Les économies française et britannique sont depuis longtemps
intimement liées, et pas uniquement en raison de leur partenariat dans le
domaine aéronautique. Par conséquent, le résultat du référendum pour la
sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne risque bien d’avoir également des
conséquences directes, et à court terme, sur l’économie de notre pays, à
commencer par nos échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne.
En 2015, le Royaume-Uni était le 7ème principal partenaire commercial de
la France avec plus de 51 milliards d’euros échangés. À lui
seul, le Royaume-Uni représente près de 4% du total des importations
françaises et 7% des exportations. Mais au-delà de la part significative des
échanges commerciaux avec le Royaume-Uni, le plus important réside surtout
dans le fait qu’il s’agit de l’un des rares partenaires avec lequel la France
parvient encore à réaliser un excédent commercial.
Le Royaume-Uni est le partenaire commercial de la France le plus
“rentable”
C’est même le pays avec lequel la France réalise, de loin, son plus grand
solde commercial positif. Ainsi, l’an dernier, les exportations françaises à
destination du Royaume-Uni se sont élevées à 31,7 milliards d’euros, contre
“seulement” 19,6 milliards d’euros d’importations en provenance de
Grande-Bretagne, nous permettant de dégager un excédent commercial de
12,1 milliards d’euros.
Or, l’une des premières conséquences du Brexit à laquelle les Anglais ont
dû faire face dès l’annonce des résultats du référendum de jeudi dernier, ce
fut la chute brutale de la Livre Sterling, laquelle est
retombée en moins d’une journée à son niveau du début des années 1980.
Économiquement, une dévaluation n’est pas toujours une mauvaise nouvelle, et,
par exemple, avec une Livre qui perd de sa valeur, l’intérêt des autres pays
pour les produits britanniques peut connaître un certain regain d’intérêt.
Cependant, il ne faut pas oublier que, dans le même temps, l’achat de
produits et services étrangers, notamment en euros, devient mécaniquement
plus onéreux pour les Anglais, et cet effet néfaste peut toucher
plus particulièrement les productions françaises destinées à l’export.
Un scénario qui tend vers l’équilibre des échanges commerciaux ?
Ainsi, si on imagine que le niveau des échanges commerciaux se mette à
suivre l’évolution de la Livre Sterling, dont la perte avoisine
désormais les 20%, les exportations françaises à destination du
Royaume-Uni pourraient donc reculer elles-aussi de 20%, tandis que les
importations en provenance du Royaume-Uni s’apprécieraient, elles aussi, de
20% en retour. On aurait alors un quasi-équilibre à 25 milliards d’euros de
part et d’autre de la Manche.
Or, non seulement, l’excédent de 12 milliards dont nous bénéficiions
jusqu’ici ne serait plus qu’un doux souvenir, mais nos producteurs de biens
et services verraient également leur chiffre d’affaires fondre de plus de 6
milliards d’euros par an. Au total, le Brexit pourrait donc nous coûter au
moins 18 milliards d’euros uniquement sur la base de cet
ajustement.
Néanmoins, les observateurs financiers se veulent rassurant et assurent
que l’effet de la dépréciation de la livre sur les exportations
françaises devrait rester limité, du moins tant que l’euro restera
faible face au dollar. Et pour l’instant, c’est vrai qu’avec un euro
désormais passé en-dessous de la barre des 1,10 dollar, la tendance est
plutôt à la baisse, histoire de limiter la casse sur les marchés financiers.
Mais qui sait combien de temps encore les mécanismes mis en place pourront
absorber le choc, surtout que les Américains risquent bien de ne pas
apprécier bien longtemps les conséquences d’un dollar renforcé pénalisant, à
terme, leurs propres exportations.