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Le
marché des livres en ligne ne cesse de croître
et la crise économique ne semble pas avoir eu d’impact sur cette
croissance qui fut de l’ordre de 10,5% en 2009. Cette
année-là, les librairies en ligne représentaient 7% de
la vente totale des livres en France contre seulement 3% en 2005. Cette part
devrait logiquement continuer d’augmenter.
Ce
marché est, de plus, extrêmement concurrentiel. Si les sites
Amazon.fr et Fnac.com se taillent, pour l’instant, la part du lion, de
nouvelles entreprises s’implantent sur le marché, telles que Chapitre.com,
Priceminister.com, Abebooks.fr…
Internet faisant l’objet d’une régulation moindre, il ne
faut pas s’étonner de voir fleurir un tel climat concurrentiel.
Par ailleurs,
la vente de livres en ligne apporte de nombreux avantages :
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l’absence de déplacements,
coûteux en temps, vers les librairies
« physiques » (si tant est qu’on la chance
d’habiter dans une ville où se trouvent de telles librairies).
-
Certains considèrent que, sur
Internet, on perd le plaisir de feuilleter un livre et qu’on a ainsi
tendance à acheter n’importe quel ouvrage sans se renseigner au
préalable ? Pas de problème ! Google Books et Amazon
ont prévu des systèmes de feuilletage en ligne. Au moins, les
acheteurs les plus maniaques savent que le livre qu’ils ont
acheté n’a pas été tripatouillé par d’autres
utilisateurs.
-
La possibilité de trouver des
livres rares et épuisés.
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La popularisation du marché de
l’occasion. Ce marché avait déjà été
judicieusement exploité par la librairie Gibert Joseph mais, là
encore, il fallait « se bousculer au portillon » pour
obtenir la denrée recherchée et
« doubler » les autres acheteurs. Quant aux petites
librairies, leur nombre est faible et leurs moyens informatiques souvent trop
peu développés pour que le client espère trouver, en un
clic de souris du libraire, la perle rare.
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Enfin, Internet est un bon moyen, pour
ces petits libraires, de reprendre quelques parts de marché, leur
présence sur les sites de vente en ligne étant assez
importante.
Le marché
global du livre (Internet inclus) pourrait être encore plus dynamique
si la législation française sur le prix unique du livre était
abolie. En effet, selon cette loi, plus communément appelée
« loi Lang », chaque livre a
un prix fixé par l’éditeur ou par l’importateur qui
est imposé à tous les détaillants.
Cette loi viole donc
les principes centenaires du juste prix, selon
lesquels, tout simplement, le prix le plus juste est celui sur lequel s’accordent
le vendeur et l’acheteur, sans intervention coercitive
extérieure. La justification
donnée par Jack Lang était que le livre n’est pas un
« produit marchand banalisé ». Bref, rien
d’autre qu’une assertion péremptoire sans fondement
d’un détracteur de l’économie de marché, dont
la loi a lésé un certain nombre de personnes :
-
Tout d’abord, les consommateurs,
qui trouvent que les livres sont beaucoup trop chers en France, en
comparaison avec le Royaume-Uni où ce marché est beaucoup plus
dynamique depuis la suppression, en
1995, des réglementations relatives au prix unique.
-
L’édition, elle-même,
ne sort pas toujours gagnante des effets de cette loi puisque, comme le
précise le député, Jean Dionis
du Séjour, 100 millions de livres invendus seraient détruits
chaque année, en partie du fait de la rigidité extrême de
la loi Lang. Ces mêmes éditeurs souffrent encore plus,
aujourd’hui, de ces prix uniques puisque la
« popularisation » du marché de l’occasion
permise par Internet détourne les acheteurs du marché du neuf.
À plusieurs
reprises – la dernière datant de 2008
– Michel-Édouard Leclerc, président des centres de
distribution éponyme, tenta de faire minimiser la portée de
cette loi, fût-ce par la voie
juridictionnelle. On ne peut pas dire que cela a fonctionné comme
il l’aurait souhaité. Internet aurait dû, de facto, rendre
ce texte désuet. Bien au contraire, nos politiciens, toujours à
contre-courant de l’évolution économique, ont même
cru bon, récemment, de préjudicier au marché du livre
numérique en lui transposant
les mêmes règles que celles applicables aux livres physiques.
Certains,
plus à gauche, proposent même, de manière
démagogique, un prix unique de la culture sans se soucier des
conséquences sur les finances publiques : en effet, le sieur
Montebourg souhaitait que les citoyens français s’acquittent
d’un droit d’accès aux institutions culturelles publiques
(théâtre, danse, musée, expos…) inférieur à
10 euros. Ce projet – qui restera sans doute mort-né suite
à son élimination
de la course à la primaire socialiste –
demeurait flou, le candidat socialiste étant plus
intéressé par son élection que par une explication
détaillée des mécanismes de ce plan de prix unique de la
culture.
La
« révolution technologique » permise par le Net
n’a donc pas encore permis de bousculer la législation sur le
prix unique du livre, les politiciens souhaitant même l’extension
de ses principes à d’autres services culturels.
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