationale aurait peut
être l'intérêt de poser des garde-fous face au
développement des intérêts nationaux qui conduisent
directement aux guerres monétaires. Certes. L'exemple récent de
la BNS (la banque nationale Suisse) prouve bien que la guerre
monétaire est une réalité. Face à
l'appréciation du Franc Suisse, devenu une valeur refuge, la Banque
Centrale Suisse a été obligée d'indiquer qu'elle
défendrait sa monnaie contre une trop forte appréciation
notamment vis-à-vis de l'euro, et que pour ce faire, elle imprimerait
autant de francs suisses que nécessaire. Ou encore l'exemple du Japon,
qui n'hésite pas à imprimer du yen autant que nécessaire
pour essayer d'éviter une appréciation trop forte mettant en
danger ses exportateurs.
Néanmoins, le monde actuel, celui du vingt-et-unième
siècle, se divise en deux grandes catégories de protagonistes.
À ma droite, les pays riches. Enfin, ce qu'il en reste. Les
pays occidentaux font face à un endettement abyssal de tous leurs
acteurs économiques. Leurs monnaies devraient aussi être
valorisées par rapport à ce stock de dettes. Dans un tel cas,
elles ne devraient pas valoir grand-chose.
À ma gauche, les pays dits émergents. Certains diront qu'ils
ont définitivement émergé pendant que nous coulions
selon le grand principe connu des vases communicants.
Eux n'ont pas de dette (enfin beaucoup moins que nous). Ils ont de
l'inflation. Beaucoup d'inflation même. L'inflation érode la
valeur d'une monnaie. C'est un phénomène bien connu.
Le constat est donc assez simple : nous avons le choix entre de
mauvaises monnaies affaiblies par les dettes et le manque de croissance ou
d'autres mauvaises monnaies affaiblies durablement par des taux d'inflation
très importants.
S'imaginer créer une monnaie internationale solide sur des
bases aussi incertaines relève de la plus grande utopie. Jamais,
jamais une telle monnaie ne pourrait inspirer confiance.
Certains diront qu'il suffirait de la rendre obligatoire. Cela s'est
déjà fait. Cela s'appelait le communisme, et même en
ex-URSS il était beaucoup plus facile d'acheter à manger en
dollars qu'en roubles... Et ce malgré le KGB. D'ailleurs, il n'y avait
pas grand-chose à manger.
Bref, l'idée d'une monnaie de remplacement qui serait un panier
de mauvaises monnaies n'est pas une bonne idée. Remarquez, les
mauvaises idées de ce type, comme le FESF ou le MES, sont assez
à la mode ces derniers temps.
Non, il n'y a pas à dire, les monnaies fiduciaires,
c'est-à-dire papier, sont dans une très, très mauvaise
passe depuis quelques années, et rien ne semble s'arranger. C'est
d'ailleurs cela aussi que nous a expliqué Madame Lagarde dimanche.
Banques
centrales : Lagarde craint une « surchauffe » dans les
pays émergents
La patronne du FMI Christine Lagarde a mis en garde dimanche contre le
risque de « surchauffe » qui menace les
économies émergentes en raison de l'action des banques
centrales aux États-Unis ou en Europe, relayant l'inquiétude de
plusieurs pays dont le Brésil.
« Les politiques monétaires accommodantes (dans les pays développés,
ndlr) pourraient alimenter des flux de capitaux volatils vers les
économies émergentes », a déclaré Mme
Lagarde en clôture de l'assemblée annuelle du Fonds Monétaire
International et de la Banque mondiale qui se tenait à Tokyo.
D'après elle, cette tendance est « clairement
accentuée » par les taux d'intérêt
élevés en vigueur dans les principales puissances
émergents, synonymes de rendements élevés pour les
investisseurs.
La conjugaison de ces facteurs « pourrait restreindre la
capacité de ces économies à absorber ces potentiels
vastes flux de capitaux et conduire à une surchauffe, à la
formation de bulles financières et à la naissance de
déséquilibres financiers », a-t-elle
déploré.
Pour lutter contre le ralentissement économique, plusieurs
banques centrales – Fed aux États-Unis, BCE en Europe, BoJ au Japon –ont assoupli leurs politiques
monétaires, en injectant massivement des liquidités dans le
circuit financier et en abaissant leurs principaux taux directeurs à
des niveaux proches de zéro.
Certains pays émergents estiment toutefois que ces actions
déstabilisent leur économie, en alimentant des flux
spéculatifs dans leur pays et en dopant artificiellement leur monnaie
au détriment de leurs exportations.
Dans son discours dimanche, la directrice du Fonds a tenté un
difficile exercice d'équilibriste en essayant de ménager les
deux camps.
Tout en pointant ces risques de « surchauffe »,
Mme Lagarde a ainsi tenu à rendre hommage à l'action des
banques centrales, « légitime » et « nécessaire »
pour relancer l'activité dans les pays riches. « Nous avons
vu de solides initiatives prises par les banques centrales que le FMI salue
au plus haut point comme des contributions majeures à la
stabilité », a ainsi déclaré la patronne du
Fonds, réitérant une prise de position déjà
connue.
Fin septembre à Washington, elle avait estimé que le
programme de rachat d'obligations publiques annoncé par la Banque
centrale européenne (BCE) marquait un « tournant »
dans la crise.
Dimanche à Tokyo, elle a toutefois reconnu que l'impact de ces
politiques monétaires sur la « crédibilité »
et « l'indépendance » des banques centrales
restait « incertain », à l'issue d'une
assemblée annuelle qui a fait apparaître de profondes lignes de fracture
au sein du Fonds.
Régulièrement pointée du doigt par les
émergents, la Banque centrale américaine (Fed), qui a
injecté plus de 2 300 milliards de dollars de liquidités depuis
2008, a
répondu dimanche à ses détracteurs en défendant
l'innocuité de sa politique.
« Les liens de cause à effet entre la politique
monétaire de pays à l'économie avancée et les
flux de capitaux internationaux sont plus lâches qu'on l'affirme
parfois », a affirmé le président de la Fed, Ben Bernanke, dans un discours à Tokyo. Très en
pointe dans ce débat, le ministre des Finances brésilien a,
lui, laissé entendre que les effets collatéraux de cette
politique « seront peut-être pires que les résultats
directs ».
« Les pays avancés ne peuvent pas espérer se
débarrasser de la crise aux dépens des pays émergents »,
a déclaré Guido Mantega samedi dans
la capitale japonaise, assurant que son pays pendrait « toutes les
mesures nécessaires » pour se protéger contre
l'afflux massif de capitaux.
Jouer avec
les monnaies n'est jamais, jamais inoffensif
Reprenons et détaillons donc quelque peu le raisonnement.
À ma droite, les pays riches qui font face à un
endettement abyssal de tous leurs acteurs économiques. Ces pays
impriment de plus en plus de fausses monnaies, sans réussir à
créer plus de croissance et sans pour autant résorber leurs
stocks de dettes qui sont même en train d'augmenter.
À ma gauche, les pays dits émergents. Ils ont de
l'inflation. Beaucoup d'inflation même. L'inflation érode la
valeur d'une monnaie.
Hélas, ces pays émergents naturellement soumis à
des pressions inflationnistes sont le réceptacle d'une partie non
négligeable de la fausse monnaie occidentale créée. Cela
exacerbe donc les tendances inflationnistes de ces pays, aggravant
l'érosion de leur monnaie.
Nous nous retrouvons donc avec des monnaies de plus en plus
mauvaises... quel que soit le pays dont nous parlons ou le côté
ou nous regardons.
Normalement, vous devriez commencer à comprendre pourquoi tout
le monde veut vous arracher la vieille dent en or que vous avez encore dans
la bouche.
Lorsque la crise monétaire frappera, et elle viendra, lorsque
le système monétaire international s'effondrera, et ce sera le
cas, les banques centrales compteront leurs lingots d'or qu'elles
rachètent discrètement à travers toutes les officines
qui désormais pullulent... Et vous, qu'aurez-vous à compter ?
Des euros sur un contrat d'assurance vie ou des pièces d'or ?
Charles SANNAT
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