Les autorités n’arrêtent plus
de nous dire que l’infirmière qui a été contaminée par le virus de l’Ebola
alors qu’elle prenait soin de Thomas Eric Duncan a porté sa combinaison hazmat pendant tout le temps qu’elle s’occupait du pauvre
homme, et bla-bla-bla, personne ne sait comment elle a pu attraper le virus…
Mais les journaux et réseaux d’information ne se posent aucune question quant
aux autres personnes, aux citoyens ordinaires avec lesquels l’infirmière a pu
interagir hors de son lieu de travail, après avoir retiré sa combinaison de
protection. Peut-être s’est-elle arrêtée devant l’étalage fumant de repas à
emporter des magasins Kroger en rentrant chez elle
après sa journée de travail ? Voilà qui ferait une excellente nouvelle
série américaine - The Fatal
Mac and Cheese.
Si une personne de plus venait
à tomber malade, Rick Perry aurait à boucler Dallas plus vite que vous pouvez
dire Guadalupe Hidalgo. La course à la quarantaine sera lancée au travers des
Etats-Unis. Il sera intéressant de voir qui sera le premier à se débarrasser
de ses actions sur les sociétés aériennes. Je dois moi-même passer demain par
l’aéroport de Dulles, et par deux autres aéroports étrangers, avant de retourner
à Newark International en fin de semaine, alors qu’une panique sera peut-être
en cours.
Je suis pour le moment à
Washington pour assister à une conférence sur la population et l’immigration.
Croyez-le ou non, certaines personnes cherchent à avoir une conversation
honnête sur la question, au milieu des débats hypocrites entre rêveurs qui
émanent du bureau ovale en cette ère misérable de
politique-comme-art-conceptuel. Il faut dire que l’éventualité de propagation
d’un dangereux virus force la question. Rien n’attire plus l’attention d’une
nation que le spectre du peuple voisin, saignant par les oreilles et par le
nez.
Voici quels sont les
rendements décroissants de l’économie globale. Ils ont toujours été présents,
mais n’ont jamais été aussi frappants ou horrifiants que l’Ebola. Les
employés chinois de FoxConn désespérés qui se sont
jetés par les fenêtres de leur usine ressemblent désormais à des victimes de
farces de confrérie. Une force a été libérée au cœur des ténèbres, qui
ressemble fortement à la bête sortie de la cage thoracique de John Hurt dans Alien pour glisser jusqu’au vaisseau
Nostromo. Une métaphore n’est rien de plus qu’une
figure de style, mais il arrive parfois qu’elle puisse vous déchirer la
chemise.
Le mélodrame de l’Ebola a tout
ce qu’il faut pour déchirer la chemise de l’économie globale. Et il faut dire
qu’il ait bien choisi son moment : le hoodoo
des banques centrales touche à sa fin – et j’entends par là les fraudes
comptables, les chèques sans provision et les relations publiques qui ne
pourront que substituer d’authentiques relations économiques jusqu’à ce que
l’ombre de la réalité vienne les balayer. Les marchés amorçaient déjà la
semaine dernière le stage de vomissements de leur contagion hémorragique.
Peut-être le S&P commencera-t-il cette semaine à saigner par les yeux et
les oreilles.
Du sang a certes été répandu
sur les routes embouteillées de la région du Bakken,
où un baril à 88 dollars ne permet plus à quiconque de prétendre avoir lancé
une entreprise à succès. La fée du pétrole de schiste est au cœur d’une
matrice de mensonges que les Etats-Unis n’ont cessé de se répéter quant à
leur effervescence économique. L’Amérique Saoudite et tous les autres, au
service du maître désir des Etats-Unis : Dieu tout puissant,
laissez-nous prendre la voiture jusqu’à WalMart
jusqu’à la fin des temps…
Nous voilà face à l’un des
grands évènements de notre temps : notre monde a grand besoin de
transformations démographiques désespérées, à mesure que de plus en plus de
régions sont déclarées impropres à l’habitation humaine. Combien de temps
devrons-nous prétendre que tous les réfugiées du monde devraient être les
bienvenus, le nez et les oreilles ensanglantées, et rêvant de poser de la
tourbe pour six dollars de l’heure ou d’égorger des poulets pour la gloire du
Colonel Sanders ? Je doute qu’il y ait suffisamment de place pour tous
dans le vaisseau du profit qui nous portera vers de nouveaux mondes sur
lesquels l’ombre des ailes de la réalité ne s’est jamais projetée.