Article de Jim Rickards, publié le 20 septembre 2016 sur DailyReckoning.com
:
« Avez-vous une lampe de poche et des piles en réserve à la maison en
cas de panne d’électricité ? Évidemment. Mais avez-vous 100 onces
d’argent en pièces ? Vous devriez.
En effet, en cas d’effondrement social ou des infrastructures, par exemple
si les banques, les DAB et les lecteurs de carte des magasins sont hors
service, les pièces d’argent pourraient être la seule façon d’acheter le
nécessaire pour votre famille. C’est l’une des nombreuses raisons pour
lesquelles les ventes d’argent, en pièces et en lingots, vont exploser.
Lorsque cela aura lieu, des pénuries apparaîtront et le prix de l’argent
pourrait grimper jusqu’à 60 $ l’once ou plus, soit un gain de 200 % par
rapport au niveau actuel d’environ 20 $ l’once.
Comme vous le savez, j’écris et je parle souvent sur le rôle de l’or dans
le système monétaire. Par contre, j’évoque rarement l’argent. Certains en
déduisent que je pense que l’argent n’a pas sa place dans votre portefeuille
d’actifs tangibles. C’est faux. En fait, en cas de crise extrême, l’argent
pourrait être plus pratique que l’or en tant que moyen d’échange. Une pièce
d’or est trop précieuse pour payer le contenu du panier de votre supermarché,
par contre une ou 2 pièces d’argent sont idéales.
L’argent est plus difficile à analyser que l’or car le métal jaune est principalement
utilisé en tant que monnaie (l’or est largement utilisé en bijouterie, mais
je considère les bijoux en or en tant qu’actifs tangibles, en tant que
« richesse portable »). L’argent, à l’opposé, dispose de nombreuses
applications industrielles. L’argent est une véritable matière première ainsi
qu’une forme de monnaie.
Cela signifie que le cours de l’argent peut fluctuer en fonction de son
utilisation industrielle, en dehors de la conjoncture économique et
indépendamment de facteurs monétaires comme l’inflation, la déflation et les
taux. Néanmoins, l’argent métal est une forme de monnaie (tout comme l’or,
les dollars, les bitcoins et les euros), et l’a toujours été.
Alors que les épargnants et les investisseurs perdent confiance en
l’argent papier émis par les banques centrales, ils se tourneront de plus en
plus vers la monnaie physique (l’or et l’argent), ainsi que les monnaies
électroniques qui ne sont pas émises par les banques centrales (bitcoin et
les autres cryptomonnaies), en tant que réserve de valeur et moyen d’échange.
C’est pourquoi je qualifie l’argent métal de « monnaie d’hier et
d’aujourd’hui », car le rôle futur de l’argent métal en tant que monnaie
ne sera que le rétablissement de son rôle traditionnel.
Avant la Renaissance, la monnaie mondiale consistait en des pièces et des
lingotins de métaux précieux. Les empereurs et les rois accumulaient de l’or
et de l’argent, en distribuaient à leurs troupes, se battaient pour en
acquérir et se le volaient mutuellement. Depuis l’Antiquité, le foncier est
une autre forme de richesse. Par contre, il ne s’agit pas d’une monnaie car,
au contraire de l’or et de l’argent, il est difficile de l’échanger et sa
qualité n’est pas uniforme.
Au 16e siècle, les banquiers florentins commencèrent à accepter des dépôts
d’or et d’argent en l’échange de reçus qui promettaient de restituer le métal
sur demande. Ces reçus papier étaient plus pratiques que le métal physique.
Ils pouvaient être emportés à l’étranger pour être échangés dans une agence
de la banque florentine locale. Ce papier n’était pas un engagement non
garanti, mais véritablement un reçu concernant du métal précieux se trouvant
dans un coffre.
Les banquiers de la Renaissance ont ensuite très vite compris qu’ils
pouvaient utiliser les métaux précieux en leur possession à d’autres fins,
par exemple pour accorder des prêts à des princes. Cette situation a engendré
un surplus de reçus en circulation par rapport au métal dans les coffres. Les
banquiers partaient du principe que les reçus ne seraient pas tous échangés
en même temps contre du métal, qu’ils pourraient toujours avoir de quoi
satisfaire les demandes avec les remboursements des princes et des autres
emprunteurs.
C’est ainsi qu’est né le système de réserve fractionnaire, dans lequel le
métal existant ne représente qu’une partie de la promesse papier. Mais malgré
cela, l’or et l’argent physique conservèrent la prépondérance dans ce système
mixte. (…)
Dans ce système, l’argent remplissait un rôle majeur. Si le métal jaune
était la monnaie mondiale de premier choix, l’argent était la devise mondiale
de premier choix.
La popularité de l’argent en termes monétaires à l’époque s’explique par
l’offre et la demande. L’or était difficile à trouver, l’argent était plus
abondant. Le premier QE de l’histoire fut inventé par Charlemagne au 9e
siècle lorsqu’il remplaça les pièces d’or par des pièces d’argent afin
d’augmenter la masse monétaire dans son empire. L’Espagne fit la même chose
au 16e siècle.
L’argent dispose de nombreuses qualités. Tout comme l’or, sa qualité est
uniforme, il est malléable, relativement rare et plaisant à l’œil. Après la
criminalisation de la possession d’or aux États-Unis en 1933, les pièces
d’argent circulèrent librement. La monnaie américaine a produit jusqu’en 1964
des pièces (dollars) contenant 90 % d’argent. La dévaluation a commencé
en 1965.
En fonction de la pièce (10 centimes, 25 centimes ou 50 centimes), la
quantité d’argent a baissé de 90 à 40 % pour tomber à zéro au début des
années 70. Depuis, les pièces américaines en circulation contiennent du
cuivre et du nickel. (…)
Le cours de l’argent a très bien tenu malgré des vents contraires
significatifs. Il a quelque peu reculé depuis son plus haut récent de 20,37
dollars (13 juillet). Il se maintient néanmoins aujourd’hui au-dessus de
19 $, et ce malgré les expirations des options qui approchent, les
positions existantes bearish du COMEX, les craintes concernant le
Brexit qui se dissipent, l’augmentation des marges du COMEX, un dollar plus
fort, de nouvelles déclarations allant dans le sens d’une hausse des taux en
septembre par la Fed, etc.
En théorie, un seul de ces facteurs est suffisant pour faire baisser
significativement l’argent. Le fait que celui-ci ait résisté malgré tout ceci
est un signe bullish. (…) Malgré le dollar fort en ce moment et la
posture agressive de la Fed sur les taux, l’économie américaine ne peut pas
composer avec un dollar fort.
C’est déflationniste, ce qui éloigne la Fed de ses objectifs d’inflation.
La Fed ne bougera pas en septembre (probablement cette année aussi). Lorsque
cette posture conciliante sera prise en compte par les marchés, le dollar
baissera et le prix en dollars de l’argent sera dopé.
Peu importe le résultat de l’élection présidentielle, les États-Unis
seront le théâtre de parachutage d’argent par hélicoptère en 2017. (…) Les
réactions du marché à ces événements, à partir de la mi-novembre, seront un
vent favorable puissant pour l’argent. C’est pourquoi les investisseurs
devraient se positionner maintenant. »