Mes chères
contrariées, mes chers contrariens !
Dans la vie des peuples et des
nations, dans l’histoire de l’homme, les gamelles tiennent une
place toute particulière.
Les révolutions naissent
rarement des idées ou, plus précisément, pour
qu’une révolution puisse avoir lieu et que les peuples se
soulèvent il faut en général attendre que les gamelles
soient vides. Une fois vides, les populations sont en mesure de se
fédérer autour de revendications politiques et
économiques qui donnent une « doctrine »
révolutionnaire, MAIS le préalable à tout
soulèvement c’est en général la faim.
La faim en 1789, lorsque notre
reine (qui n’était pas encore la reine anglaise) proposait au peuple,
qui n’avait plus de pain, de manger de la brioche.
La faim, dans les révoltes du printemps arabe qui trouvent
essentiellement leur origine dans l’augmentation des prix des produits
alimentaires.
La faim, évidemment, dans la révolution russe de 1917 où
le peuple était affamé dans des
proportions inouïes.
Dans nos sociétés
modernes, la faim est pour le moment virtuelle. Personne aujourd’hui,
ou presque, n’a faim en tout cas dans notre pays, et en
général pas bien longtemps. Le traitement social et la générosité
à travers les banques alimentaires permettent pour le moment
d’éloigner ce spectre.
Mais, et c’est important, il
existe une forme moderne de faim. Une espèce de faim 2.0 si vous
voulez. Ce qui est insupportable aujourd’hui ne l’était
pas hier. Les choses ont beaucoup changé en 50 ans et nous nous sommes
habitués à un confort très important, nous sommes
devenus dépendants de certaines choses. Psychologiquement, dans la
mesure où nous avons été conditionnés depuis des
décennies à devenir uniquement de bons consommateurs
lobotomisés aux comportements compulsifs, avoir faim c’est par
exemple être exclu de l’acte d’achat.
De la même manière, toucher aux gamelles c’est toucher aux
tickets resto. Les tickets resto ne concernent que les salariés du
privé. Il n’y en a pas pour les fonctionnaires, ce qui explique
vraisemblablement que l’État ne voit pas le
mécontentement monter de la part de ceux à qui on touche la
gamelle moderne. Ces bons d’achats alimentaires profitent à tous
mais ils facilitent grandement le quotidien des plus modestes des
salariés.
Le chômage est donc un point
crucial à surveiller, ce que font parfaitement nos zélites
qui, bien que stupides, ne sont pas non plus totalement demeurées.
Elles ont bien compris qu’en excluant durablement de l’emploi une
partie de plus en plus importante de la population, nous étions en
train de créer les conditions d’une danse sur un volcan social
dont vous voyez avec l’actualité dans nos banlieues les
premières matérialisations d’un ras-le-bol
généralisé.
Une France fragmentée qui
pourrait se réunifier !
Pour le moment, je constate que la
France est fragmentée. Fragmentée entre communautés,
fragmentée géographiquement. La France (et les Français)
des centres-villes, des banlieues et des campagnes
n’est pas sociologiquement et culturellement la même. Les
attentes, les demandes, les cultures peuvent être différentes
mais, et c’est là plutôt un message optimiste, finalement
les rêves de la très grande majorité des concitoyens,
quelles que soient leurs convictions, sont les mêmes !
Avoir du travail, que mes enfants puissent avoir mieux que nous, leurs
parents, qu’ils puissent se bâtir une vie digne, que l’on
puisse tous vivre convenablement, idéalement partir un peu en
vacances, bref, il n’y a rien de démentiel dans les attentes
françaises.
Sur l’essentiel qui est partagé, tout le monde pourrait se
retrouver et le chômage comme la crise économique au sens large
sont des éléments forts et structurants capables de
cristalliser tous les mécontentements au-delà des clivages que
l’on pense indépassables.
Chômage : Ayrault plus
confiant que jamais
C’est le titre d’un
article du Point qui nous explique que « Jean-Marc Ayrault a
estimé jeudi après la nouvelle hausse des chiffres du
chômage en juin que l’objectif d’inverser la courbe du
nombre des demandeurs d’emploi d’ici à la fin de
l’année était « tenable » et
« souhaitable ». « On n’a jamais tout
essayé contre le chômage. C’est une bataille
permanente. » Jean-Marc Ayrault a rappelé le plan de 30 000
contrats de formation pour répondre aux offres d’emploi non
pourvues ainsi que l’objectif fixé par François Hollande
mardi de 100 000 formations en année pleine. « C’est
une bataille de tous les instants. Les derniers chiffres montrent qu’il
faut encore pousser l’effort même si je constate que depuis deux
mois consécutifs le nombre de jeunes (demandeurs d’emploi)
diminue », a-t-il poursuivi ».
Blablablablabla… Il est gentil Ground Z’Ayrault mais il
ne se rend pas compte, ainsi que son mamamouchi de Président, que nous
n’avons pas envie d’entendre que tout va bien car cela est
vécu en réalité comme une insulte par les
Français (comme il n’y a personne pour l’expliquer, moi je
le fais).
Chacun de nos concitoyens voit bien sa réalité quotidienne. Lui
dire que ce qu’il voit est faux est d’une très grande
stupidité. C’est contre-productif. Cela
décrédibilise la parole publique et
présidentielle… et ne remontera en aucun cas le moral des
Français !
Dire la vérité (ou presque) en donnant un cap et une direction
serait nettement plus efficace, sauf qu’avec un gouvernement navigant
à vue et sans vision c’est impossible.
Bon, Michel Sapin, pour le coup,
est nettement moins crétin que le reste de la bande bien que nettement
plus drôle dans ses appréciations.
Sapin sur le chômage :
« Le retournement n’est pas là »
« Invité
d’Europe 1, jeudi matin, Michel Sapin est notamment revenu sur les
chiffres du chômage dévoilés la veille, qui sont encore
à la hausse. « Le retournement n’est pas
là », a reconnu le ministre du Travail. Alors que
François Hollande a estimé il y a peu que la
« reprise est là », son ami de 30 ans est moins
optimiste. « Il y a des signes d’amélioration en
termes de reprise – légère – de la
croissance, d’emplois, mais il faut continuer la mobilisation,
continuer l’effort, être dans l’action. »
Et de rajouter, « mais pour
pouvoir inverser, il faut d’abord ralentir ». Et de conclure
: « Non, le retournement n’est pas là. Il y a un
ralentissement. Le ralentissement, c’est le moment qui précède
le retournement » de la courbe du chômage, en hausse depuis
26 mois. C’est la bataille que nous menons avec le
président. » »
Bon, beaucoup de bla-bla, pas
beaucoup d’espoir certes, mais au moins il me prend moins pour un con,
ce qui me convient bien. Je ne demande pas à ce que l’on me
parle comme à un neuneu.
Mon passage
préféré dans cette intervention est bien sûr
celui-ci : « Non, le retournement n’est pas là. Il y a un
ralentissement. Le ralentissement, c’est le moment qui
précède le retournement. » Le coup du ralentissement
c’est le moment qui précède le retournement et donc
l’inversion, je dois dire que j’ai trouvé ça
génial et que j’ai beaucoup rigolé. C’est dur quand
même d’être sinistre. Qu’est-ce qu’il ne faut
pas dire… On pourrait expliquer à Michel Sapin que la nuit
précède le jour. Que la pluie précède le beau
temps ou inversement… Enfin, il ne faut pas trop lui en demander,
c’est un ministre !
Il y a le chômage en France
mais ce n’est pas un problème français, c’est aussi
un sujet européen.
Espagne : le chômage baisse
pour la première fois en deux ans
« Le chômage a
baissé en Espagne au deuxième trimestre pour retomber sous la
barre psychologique des 6 millions de demandeurs d’emplois, a
annoncé l’Institut national de la statistique, jeudi 25 juillet.
»
Alors évidemment, ils sont tous supers contents ! Voilà,
c’est la fin de la crise les affaires repartent.
D’abord, il est totalement
faux de dire que c’est la première fois en 2 ans
puisqu’à la même période l’année
dernière, le chômage avait également baissé en
Espagne ! Mais comme personne ne va aller vérifier et que tout le
monde a déjà oublié les grands titres d’il y a un
an, on s’en fiche et on peut raconter n’importe quoi !
Ma phrase
préférée dans cet article, c’est celle-là :
« Mariano Rajoy,
le chef du gouvernement espagnol, a réalisé le souhait le plus
cher de François Hollande : inverser la courbe du chômage
»… ce qui vient crédibiliser et rendre potentiellement
possible la parole présidentielle. Du grand art digne de la Pravda.
Mais même cet article de BFM
a du mal à cacher la vraie réalité des choses à
savoir que :
« La baisse du nombre de
chômeurs enregistrée au second trimestre est liée aux
nombreux emplois saisonniers créés pendant la période
estivale. Ainsi, le secteur des services a vu le nombre de demandeurs
d’emplois reculer de 157 900. Mais l’industrie a aussi
enregistré de bons scores (-37 500 chômeurs), la construction
(-25 500 chômeurs) et l’agriculture (-24 200 chômeurs).
Reste que sur un an, la tendance
est toutefois à la hausse. Le pays, plongé en récession
depuis deux ans, a enregistré 284 500 demandeurs d’emploi en
plus. »
Eh oui mes chers contrariens, l’Espagne reste un pays touristique
avec une saison touristique, où il faut embaucher pour s’occuper
des touristes, et virer tout le monde une fois les touristes partis…
Souvent, l’économie c’est simple. Très simple
à comprendre et anticiper. Le chômage en Espagne (et en France,
également grand pays touristique) repartira à la hausse en
septembre, ce que sait très bien notre ministre du Chômage…
pardon de l’Emploi.
500 euros de salaire ?
« Consommez », encourage un ministre grec
En Grèce, ils sont avance
sur tout le reste de l’Europe (bien que les Chypriotes soient en train
de les rattraper).
Ils ont non seulement la palme
d’or du nombre de chômeurs mais également la
médaille d’or de la baisse des salaires de toute la population
depuis cinq ans. Une superbe performance rendue possible grâce à
l’intervention de la famille européenne, et des coachs FMI et BCE !
Je vous disais donc un peu plus
haut que nos zélites n’étaient
pas totalement demeurées… Pour nos pauvres copains grecs, je
crains que ce ne soit pas aussi vrai…
« Le vice-ministre grec du
développement a provoqué l’émoi mercredi pendant
le débat parlementaire sur l’extension de l’ouverture le
dimanche des commerces en défendant avec fougue la liberté de
consommer de ses concitoyens qui gagnent « 500 euros de
salaire ».
Face aux critiques faisant valoir que le fait d’avoir des commerces
ouverts plus souvent ne changerait rien au pouvoir d’achat de la
population, Thanassis Skordas
a mis en exergue l’appétit supposé de consommation des
Grecs en s’appuyant sur l’exemple de la hausse des ventes de
Smartphones ces dernières années, malgré la crise, a
rapporté l’agence de presse grecque semi-officielle ANA.
« Ce que je veux dire,
c’est que personne ne peut dicter au consommateur ce qu’il doit
acheter avec ses 500 euros de salaire. Qu’il les dépense en
Smartphone ou en culture, c’est son affaire », a plaidé
le ministre du gouvernement de coalition droite-socialiste.
»Voilà, j’adore les socialistes modernes !
Mais il est allé encore plus
loin dans la crétinerie la plus confondante :
« Il a regretté que la
Grèce se complaise dans « la pleurnicherie et la
misère » au lieu d’aller de l’avant avec des
horaires d’ouverture des magasins qui arrangent le consommateur.
»
Ils n’ont même pas
compris qu’une fois que toute la population européenne serait
miséreuse, ils n’auront plus de consommateurs solvables pour
sauver leurs marges plantureuses et leurs profits monumentaux… Ce
sinistre grec ne comprend même pas qu’avec 500 euros (et encore,
si on les gagne) une fois payé un logement et éventuellement de
la nourriture, il ne reste plus rien pour consommer… le samedi ou le
dimanche, et que d’ailleurs il n’y a plus beaucoup de magasins
pour aller dépenser ses sous vu que 120 000 ont baissé le
rideau depuis 5 ans, ce qui est considérable dans un si petit pays.
Ils tournent en rond, prisonniers
d’une logique qui ne fonctionne pas et dont personne ne veut sortir, ici
comme ailleurs, en Grèce comme en France.
Charles SANNAT
Ceci est un article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de
reproduction en tout ou en partie à condition que le présent
alinéa soit reproduit à sa suite. Le Contrarien
Matin est un quotidien de décryptage sans concession de
l’actualité économique édité par la
société AuCOFFRE.com. Article écrit par Charles SANNAT,
directeur des études économiques. Merci de visiter notre site.
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http://www.lepoint.fr/economie/chomage-inverser-la-courbe-un-objectif-tenable-pour-ayrault-25-07-2013-1708176_28.php
http://www.europe1.fr/Emploi/Sapin-sur-le-chomage-le-retournement-n-est-pas-la-1593347/
http://www.bfmtv.com/economie/espagne-chomage-baisse-premiere-fois-deux-ans-566960.html
http://www.7sur7.be/7s7/fr/1505/Monde/article/detail/1674813/2013/07/24/500-euros-de-salaire-Consommez-encourage-un-ministre-grec.dhtml
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