Mon plus récent article
était assez long et passionné. Certains l’ont aimé et compris, d’autres un
peu moins. L’idée que j’ai tenté de transmettre était celle de la perte de
confiance. Je tenterai de nouveau ici de d’aborder le sujet, mais d’un point
de vue différent. Aujourd’hui, plutôt que de continuer de parler de la
fraude, de la collusion et de la logique renversée de la politique, de
l’économie et de la finance globale, je me pencherai sur un exemple du monde
réel. J’ai reçu cette semaine un commentaire assez long de la part d’un
lecteur qui visitait, parmi tous les pays du monde, le Zimbabwe. Je ne lui ai
pas demandé pourquoi, mais pour ce qui concerne notre propre avenir, il est parfois
bon d’observer ce qui est susceptible de se produire chez nous. Vous
trouverez ci-dessous l’essence de son message. Je vous conseille de lire ce
passage à deux fois jusqu’à le comprendre vraiment. J’ajouterais mon propre
commentaire ensuite. J’espère que ce petit exercice vous fera réfléchir.
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… En direct du
Zimbabwe :
« Oui, ils essaient
de vous vendre leur drôle de monnaie colorée fardée de zéros. Et ils prennent
des airs offensés lorsque vous rejetez leur offre. J’ai dit à quelqu’un que j’en
avais déjà acheté sur eBay. Il m’a regardé avec des yeux de biche
effarouchée. Et puis je suis parti.
Bref. J’ai fini par
rencontrer quelqu’un d’amical avec qui j’ai commencé à discuter.
Ce qui suit sort
directement de la bouche de quelqu’un qui est né, a grandi et a vécu au
travers de l’hyperinflation, avait un emploi, des parents, une maison, une
épargne, et tout le reste. Je lui ai simplement demandé ce qui s’était passé,
et comment il a pu s’en sortir.
Ses parents étaient
assez riches, des Britanniques, très proches de la retraite. Ils avaient une
épargne considérable. Pas non plus un million de dollars, mais autour de
250-500.000 dollars d’épargne directe.
Il m’a dit ceci :
‘Ils sont passés de gens qui avaient construit leur vie ici au Zimbabwe à des
gens incapables de s’offrir une miche de pain en seulement deux jours’. Ce
sont ses mots exacts, pas les miens. Ils sont encore clairs comme de l’eau de
roche dans ma mémoire, et j’étais encore avec lui il y a seulement deux
heures.
La première question que
je lui ai posée ensuite a été celle-ci : pourquoi n’ont-ils pas acheté
d’or ?
Et voici pourquoi :
Ses parents étaient très
conservateurs et avaient placé toute leur confiance en le système et le
gouvernement. Il ne leur serait jamais venu à l’esprit que quelque chose
d’aussi terrible puisse se produire. Selon lui, il aurait été trop risqué
d’acheter de l’or, non pas pour des raisons de légalité, mais parce que l’or
en tant qu’actif était perçu comme très peu sûr.
Il a dit qu’il penserait
peut-être (!!) à l’or la prochaine fois. Sa première réponse a été qu’il
pensait acheter quelques barils de pétrole qu’il conserverait dans son jardin
jusqu’au jour où il aurait besoin de le vendre. Je suis sérieux. Il m’a dit
‘Mais en effet, l’or pourrait valoir le coup la prochaine fois’. Je ne pense
pas qu’il ait déjà considéré cette option. C’est en tout cas ce que j’ai pu
ressentir, puisqu’il a dû s’arrêter un instant pour réfléchir avant de
répondre à ma question.
Même aujourd’hui, si la
même situation se présentait à nouveau, les gens ne se tourneraient pas
nécessairement vers l’or. Ils se contenteraient de convertir instantanément
tout ce qu’ils ont en dollars, juste pour être sûrs…
Je
lui ai dit que le dollar avait de fortes chances de traverser sa propre
hyperinflation. Il m’a semblé pris de court, et m’a répondu qu’il pensait que
c’était là le destin de l’euro, pas du dollar. Le Zimbabwe semble penser que
le dollar est, aujourd’hui plus que jamais, plus solide que la pierre. »
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Souvenez-vous toutefois
que c’est là une conversation que mon lecteur a eue avec un seul individu,
qui ne représente en rien un échantillon de la population. Il s’agit
toutefois d’une conversation avec quelqu’un « qui avait tout… et a tout
perdu ». Son histoire est importante pour un certain nombre de raisons,
que j’aborderais plus bas.
« Mathématiquement »,
le dollar est en route pour l’enfer de l’hyperinflation. Aucune personne
intelligente n’oserait douter de ce point. Même Harry Dent et Martin Armstrong,
les plus ardents déflationnistes, admettent que le dernier chapitre sera
celui d’une flambée du prix de l’or (qui signifie également un effondrement
de la confiance du public en le dollar). La différence entre eux et nous sera
la manière dont nous en arriverons là. Je pense que nous avons déjà traversé
la ruée vers le dollar en tant que valeur refuge. Le monde le perçoit comme
un élément continuel.
Le point le plus
important à retenir du commentaire de mon lecteur est ce passage :
« Il m’a dit ceci : ‘Ils sont passés de gens qui avaient construit
leur vie ici au Zimbabwe à des gens incapables de s’offrir une miche de pain
en seulement deux jours’. » Vous vous dîtes certainement « mais
nous ne sommes pas au Zimbabwe », les Etats-Unis sont de loin plus sophistiqués,
disposent de la plus importante force militaire du monde. Une telle
catastrophe ne pourrait jamais se produire ici, vous répète une petite voix à
l’arrière de votre tête. Laissez-moi vous dire une chose. Non, nous ne sommes
pas au Zimbabwe. Et quel dommage !
La grande
« République bananière » (ratio dette / PIB supérieur à 100%)
comprend déjà un gros pourcentage des nations souveraines du monde. Les
Etats-Unis ont un ratio dette / PIB bien au-dessus de 100%, et je ne prends
ici en compte que la dette « financée ». Lorsqu’y sont ajoutées les
garanties et obligations futures, le ratio flambe complètement. Après m’être
renseigné sur la situation du Zimbabwe. Le ratio dette / PIB du pays n’était
pas plus important que celui du Japon aujourd’hui, et presqu’égal (180%) à
celui de la Grèce. Le ratio dette / PIB des Etats-Unis toutes dettes
comprises est extrêmement élevé, peut-être même de plus de 500% ! Les
Etats-Unis, ce sont le Zimbabwe, sous stéroïdes. Avant d’aller plus loin, je
réfuterais ici l’évidence : les Etats-Unis ont peut-être une plus grande
armée que toutes les autres nations du monde, mais ont aussi beaucoup plus
d’ennemis. Nous cesserons bientôt d’imposer le dollar aux autres pays. Une
troisième guerre mondiale devrait être notre souci premier si les Etats-Unis
cherchaient à continuer d’imposer la dominance du dollar. Regardez autour de
vous. Le reste du monde est en colère. Il a réagi en établissant des lignes
commerciales qui excluent complètement le dollar des Etats-Unis. Les jours
de l’imposition du dollar au monde par le biais de notre force militaire sont
terminés.
J’ai dit plus haut qu’il
est dommage que nous ne soyons pas au Zimbabwe. Pouvez-vous deviner
pourquoi ? Parce que les Etats-Unis ont encore (ou pensent encore avoir)
un capital important. Les riches et les pauvres ont été séparés. La classe
moyenne n’entre plus dans aucune catégorie. Notre niveau de vie est bien plus
avancé que celui des Zimbabwéens en général, mais nous avons plus à perdre.
En d’autres termes, « mieux vaut n’avoir jamais eu que de finir
déchu ». Les Zimbabwéens ont perdu leur épargne. En moyenne, la baisse
de leur niveau de vie est minime en comparaison à un évènement similaire aux
Etats-Unis. Sans parler des émeutes qui éclateraient si les gens qui avaient
tout se levaient un matin pour n’avoir plus rien. Les Zimbabwéens sont tombés
du rez-de-chaussée. Nous tomberons d’un gratte-ciel ! Le hasard faisait
bien les choses, nous apprenons tout juste que le dollar zimbabwéen va
bientôt disparaître : http://www.zerohedge.com/news/2015-06-11/zimb...ion-zim-dollars
Je trouve également
curieux que la personne avec laquelle s’est entretenu mon lecteur pense
encore aujourd’hui que l’or représente un risque. Prenons un peu de recul.
Pourquoi pensez-vous que les forces d’invasion volent toujours l’or de leurs
ennemis plutôt que leurs devises ? Ne me dîtes pas que je vis à l’époque
romaine ou au Moyen-Âge, ou encore sous Napoléon. Je ne suis pas non plus
resté coincé à la première ou deuxième guerre mondiale. Ces quelques dernières
années, les Irakiens, les Ukrainiens, les Grecs et les Libyens ont vu leur or
volé ces dernières années. Si les Etats-Unis étaient envahis, que pensez-vous
que leurs envahisseurs trouveraient s’ils entraient dans leurs coffres à la
recherche d’or ?
Réfléchissez-y un
instant. Les Etats-Unis, et l’Occident en général, vont-ils se réveiller un
matin pour trouver les marchés en état de panique ? Pensez-vous vraiment
que les devises fiduciaires gagneront de la valeur si les marchés de la dette
et des produits dérivés fermaient leurs portes ? Pensez-vous que l’or et
l’argent seront disponibles sous toutes les formes possibles sauf en tant
qu’objets de troc ? J’ai du mal à voir au-delà de l’argument
déflationniste selon lequel le dollar finira par regagner en puissance. La
question piège est bien évidemment de savoir où nous devrions dès aujourd’hui
déposer nos si précieux numéros digitaux pour qu’ils soient en sûreté.
Attendez-vous à assister à une ruée sur les brouettes.