On a coutume de dire que les classes moyennes constituent la
catégorie sociale la plus malmenée par les trépidations économiques et
politiques actuelles, et force est de constater que leur situation financière
ne cesse de se dégrader depuis quelques années au point que de plus en plus
de ménages qu’on aurait pu croire jusqu’ici à l’abri du besoin se retrouvent
chaque jour en situation de “faillite personnelle”.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les personnes les plus endettées
ne sont pas toujours les plus démunies. Il s’agit très souvent d’employés et
de cadres moyens dont l’excès de confiance envers l’avenir peut rapidement
les conduire jusqu’aux commissions de surendettement lorsqu’ils sont frappés
par un accident de la vie ou que leurs revenus baissent brusquement.
Quand l’aisance financière mène au surendettement
On connait tous des gens dont le caractère dépensier confine à la
pathologie. Et bien souvent, plus ces personnes ont de l’argent et plus elles
ont tendance à le dépenser sans compter. Avec malheureusement parfois des
conséquences dramatiques à la clé, aussi bien financières que
professionnelles, mais aussi familiales et personnelles. Toutefois, ces cas
d’acheteurs compulsifs sont rares : ils ne représentent jamais plus de 25%
des dossiers de surendettement.
La plupart du temps, le surendettement concerne des foyers dont
l’équilibre financier s’est brusquement effondré à cause du chômage, d’un
divorce, du décès d’un conjoint ou encore d’une maladie. Sur
ce plan, toutes les catégories ou presque sont sur un pied d’égalité, et les
ménages aisés ne font pas exception à la règle. Le responsable d’une association
spécialisée dans la prise en charge des cas de surendettement indique : ” Chefs
d’entreprises ou professions libérales, mais aussi cadres moyens et
supérieurs, sont des profils que l’on rencontre de plus en plus souvent dans
les dossiers qui nous sont confiés. ”
Les fonctionnaires eux-aussi peuvent se retrouver facilement surendettés,
justement à cause de leur statut qui rassure les banquiers
et autres organismes prêteurs, lesquels n’hésitent alors pas à leur accorder
des crédits importants. Or, suivant l’évolution de carrière, les changements
de situation familiales (naissance justifiant l’achat d’une nouvelle maison,
d’une voiture…) voire la survenue de certains évènements imprévus comme par
exemple la location d’un logement pour un enfant devenu étudiant (sans
oublier le prix des études elles-mêmes !) ou la nécessité d’assumer une
partie des frais de maison de retraite pour un ascendant, il peut arriver que
les échéances excèdent finalement la capacité de remboursement
des emprunteurs.
Un niveau d’endettement beaucoup plus élevé que la moyenne
On rencontre ainsi des ménages jusqu’ici aisés qui se retrouvent du jour
au lendemain quasiment à la rue après un redressement fiscal, une faillite
professionnelle ou même une succession de mauvais placements. Et ce risque
apparaît d’autant plus brutalement que les revenus étaient confortables.
Lorsqu’ils cessent brusquement ou simplement se réduisent au point de ne plus
pouvoir maintenir le même train de vie, nombreux sont ceux qui
recourent au crédit pour combler la différence, comptant sur le
caractère passager des problèmes. Le bénévole de l’association de lutte
contre le surendettement poursuit : “Nous essayons d’aider ces gens à
restructurer leur budget pour leur éviter la commission de surendettement de
la Banque de France, mais c’est parfois plus compliqué
qu’avec des ménages modestes car, dans certains cas, on
tombe sur des gens qui, après toute une vie sans le moindre souci financier,
ne savent tout simplement plus compter avant de dépenser. Certains ont même
du mal à comprendre qu’il leur est possible de réduire leur train de vie. Ils
sont perdus, ne comprennent pas ce qui leur arrive et on doit leur expliquer
qu’ils ont été un peu déconnectés de la réalité, mais qu’ils vont quand même
s’en sortir… à condition de vivre un peu plus comme tout le monde.”
Malheureusement, lorsque les difficultés s’éternisent, la situation de ces
personnes devient beaucoup plus délicate car, si la moyenne d’endettement des
ménages en défaut de paiement, toutes catégories confondues, se situe aux
alentours de 34000 euros, celle des ménages anciennement aisés
avoisine les 60000 euros.
Pour autant, la majorité des cas de surendettement concernent des
personnes modestes, très souvent concernées par un découvert bancaire
important. Certaines ont cru un moment pouvoir compter sur les
crédits à la consommation, et notamment les crédits renouvelables,
pour résoudre leurs problèmes, mais la plupart d’entre elles se sont juste
retrouvées en situation de surendettement passif,
c’est-à-dire lié à un accident de la vie, ou encore submergées par
l’accumulation de dépenses contraintes (loyer, assurances, etc.) que
leurs maigres revenus ne leur permettaient plus d’assumer.